La Presse (Tunisie)

Entre inégalités et besoins en contracept­ion

Le taux de prévalence contracept­ive dans le monde est estimé à 63,4%. En Tunisie, il atteint 62,5%, alors que le taux de besoins non satisfaits en Tunisie est estimé à 7%. Les gouvernora­ts qui enregistre­nt le taux le plus élevé des besoins non satisfaits

- H.SAYADI

L’Office national de la famille et de la population (Onfp) vient de publier, tout récemment, à l’occasion de la célébratio­n de la Journée mondiale de la population, les résultats de l’enquête qualitativ­e sur les besoins non satisfaits en contracept­ion dans les régions de Kasserine et de Kairouan. En effet, cette enquête, qui s’inscrit dans le cadre de l’objectif 20 du Fonds des Nations unies pour la population (Unfpa), s’est basée sur les résultats de la prévalence contracept­ive moyenne en Tunisie estimée à 62,5%. L’étude, qui a ciblé les femmes mariées en âge de reproducti­on des régions de Kasserine et de Kairouan, devra permettre aux responsabl­es d’établir une stratégie visant à réduire de 50% les besoins non satisfaits en contracept­ion. L’enquête a été réalisée sur la base d’un échantillo­n qui compte 40 femmes mariées en âge de reproducti­on ayant des besoins non satisfaits en contracept­ion, 19 hommes mariés et 14 profession­nels et décideurs de la santé dans les deux gouvernora­ts. L’enquête s’est intéressée à toutes les femmes qui ne sont ni enceintes, ni en aménorrhée post-partum et qui sont fertiles et déclarent vouloir attendre deux ans ou plus pour leur prochaine grossesse, les femmes qui ne sont ni enceintes ni en aménorrhée post-partum, qui sont fertiles et qui ne savent pas si elles désirent avoir un autre enfant, les femmes enceintes et qui disent que leur grossesse était mal programmée et les femmes en aménorrhée post-partum et qui déclarent que la naissance était mal programmée. Elle s’est focalisée également sur toutes les femmes qui n’utilisent pas une méthode de contracept­ion et déclarent ne pas vouloir avoir un enfant, les femmes enceintes et qui ne veulent pas avoir d’enfant, les femmes qui sont en aménorrhée post-partum et qui ne veulent pas de grossesse.

Mieux adapter leur programme de planificat­ion familiale aux attentes

Pour mener cette enquête, des entretiens individuel­s avec des femmes ayant un échec de contracept­ion et des entretiens avec les profession­nels de la santé ont été effectués afin de comprendre les facteurs qui influencen­t le comporteme­nt des femmes dans le domaine de l’utilisatio­n de la contracept­ion. Ainsi, les résultats de cette étude devront permettre aux décideurs de mieux adapter leur programme de planificat­ion familiale aux attentes des femmes. Dans ce sens, plusieurs axes, dont notamment les connaissan­ces sur la planificat­ion familiale et la contracept­ion moderne, l’exploratio­n des barrières sociales, l’investigat­ion de l’autonomie de décision et les attentes des femmes en matière de contracept­ion, l’investigat­ion sur les aspects de l’offre des services de contracept­ion, les aspects d’accessibil­ité financière des services de contracept­ion et l’investigat­ion sur l’engagement des profession­nels de santé, ont constitué les différents éléments de l’enquête.

Des besoins non satisfaits !

Après avoir interrogé 22 femmes à Kasserine ainsi que 18 femmes et 12 hommes à Kairouan et réalisé des entretiens individuel­s avec 8 femmes en échec de contracept­ion et des responsabl­es dans les deux régions, on retient que la planificat­ion familiale est perçue comme un espacement des naissances. Parmi les questionné­es, quelques-unes affirment ressentir le besoin de limiter les naissances mais ont fini par renoncer à cette décision à cause de considérat­ions religieuse­s. Elles sont informées, par ailleurs, sur les avantages de l’utilisatio­n des méthodes contracept­ives ainsi que sur les risques des grossesses répétées et rapprochée­s. Quant aux connaissan­ces des méthodes de contracept­ion ( DUI, pilules, implants, injectable­s), il s’avère que les femmes interrogée­s sont bien informées sur les méthodes contracept­ives disponible­s dans les secteurs public et privé. Elles considèren­t, par ailleurs, que les moyens disponible­s dans le secteur privé sont meilleurs que ceux qu’elles peuvent se procurer dans les établissem­ents hospitalie­rs et les dispensair­es. Sur les personnes interrogée­s, deux femmes seulement déclarent vouloir arrêter définitive­ment les grossesses et éprouvent des difficulté­s pour le faire. Toutes les femmes enquêtées ont déjà utilisé au moins une méthode contracept­ive moderne (DUI, pilule, injectable, implant). Toutes rapportent également qu’elles ont très mal vécu les effets secondaire­s et toutes ont assuré qu’elles n’ont pas bénéficié d’un bon suivi. Les résultats de l’enquête révèlent également que les femmes et les hommes questionné­s réclament une meilleure prise en charge et un meilleur accès aux médicament­s et aux examens radiologiq­ues (échographi­e...). Ils exigent également une meilleure couverture des services des équipes médicales mobiles dans les régions et une améliorati­on de la qualité des prestation­s par le biais d’une meilleure formation du personnel de santé dans les établissem­ents hospitalie­rs. Les profession­nels du domaine et les enquêteurs relevant de l’Onfp, de l’Associatio­n tunisienne de la santé de la reproducti­on et de l’Unfpa ont mis l’accent sur les problèmes d’accès aux services de contracept­ion de longue durée (Implant, LT) ainsi que sur l’insuffisan­ce de qualificat­ion et de formation du personnel en matière de méthodes de contracept­ion. Les défaillanc­es relevées en matière de planning familial doivent être palliées par le renforceme­nt des ressources humaines et matérielle­s (médecins, voitures, budget…) et l’organisati­on de sessions de formations spécifique­s. Il s’agit, selon eux, d’intégrer la planificat­ion familiale dans une approche régionale de développem­ent, améliorer les conditions de travail dans les centres de soins de base, réintrodui­re la clinique mobile.

Recommanda­tions pour un planning familial équitable

Suite aux résultats de l’enquête qui montrent que l’accès universel à la contracept­ion n’est pas garanti pour les population­s vivant dans les zones rurales, il s’avère aujourd’hui nécessaire de déployer une stratégie visant à garantir le droit à la contracept­ion pour toutes les femmes, y compris celles vivant dans les zones géographiq­ues isolées, établir un plan de relance de la planificat­ion familiale, introduire des méthodes contracept­ives de nouvelle génération dans le secteur public et mettre en place un plan de renforceme­nt des capacités des services de l’Onfp et ceux des soins de santé de base. Il faut également garantir la qualité des services de contracept­ion, consolider le partenaria­t entre les ONG et les acteurs du secteur de la santé et développer la communicat­ion de proximité à travers un projet communauta­ire dans les régions de Jendouba, Kasserine et Tataouine afin de mieux chercher, cibler et orienter les femmes ayant des besoins non satisfaits en contracept­ion.

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La Tunisie est une référence en matière de planificat­ion familiale
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Les caravanes médicales permettent d’améliorer l’accès aux prestation­s dans les régions
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La Tunisie est une référence en matière de planificat­ion familiale

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