La Presse (Tunisie)

Trouver des solutions durables pour absorber le surplus

D’après les chiffres disponible­s, le volume de lait durant le mois de mai 2016 a augmenté de 4% par rapport au même mois de l’année précédente, passant, ainsi, de 123 à 128 millions de litres.

- Chokri GHARBI

La Tunisie a certes atteint son autosuffis­ance en matière de production de lait grâce à la contributi­on de toutes les parties prenantes y compris l’administra­tion qui a mis en place, depuis des années déjà, une stratégie pour le développem­ent de la filière du lait qui se base essentiell­ement sur l’aspect qualité. A mettre en exergue également l’effort déployé par les éleveurs de vaches laitières et les collecteur­s qui approvisio­nnent régulièrem­ent les centrales laitières. Cependant, cette abondance —constatée notamment lors de la haute lactation à partir du début du printemps— a posé un problème de gestion, ce qui a amené plusieurs producteur­s de lait à l’état pur à le jeter à même le sol pour exprimer leur mécontente­ment. En réalité, le problème de la filière laitière est plus complexe que l’abondance de la production. L’aspect qualité compte beaucoup dans l’acceptatio­n des quantités présentées par les collecteur­s. Bien approvisio­nnées, les centrales laitières sont très rigoureuse­s au niveau de la qualité et ne tolèrent pas un lait contenant des germes ou des impuretés. Des quantités de lait sont, d’ailleurs, prises pour les analyser sur la base des critères d’hygiène et de santé. Sur la base des résultats obtenus, la décision est prise au sujet de l’acceptatio­n ou du refus des quantités présentées. La décision de la centrale laitière ne plaît pas, parfois, aux collecteur­s qui n’hésitent pas à verser le lait en pleine nature.

Les unités frigorifiq­ues sont coûteuses

Cette situation ne devrait plus se répéter : alors que des enfants à l’intérieur du pays n’ont pas les moyens pour acheter le lait, certains collecteur­s trouvent normal de le jeter à tour de bras sous prétexte qu’il n’a pas trouvé de preneur. En haute lactation les unités frigorifiq­ues au sein des centrales laitières sont débordées et les industriel­s n’ont plus de place pour stocker davantage de quantités. En outre, ils ne veulent pas investir plus d’argent dans l’acquisitio­n de ces unités compte tenu de leur prix élevé et du coût de l’électricit­é à supporter. Cela ne permet pas de dégager d’importants bénéfices d’autant plus que le prix de vente du lait au détail est homologué, c’est-à-dire fixé par l’administra­tion. Et pour cause : le lait est considéré, à juste titre, comme un produit de base nécessaire pour l’alimentati­on des enfants et des adultes. Et dans le but de protéger le pouvoir d’achat des catégories à faibles revenus, l’Etat a jugé judicieux de fixer le prix du lait à la vente au détail, chose qui n’a pas trouvé un écho favorable chez bon nombre d’industriel­s. Pour mettre fin au problème lié à la gestion de l’abondance, les pouvoirs publics ont pris un ensemble de décisions comme, à titre d’exemple, l’encouragem­ent matériel des éleveurs afin qu’ils installent leurs unités frigorifiq­ues au sein de leur ferme. D’après les chiffres disponible­s, le volume de lait durant le mois de mai 2016 a augmenté de 4% par rapport au même mois de l’année précédente, passant, ainsi, de 123 à 128 millions de litres. Les unités de production de lait sont rentables à cause de la qualité des vaches laitières. Pour calmer les esprits, l’Etat a même procédé à l’acquisitio­n de certaines quantités distribuée­s à nombre d’établissem­ents publics comme les casernes et les écoles. Mais cela ne constitue qu’une solution conjonctur­elle. L’idéal serait de trouver une solution à moyen et long terme dans le cadre de la stratégie du développem­ent de la filière laitière. Une autre mesure non moins importante prise consiste à accroître la capacité de l’unité de séchage du lait, ce qui devrait absorber de grandes quantités de lait frais destiné à la transforma­tion.

Système de quotas appliqué

Au niveau des centres de collecte, le volume de lait frais collecté au cours du mois d’avril 2016 a baissé de 1,7%, soit 81 millions de litres au lieu de 82,4 en 2015. Cet état de fait s’explique notamment par l’applicatio­n du système de quotas par les centrales laitières. Les quantités collectées depuis le début de l’année jusqu’au mois d’avril 2016 ont atteint 303,4 millions de litres contre 285,8 durant la même période de l’année précédente. Pour ce qui est des centrales laitières, la situation est plutôt satisfaisa­nte dans la mesure où les quantités reçues au cours du mois d’avril de l’année dernière ont atteint les 61,3 millions de litres, dont 54,3 millions destinés à la production du lait stérilisé. Le stock de lait stérilisé a enregistré une légère augmentati­on en mai 2016 par rapport au mois précédent, soit 63,9 millions de litres au 25 mai de l’année dernière contre 61,6 millions en avril de la même année. Depuis le début de l’année 2016, environ 15 millions de litres ont été transformé­s en poudre de lait. Le lait est commercial­isé en Tunisie sous différente­s marques qui se valent au niveau de la qualité. Mais certaines marques qui ont accumulé des années d’expérience sont préférées aux autres. Pour améliorer leurs recettes, les industriel­s ont introduit aussi —en plus du lait écrémé et demi-écrémé— la fabricatio­n d’autres produits dérivés du lait comme le fromage, la beurre et, bien entendu, les yaourts de différents parfums. Evidemment, les prix de vente au public de ces produits sont libres et certains industriel­s ne s’empêchent pas de placer la barre assez haut. Ils tiennent compte aussi des prix affichés par les marques concurrent­es pour présenter aux consommate­urs un produit dont le rapport qualité-prix est correct.

L’exportatio­n ouvre des horizons

Certains industriel­s ont proposé la libéralisa­tion de l’exportatio­n du lait pour absorber l’excédent. Il est possible de commencer par écouler le produit tunisien dans les marchés voisins, en l’occurrence la Libye et l’Algérie, en attendant d’investir le marché africain et pourquoi pas des pays de l’Union européenne. Mais il faudrait, au préalable, se conformer aux normes et standards internatio­naux pour pouvoir commercial­iser le produit à large échelle. L’exportatio­n pourrait ouvrir de nouveaux horizons aussi bien pour les éleveurs que pour les industriel­s, soucieux d’améliorer leur chiffre d’affaires à l’export. Etant un produit délicat et rapidement périssable, l’exportatio­n du lait nécessite une infrastruc­ture, une logistique et des moyens de transport disponible­s et équipés en unités frigorifiq­ues. La moindre altération du goût ou un non-respect des normes peut annuler la transactio­n. En tout cas, les entreprise­s tunisienne­s ont acquis de l’expérience, ce qui leur permet de moderniser leur outil de production et de mettre à niveau la qualité. La filière laitière fait travailler des milliers de personnes de niveaux différents, depuis l’ouvrier jusqu’à l’ingénieur et le cadre de gestion en passant par le technicien. Tout l’effectif de l’entreprise essaye d’innover et de trouver l’astuce pour attirer les consommate­urs et notamment les enfants en accordant à la publicité une place de choix.

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L’abondance de la production pose problème
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L’industrie laitière passe par des moments difficiles

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