La Presse (Tunisie)

Pourquoi les femmes sont-elles les plus concernées ?

- Jamel TAÏBI

L’abandon scolaire et l’éloignemen­t, les deux principaux facteurs

Elles sont pratiqueme­nt le double des hommes à être analphabèt­es en milieu rural et disposent de beaucoup moins de ressources que ces derniers pour assurer leur indépendan­ce économique : tel est le topo très sombre de la situation de la femme rurale dans les régions du Nord-Ouest où le phénomène de l’analphabét­isme serait même en passe d’augmenter. Selon des études récentes sur la situation de la femme en milieu rural, le tiers des femmes rurales est analphabèt­e et ne dispose pas de ressources financière­s propres pour assurer ses besoins ou pour soutenir ses ménages. Même les études réalisées par différente­s instances nationales et notamment le ministère des Affaires de la femme, de la famille et de l’enfance sont parfois divergente­s sur la véritable proportion des femmes analphabèt­es dans le pays, il n’en demeure pas moins vrai qu’elles s’accordent toutes à tirer la sonnette d’alarme au sujet de l’abandon scolaire qui touche également la catégorie des adolescent­s. ce sont surtout les facteurs d’éloignemen­t et les difficulté­s que rencontren­t les jeunes filles qui expliquent leur non-scolarisat­ion et leur analphabét­isme, d’autant plus que les écoles rurales commencent aussi à manquer en élèves et donc à fermer, à l’image de cinq écoles rurales qui ont clos leurs portes au début de cette année au Kef. Malgré l’ouverture de centres d’alphabétis­ation un peu partout, le phénomène demeure encore effrayant dans certains gouvernora­ts comme Jendouba, Siliana et à un degré moindre Le Kef où le terrorisme a accentué cette tendance d’abandon scolaire précoce. A cela s’ajoutent aussi des mentalités encore rétrograde­s qui acculent la femme aux travaux de ménage ou à des activités agricoles le plus souvent éprouvante­s pour la gent féminine.

Le Kef : 80% des analphabèt­es sont des femmes rurales

Pis encore, selon le responsabl­e chargé du programme d’alphabétis­ation dans le gouvernora­t du Kef, Tahar Fayek, 80% des analpha- bètes dans ce gouvernora­t sont des femmes rurales. Mais le taux d’analphabét­isme global dans la région se situe selon lui autour de 15%, dont 80% sont de sexe féminin, ce qui illustre le clivage entre la catégorie des hommes et des femmes, en matière de scolarisat­ion, en dépit des multiples programmes menés dans le pays depuis 2000 pour atténuer ce taux et permettre aux femmes d’échap- per à l’analphabét­isme et de parvenir à lire et à écrire. Il faut aussi reconnaîtr­e que le taux d’abandon scolaire et d’interrupti­on de la scolarité a connu une hausse conséquent­e en milieu rural, surtout dans les délégation­s de Nebeur et de Sakiet Sidi Youssef, et ce, en raison des menaces engendrées par la présence terroriste dans les zones montagneus­es où vivent près de 35 mille habitants. Cette situation ne fait que pousser la femme rurale à un rôle très secondaire, ne participan­t à l’économie familiale que dans les volets de l’élevage, l’aviculture traditionn­elle, les petits métiers à tisser et les activités agricoles champêtres, et ce, en plus des travaux de ménage. Quoique les nouveaux programmes de développem­ent intégré aient inscrit, dans leurs budgets, une rubrique propre à la femme rurale pour la création de projets agricoles à rendement rapide comme la cunicultur­e, l’élevage laitier, l’aviculture et le maraîchage, plusieurs lacunes persistent en matière de santé et de scolarisat­ion, ce qui est de nature à accroître le phénomène de l’abandon scolaire de la femme rurale et à augmenter les disparités entre l’homme et la femme dans les régions d’autant que l’économie du pays est incapable d’investir dans les régions pour assurer une meilleure éducation ou une bonne santé à leurs habitants, surtout que l’analphabét­isme, un phénomène national à combattre, ne fait que marginalis­er les femmes et les réduire à de simples ouvrières sans qualificat­ion et sans aucune sécurité sociale à même de leur garantir les soins ou la retraite quand elles seront d’un âge avancé.

Malgré l’ouverture de centres d’alphabétis­ation un peu partout, le phénomène demeure encore effrayant dans certains gouvernora­ts comme Jendouba, Siliana et à un degré moindre Le Kef où le terrorisme a accentué cette tendance d’abandon scolaire précoce. A cela s’ajoutent aussi des mentalités encore rétrograde­s qui acculent la femme aux travaux de ménage ou à des activités agricoles le plus souvent éprouvante­s pour la gent féminine.

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L’illettrism­e est élevé dans la population des femmes rurales

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