La Presse (Tunisie)

La câblerie ferme ses portes

Ils sont 390 employés de la câblerie «Coroplast» du Kef à se retrouver à la rue à la suite de la fermeture de l’usine. «L’entreprise est entrée en faillite», soutient la direction. Les employés sont convaincus qu’elle rouvrira à Hammamet

- Jamel TAIBI

La direction de la câblerie «Coroplast» du Kef vient de jeter un pavé dans la mare, en annonçant la fermeture de son usine d’une façon irréversib­le, et ce, nous dit-on, en raison de l’entrée de l’entreprise en faillite. Une pilule que le personnel, fort de 390 employés, n’a pas avalé, en avançant tout bonnement la thèse d’une machinatio­n sordide ourdie dans le cadre d’un complot visant à mettre fin à ses activités, après le subterfuge de sa délocalisa­tion à Hammamet. Du coup, les ouvriers sont entrés dans un sit-in ouvert en signe de protestati­on contre cette décision jugée impromptue et surtout inexpliqué­e, tant le travail marchait à merveille dans la câblerie. Mardi après-midi, une partie des employés a en effet envahi l’enceinte du siège du gouvernora­t et est entrée en sit-in ouvert pour réclamer des mesures urgentes à même d’empêcher la fermeture de la câblerie, même si le secrétaire général du Syndicat de l’entreprise parle déjà d’une décision irrévo- cable et délibéréme­nt choisie par la direction de l’entreprise, laquelle aurait, selon la même source, programmé la fermeture de la câblerie depuis longtemps, notamment après qu’elle a épuisé ses droits légaux aux bénéfices et autres avantages pendant une décennie de grâce assortie d’avantages fiscaux et sociaux, en ce que le code des investisse­ments stipule une franchise totale pour les entreprise­s installées en Tunisie pendant dix ans, notamment en matière de paiement des cotisation­s sociales et d’impôts sur les bénéfices. Aujourd’hui, les employés se retrouvent dans la rue, après dix ans de labeur et d’abnégation, avec en plus un mois de juin sans salaire, ce qui, selon eux, représente, un coup dur pour la région du Kef où chaque emploi compte énormément. Hier, une réunion a été tenue au siège du gouvernora­t au cours de laquelle les sit-inneurs et l’Union régionale du travail de l’Ugtt ont exigé la tenue d’une réunion de crise urgente du gouverneme­nt sur la question, et ce, pour régler cette situation qui, cependant, semble épineuse et difficile à résoudre, tant les intérêts de chaque partie sont divergents. La réunion n’a abouti sur aucune solution concrète, excepté le transfert du dossier au gouverneme­nt. Le patron de la câblerie avait toutefois, conclu, en avril dernier, un accord engageant toutes les parties et portant reprise des activités de la câblerie sous conditions, permettant d’apaiser la tension temporaire­ment, du moins pendant les deux mois de mai et de juin, même si encore les employés se sont plaints des retards de leur salaire du mois de mai et surtout le refus de leur accorder la paie du mois de juin, après que la direction eut évoqué, selon la partie syndicale, le mobile de la faillite de la câblerie, une thèse douteuse que réfutent les employés, lesquels estiment qu’il s’agit tout simplement de manoeuvres occultes visant à mettre fin aux activités de l’entreprise dans la région, surtout que la même usine a été implantée à Hammamet avec parfois des équipement­s de l’usine de Coroplast du Kef, ce qui représente, selon de nombreux employés, un nouveau subterfuge visant tout simplement à fermer l’usine du Kef au profit de la câblerie de Hammamet, considérée comme un investisse­ment nouveau et donc en droit de bénéficier des avantages prévus par le code des investisse­ments en la matière pendant encore une dizaine d’années. Pour le moment, la tension reste vive dans la ville du Kef où la population retient son souffle, d’autant que les souvenirs des semaines sombres, jalonnées de sit-in et de fermetures des routes, sont toujours dans les mémoires, nourrissan­t de la sorte les craintes de voir ce scénario se répéter inévitable­ment si aucune issue n’est trouvée à ce problème complexe et épineux qui ébranle la ville du Kef ces jours-ci.

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