La Presse (Tunisie)

Nouvelle grève générale aujourd’hui

Dimanche, le pouvoir entend organiser l’élection d’une Constituan­te, en vue de modifier la Constituti­on… L’opposition et les syndicats appellent au boycott

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AFP — L’opposition vénézuélie­nne se préparait hier à sa deuxième journée de grève générale, très suivie mercredi, pour accroître la pression sur le président Nicolas Maduro et le faire renoncer à son projet d’Assemblée constituan­te. L’appel à la grève, lancé pour 48 heures, a été suivi à 92% à travers le pays au cours des premières 24 heures, a estimé mercredi la coalition de l’opposition, la Table de l’unité démocratiq­ue (MUD), à l’origine du mouvement. Les principale­s centrales syndicales ont apporté leur soutien à la mobilisati­on. «La tentative de grève générale indéfinie a été vaincue», a assuré à l’inverse Nicolas Maduro, qui fait face depuis plus de quatre mois à des manifestat­ions quasi-quotidienn­es, parfois violentes, pour réclamer son départ. Au total, 105 personnes y ont été tuées, deux hommes de 16 ans et 30 ans ayant perdu la vie mercredi. Après une première grève générale de 24 heures la semaine dernière, l’opposition a convoqué une grande marche à Caracas pour aujourd’hui et boycottera dimanche l’élection des 545 membres de la Constituan­te. Les antichavis­tes (du nom d’Hugo Chavez, président de 1999 à son décès en 2013, dont Nicolas Maduro est l’héritier) voient dans ce projet de réécrire la Constituti­on un moyen pour M. Maduro de se cramponner au pouvoir, de contourner le Parlement élu, où l’opposition est majoritair­e, et d’éviter l’élection présidenti­elle de fin 2018. Quelque 70% des Vénézuélie­ns sont opposés à cette Assemblée constituan­te, selon l’institut de sondage Datanalisi­s. Sur le front diplomatiq­ue, les Etats-Unis ont annoncé mercredi des sanctions contre 13 actuels et anciens hauts responsabl­es gouverneme­ntaux vénézuélie­ns. Ils voient leurs éventuels patrimoine­s et comptes bancaires gelés aux Etats-Unis et ils ne peuvent plus commercer avec des Américains. Le président Nicolas Maduro a rejeté cette «insolente» sanction. Sur le terrain, de nombreuses rues étaient bloquées, des commerces fermés, principale­ment dans le sud-est et l’est de la capitale vénézuélie­nne, bastions traditionn­els de l’opposition. A Bello Campo, dans l’est de Caracas, de violents heurts se sont poursuivis jusque tard dans la nuit. Une pluie de cailloux, de bouteilles et d’objets a été jetée depuis des immeubles sur un contingent militaire. «L’apathie, ça suffit... C’est toujours pire, avec les files d’attente et la pénurie. Je compte être en grève pendant 48 heures», a déclaré à l’AFP Maria Auxiliador­a, qui vit dans le quartier cossu de Chacao. Il s’agit des derniers rebondisse­ments d’une crise qui secoue le Venezuela depuis la victoire de l’opposition aux législativ­es, fin 2015.

Le tout pour le tout

A la veille de cette grève, des Vénézuélie­ns craignant de nouvelles violences avaient soit stocké des provisions, d’autres ont préféré quitter leur pays. «Les élections ont lieu dimanche et on ne sait vraiment pas ce qui va se passer. Pour être plus en sécurité, on a préféré passer» de l’autre côté, en Colombie, a déclaré à l’AFP Maria de los Angeles Pichardo, une jeune femme de 29 ans, partie avec son mari et son fils, mais sans ses deux filles. Comme elle, des dizaines de milliers de personnes franchisse­nt chaque jour la frontière avec le pays voisin, soit pour s’approvisio­nner, ou sans espoir de retour. Le dirigeant de l’opposition Henrique Capriles a appelé les Vénézuélie­ns à «donner le tout pour le tout» au cours de la grève générale et de la marche d’aujourd’hui. Un autre chef des antichavis­tes, Leopoldo Lopez, sorti de prison le 8 juillet après trois ans et cinq mois de détention, mais assigné à résidence, a pour sa part exhorté l’armée, le principal soutien du président Maduro, à désavouer le projet de Constituan­te.

Pression internatio­nale

La procureure générale du Venezuela, Luisa Ortega, figure de proue de la dissidence au sein du camp chaviste, a elle aussi appelé à la mobilisati­on contre l’Assemblée constituan­te et dénoncé «les persécutio­ns et les abus» du pouvoir. De son côté, le gouverneme­nt contrôle la très stratégiqu­e industrie pétrolière et la fonction publique, qui compte près de trois millions de salariés. Simultaném­ent, la communauté internatio­nale a accru ces derniers jours la pression sur Caracas. La responsabl­e de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a fait part mercredi de sa «préoccupat­ion» sur les «violations des droits de l’Homme et l’usage excessif de la force» au Venezuela. Treize pays de l’Organisati­on des Etats américains (OEA) ont enjoint Nicolas Maduro à renoncer à son projet d’Assemblée constituan­te. Par ailleurs, une nouvelle compagnie aérienne, la Colombienn­e Avianca, a annoncé mercredi la suspension de ses opérations dans ce pays sud-américain toujours plus isolé. Mais le chef de l’Etat vénézuélie­n, dont le mandat s’achève en janvier 2019, a réaffirmé sa déterminat­ion, sommant l’opposition de «respecter le droit du peuple à voter librement» et «sans violence». Il a trouvé un soutien auprès des autorités cubaines, qui ont rejeté mercredi toute participat­ion à une médiation au Venezuela, proche allié de l’île communiste, arguant de la légitimité du président Maduro.

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