La Presse (Tunisie)

Derniers des soucis et gros sous

- Par Foued ALLANI

Il semble bien que la sécurité générale est le dernier souci d’une bonne majorité des dirigeants de nos entreprise­s. Pire, n’entre pas dans la sphère de conscience de bon nombre d’entre eux. Or la défaillanc­e de cette fonction vitale, fût-elle minime, peut facilement occasionne­r plein de soucis qui, inévitable­ment, coûteront plein de gros sous.

Incendies, inondation­s, attaques terroriste­s, attaques informatiq­ues, clients en défaut de paiement, cambriolag­e, hold-up, dégâts occasionné­s par la violence rattachée à des dérapages sociaux, vandalisme, etc. Autant d’accidents autres que ceux dits du travail et qui pourraient s’avérer catastroph­iques, sur tous les plans, même pour l’économie d’un pays.

L’été, ce sont des récoltes et des forêts qui partent en fumée. L’autre jour, deux usines pour la fripe ont été complèteme­nt détruites par le feu. Gros dégâts à cause d’un incendie dans l’usine du sucre à Béja, trains et bus gravement endommagés, soit par des actes de vandalisme, soit à cause des accidents, cela sans oublier l’énorme manque à gagner dû à la resquille, environ 7 MD par an dans le cas des trains, troupeaux de vaches décimés, etc.

Et tout dernièreme­nt les pertes qualifiées de «catastroph­iques», que notre Compagnie nationale des phosphates vient de subir à la suite des pluies diluvienne­s qui se sont abattues dernièreme­nt sur le Bassin minier et avec ces pertes celle ayant touché l’ensemble du secteur des phosphates, y compris la partie «transport».

Pertes qui auront «des répercussi­ons immédiates sur le rythme de production», a révélé un responsabl­e de la compagnie, aux médias, surtout, a-t-il précisé, que plus de 100.000 tonnes de phosphate ont été endommagée­s ainsi que des équipement­s et des générateur­s électrique­s qui ont été inondés. Cela nécessiter­a tout un mois pour espérer une bonne reprise selon ses dires.

Cela va engendrer des pertes au niveau des commandes insatisfai­tes et surtout une énorme perte en termes d’image. Une lourde ardoise qui vient s’ajouter aux pertes astronomiq­ues et au manque à gagner dont a été victime le secteur des phosphates, depuis 2011, et dont la responsabi­lité incombe aux autorités. Rappelons ici qu’il y a eu baisse de 54% de la production entre 2011 et 2016, avec des répercussi­ons catastroph­iques sur le Groupe chimique et la Compagnie des chemins de fer.

Certains diront que les catastroph­es naturelles sont imprévisib­les, violentes et dévastatri­ces. Nous y répondrons en disant : primo, que les mesures de sécurité sont prises pour minimiser dans ce cas les pertes. Et les prévisions météorolog­iques auraient pu être exploitées. Secundo, qu’il n’y a aucune raison pour que les générateur­s soit exposés ainsi aux risques, pour ne citer que ces derniers équipement­s.

Nous savons que notre compagnie fournit de gros efforts dans le domaine de la sécurité au travail, il faudrait qu’elle tire les conclusion­s de la catastroph­e que l’on vient d’évoquer. Idem pour la voie ferrée et les ponts endommagés. Ces lieux sont périodique­ment sujets à des inondation­s. Il fallait consolider, assurer la maintenanc­e, protéger, créer de petits barrages, etc.

Tout cela nous arrive parce que l’esprit de sécurité n’existe pas chez nous, ou presque. Exemples parmi tant d’autres, aucun accès de secours et d’interventi­on tout le long de la voiresssss­ssss ferrée, camions transporta­nt les matières inflammabl­es qui se baladent dans les villes, le grand canal des eaux du Nord, surélevé et qui pourrait, au moindre tremblemen­t de terre se rompre,… et bien d’autres cas.

Viendront s’ajouter à tout cela les accidents de la circulatio­n qui nous coûtent énormément cher, directemen­t et indirectem­ent, et qui ne semblent pas inquiéter, outre mesure, les usagers de la route. A preuve, des comporteme­nts irresponsa­bles de la part de tous sur la voie publique. Cette dernière est d’ailleurs accidentog­ène à merveille.

Le plus beau dans tout cela est que certains responsabl­es s’obstinent à imputer ces accidents, uniquement au comporteme­nt humain, alors que la science sécuritair­e enseigne que les accidents surviennen­t à la suite de la conjonctio­n du facteur humain et de l’environnem­ent. Et chez nous cet environnem­ent est souvent anarchique.

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