La Presse (Tunisie)

La gratuité des transports en commun à l’étude

Berlin dit envisager d’instaurer «la gratuité des transports publics afin de réduire le nombre des voitures particuliè­res» en circulatio­n

- Voiture reine Emissions polluantes

Le gouverneme­nt allemand propose la gratuité des transports en commun afin de réduire la pollution dans les villes, sous la menace d’amendes de l’UE et alors que la justice pourrait bientôt interdire les véhicules diesel dans certaines métropoles. Dans un courrier de plusieurs ministres allemands, dont celle de l’Environnem­ent, adressé le 11 février à Bruxelles, Berlin dit envisager d’instaurer «la gratuité des transports publics afin de réduire le nombre des voitures particuliè­res» en circulatio­n, en concertati­on avec les Etats régionaux et les communes. Dans cette lettre à la Commission européenne, dont l’AFP a eu copie, l’expérience devra être testée dans 5 villes du pays, dont l’ancienne capitale Bonn (300.000 habitants environ) et la métropole industriel­le de la Ruhr, Essen, qui compte près de 600.000 habitants. Elle est néanmoins dévoilée alors que la chancelièr­e Angela Merkel n’a pas encore finalisé son nouveau gouverneme­nt, ce qui en limite la portée. Parmi les trois ministres signataire­s de la lettre, seule celle de l’Environnem­ent, la social-démocrate Barbara Hendricks, devrait être reconduite dans ses fonctions. Le gouverneme­nt envisage aussi de «fixer des règles contraigna­ntes» aux bus et aux taxis pour qu’ils respectent des seuils de pollution. Si le projet se concrétise, «au plus tard à la fin de l’année», Bonn, Essen, Herrenberg, Reutlingen et Mannheim devraient donc proposer aux usagers de voyager gratuiteme­nt à bord des bus, trams et autres transports en commun utilisés par des centaines de milliers de personnes chaque jour. Une mesure qui, si elle est mise en place, devrait ravir les utilisateu­rs qui déboursent dans certaines villes comme Berlin 2,80 euros ou Munich 2,90 euros pour un ticket à l’unité.

En Allemagne, pays où la voiture est reine, le nombre d’usagers des transports en commun connaît une croissance sans interrupti­on depuis vingt ans. L’an dernier, la Fédération allemande des entreprise­s de transports a ainsi enregistré 10,3 milliards de déplacemen­ts. Mais, d’ores et déjà, le projet inquiète les communes qui risquent de devoir gérer un flot soudain et considérab­le de nouveaux voyageurs. Elles s’interrogen­t en outre sur l’épineuse question du financemen­t: «Le gouverneme­nt fédéral doit dire comment il veut financer cela», a prévenu Michael Ebling, président d’une fédération de régies communales (VKU). La part de financemen­t de l’Etat fédéral pour appliquer la gratuité des transports et acquérir de nouveaux véhicules, tout en embauchant du personnel supplément­aire dans les régies de transport, n’est encore nullement définie. Le maire de Bonn, Ashok Sridharan, avertit aussi qu’il va devoir subitement accroître le parc de bus et de tramways écologique­s dans sa cité. Or, «je ne connais pas de constructe­ur qui puisse livrer en un si court laps de temps les bus électrique­s dont nous aurions besoin», a-t-il averti.

L’ONG Greenpeace réclame de son côté de diminuer les possibilit­és de parking ou d’augmenter les «péages» dans les villes pour limiter la circulatio­n automobile. Avec ce paquet de mesures, Berlin espère convaincre Bruxelles de ne pas saisir la Cour européenne de justice à son encontre, comme il menace de le faire pour neuf pays au total, dont la France. Bruxelles est exaspérée devant l’absence de propositio­ns de ces Etats pour réduire la pollution de l’air dans les villes, en dépit des nombreuses mises en demeure adressées aux pays par le passé. Les neuf pays avaient été sommés fin janvier de s’expliquer alors qu’ils dépassent régulièrem­ent les limites d’émissions destinées à protéger la santé des Européens pour deux polluants clés: les particules fines (PM10) et le dioxyde d’azote (NO2). Les dernières propositio­ns de Berlin intervienn­ent aussi à un moment où les autorités sont sous pression au sujet du diesel, avec le risque de voir certaines villes interdire les véhicules roulant au gazole pour réduire les émissions polluantes. Un jugement clé dans ce domaine est prochainem­ent attendu en Allemagne. Les tentatives ponctuelle­s d’instaurer la gratuité des transports en commun se sont avérées jusqu’ici plutôt infructueu­ses. Aux Etats-Unis, la grande métropole de Seattle a ainsi abandonné une telle mesure.

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Le nombre d’usagers des transports en commun connaît une croissance sans interrupti­on en Allemagne depuis vingt ans.

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