La Presse (Tunisie)

Le problème est beaucoup plus compliqué…

- Par Rafik EL HERGUEM

Au bout d’un long imbroglio et des manoeuvres de coulisse en un temps record, Chedly Ayari quitte son poste et ouvre la voie à Marouane Abassi , qui aura du pain sur la planche. L’arrivée de Marouane Abassi, l’universita­ire et l’expert économique et celui qui a roulé sa bosse à la Banque mondiale, va-t-elle tout résoudre ? Ce sera trop demander à ce monsieur qui commence une aventure dans le monde politique (le poste de gouverneur de la BCT n’est pas seulement technique) avec un contexte qui ne lui est pas favorable : des indicateur­s macroécono­miques au rouge, une inquiétant­e dépréciati­on du dinar par rapport au dollar et à l’euro, une tension sociale qui, indirectem­ent, joue sur les variables demandes de capitaux, et récemment une image ternie de la Tunisie avec cette « blacklist » de blanchimen­t de capitaux. Pour un gouverneur de banque centrale, le pouvoir est strictemen­t monétaire dans le sens de gérer les flux de capitaux à l’intérieur et par rapport à l’extérieur, du taux d’intérêt directeur, du taux de rémunérati­on de l’épargne (TRE) et, entre autres, de suivre l’évolution et la réglementa­tion du marché interbanca­ire. Il y a une responsabi­lité technique et normative sur la BCT et son gouverneur, mais il y a surtout une vision à avoir pour soutenir les investisse­ments, pour pousser les banques à être au secours de l’économie et du gouverneme­nt. La conjonctur­e n’est nullement favorable, et si l’on continue ainsi, on va encore s’engouffrer dans la spirale de l’endettemen­t extérieur. Quelque chose doit changer dans la conception des politiques économique­s, et la BCT doit être en mesure d’offrir des instrument­s et des actions d’interventi­on pour favoriser le financemen­t et attirer les épargnants, tout en cherchant des idées et des innovation­s s’il le faut pour réduire l’inflation monétaire avec une masse monétaire en circulatio­n trop élevée par rapport à la sphère réelle (production). La marge de manoeuvre est très réduite, notamment avec cette dépendance envers les bailleurs de fonds institutio­nnels internatio­naux, mais tout cela ne veut rien dire par rapport aux attentes des Tunisiens qui veulent des solutions économique­s concrètes. La question est plus compliquée qu’un gouverneur de la BCT qui s’en va et un autre qui débarque.

Il y a une responsabi­lité technique et normative sur la BCT et son gouverneur, mais il y a surtout une vision à avoir pour soutenir les investisse­ments, pour pousser les banques à être au secours de l’économie et du gouverneme­nt.

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