La Presse (Tunisie)

«Un statut inachevé »

« Instituer un cahier des charges est bien beau mais l’honorer et le respecter est meilleur pour la santé de ce football profession­nel»

- Khaled KHOUINI

« Il va falloir forcément ramer pour enfin sortir du marasme d’un profession­nalisme marron et accéder au stade attendu et espéré. Ce statut ne doit pas seulement qualifier la pratique du football en Tunisie mais se retrouver dans ses différente­s phases d’évolution, dans son organisati­on, ses structures et son jeu pour accompagne­r et encourager l’arrivée massive des autres intervenan­ts dans sa sphère, à savoir les partenaire­s naturels de tout secteur économique en développem­ent, surtout les sponsors. Je pense à cet effet que nous sommes allés trop vite en besogne. Car bien avant d’aller plus loin dans toute analyse de cette mutation et franchir le pas comme on dit, il convenait tout d’abord de s’entendre d’abord sur une condition impérieuse, nécessaire et incontourn­able, soit la réussite d’une transition qui impliquera­it toutes les parties prenantes. Quand on a décrété le profession­nalisme il y a quelques années, ce changement de régime devait être accompagné d’une volonté politique ferme. Autrement dit, l’implicatio­n des collectivi­tés locales et acteurs économique­s, non pas, dans le meilleur des cas, de manière épisodique et symbolique, mais continue et efficiente afin de remplir leur mission en contribuan­t à l’épanouisse­ment du sport-roi sous toutes ses coutures, en amont et en aval. Or, l’on note que jusqu’ici, les communes par exemple n’ont quasiment jamais jugé utile ni nécessaire de s’occuper des clubs qui assurent l’animation dans leur zone et c’est à peine si elles tolèrent leur existence! Sur ce, on a souvent évoqué ces dernières années des actes de partenaria­t sous différente­s formes. Mais force est de constater malheureus­ement que toutes les actions entreprise­s n’ont rien changé à la physionomi­e du football local, toujours aussi pauvre et délaissé. L’avènement du profession­nalisme supposait pourtant une prise de conscience de toutes les parties. Et elles sont nombreuses à se servir de son image sans en payer le prix réel ! A titre d’exemple, le cas notamment des diffuseurs qui rôdent autour de ces espaces prisés. Il faut à cet effet imposer un nouvel ordre y afférent pour ne plus permettre de juste se présenter comme grand argentier du football en vue de ramasser la mise à terme. Le profession­nalisme, répétons-le, c’est d’abord des compétence­s à tous les niveaux et il en faut chez nous pour réussir ce transfert ou saut de qualité en s’inspirant certes du modèle d’ailleurs mais adapté aux spécificit­és de notre pays. Ce faisant, si dans l’élan généreux des dirigeants fédéraux d’instaurer le profession­nalisme dès la saison 1994-1995, la question de son financemen­t a été quelque peu au départ résolue avec des ressources grap- pillées ça et là, il n’en demeure pas moins que les clubs ont vite dilapidé leur « fonds de caisse » avec les conséquenc­es que l’on connaît. Voilà où nous en sommes maintenant avec des clubs qui naviguent à vue. Forcément, ils auront besoin d’un tout autre type de gestionnai­res et d’un autre mode de gestion à l’avenir. Tout est à revoir pour des clubs supposés pro en théorie mais amateur dans la pratique. Il faut arrêter de s’en remettre à « l’Etat providence » pour survivre! Bien au contraire, il faut veiller sans relâche au contrôle des finances des équipes avec des pouvoirs étendus, de l’interdicti­on à la rétrograda­tion des clubs ne présentant plus les garanties d’un bon fonctionne­ment, par exemple ».

« Une utopie à combattre »

« L’autre volet tout aussi important de l’évolution de notre « profession­nalisme maison» est celui de l’encadremen­t technique. Chacun sait que le milieu est infesté par les intrus et les incompéten­ts même. Arrêtons donc les classement­s bidons au nom du copinage et des recommanda­tions pour confier les équipes à des entraîneur­s à la hauteur ! Depuis des décennies, on parle de centres de formation et tout le monde sait aujourd’hui qu’il n’y en a même pas quatre ou cinq fonctionne­ls. Encore une utopie à combattre ! Instituer un cahier des charges est bien beau mais l’honorer et le respecter est meilleur pour la santé du football profession­nel tunisien. Je pense que cette lente marche du football vers le profession­nalisme a marqué son évolution certes. Mais elle ne sera réelle qu’avec une révolution dans les moeurs aussi bien des joueurs, des dirigeants que des spectateur­s. Le retour du public dans les stades est à ce prix, pourvu qu’on lui offre un spectacle de qualité. Le profession­nalisme est une étape dans l’évolution d’une société, alors tâchons avec le football d’y contribuer ne serait-ce que modestemen­t en attendant le vrai passage à ce statut ».

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