«La Catalogne sera un Etat indépendant sous la forme d’une République», a affirmé Puigdemont
Le parlement catalan propose de «suspendre les effets d’une déclaration d’indépendance»
AFP — Le président de la Catalogne, Carles Puigdemont, confirme qu’il compte aboutir à l’indépendance de la région : «J’assume et je présente les résultats du référendum, qui sont que la Catalogne sera un Etat indépendant sous la forme d’une République.». Mais il a ajouté que le Parlement catalan «propose de suspendre les effets de cette déclaration d’indépendance», afin de «commencer un dialogue». Autrement dit, il ne déclare pas l’indépendance de manière unilatérale. Et appelle à une médiation européenne. Le président séparatiste catalan a commencé, avec une heure de retard et dans la confusion hier, son allocution devant le parlement régional où il pourrait déclarer unilatéralement l’indépendance de la Catalogne. Costume et cravate sombres, l’air grave, Carles Puigdemont, un ancien journaliste de 54 ans, devait définir sa ligne après le référendum d’autodétermination interdit du 1er octobre au cours duquel son gouvernement assure que le «oui» l’a emporté à plus de 90%. Il a notamment souligné la nécessité impérieuse de «réduire les tensions» dans la région et dénoncé le refus «radical» de Madrid de négocier un référendum. sous le regard inquiet du reste de l’Europe, déjà ébranlée par le Brexit de 2016. Dans les rues de Barcelone, on retenait son souffle. «Je me positionne comme indépendantiste, mais c’est vrai que je n’aurais jamais imaginé qu’on en arriverait là», confie Neus Aviles, 61 ans.
Fantômes du passé
Carolina Palles, une anti-indépendantiste de 53 ans, vivait, quant à elle, «un jour triste», dans son kiosque de vendeuse de fleurs. A Madrid, le chef du gouvernement Mariano Rajoy a prévenu qu’en cas de déclaration unilatérale d’indépendance, quelle qu’en soit sa forme, il pourrait suspendre l’autonomie de la région, une mesure jamais appliquée dans cette monarchie parlementaire extrêmement décentralisée. Il a d’autres instruments à sa disposition, puisqu’il a déjà pris le contrôle des finances de la Catalogne en septembre. Il peut aussi instaurer un état d’urgence allégé lui permettant d’agir par décret. La justice pourrait pour sa part agir contre Carles Puigdemont et le noyau dur d’indépendantistes qui a organisé le référendum d’autodétermination, que les séparatistes prétendent avoir remporté avec 90% des voix pour une participation de 43%. Mais toute mesure draconienne risque de provoquer des troubles en Catalogne, où huit électeurs sur dix auraient souhaité un référendum en bonne et due forme. La tension et les émotions y sont déjà fortes, même si la plupart des manifestations sont pacifiques. Elle l’est également dans toute l’Espagne où les vieux fantômes du passé ressurgissent quand parmi les «patriotes» défendant l’unité de l’Espagne se glissent des nostalgiques de la dictature de Francisco Franco (1939-1975). Comme pour le référendum écossais en 2014 ou le vote pour le Brexit en 2016, le sujet divise les foyers. De nombreuses questions demeurent aussi sur la mise en oeuvre d’une telle indépendance dans une région qui a la main sur l’éducation, la santé, la police. Mais les finances et le contrôle de l’espace aérien, des infrastructures (ports, aéroports, réseau ferroviaire, télécommunications, etc.) et de l’armée restent entre les mains de l’Etat central.