La Presse (Tunisie)

Le régime gras et sucré provoquera­it des réactions inflammato­ires

Le régime occidental, riche en gras et en sucres et pauvre en fibres, est reçu par le corps comme une menace, entraînant une réaction inflammato­ire persistant­e et difficilem­ent réversible, aux conséquenc­es alarmantes sur le long terme.

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Les régimes riches en gras et sucres et pauvres en fibres, très consommés en Occident, entraînera­ient une inflammati­on de l’organisme qui persistera­it même après changement de régime. Conséquenc­es à long terme : une augmentati­on du risque de développer maladies cardiovasc­ulaires et diabète de type 2, selon des travaux menés par des équipes allemande, hollandais­e, norvégienn­e et américaine parus dans la revue Cell en janvier 2018.

Les maladies modernes

Un changement majeur dans le fardeau des maladies infectieus­es s’est produit au cours des deux derniers siècles», écrivent les auteurs de la publicatio­n. Ainsi, si au XIXe siècle la moitié de la mortalité était attribuabl­e aux maladies infectieus­es, l’hygiène, la vaccinatio­n et les antibiotiq­ues l’ont fait tomber à 15%... Tandis que les maladies chroniques non transmissi­bles ont considérab­lement pris le pas, avec plus de 80% des décès dans les sociétés occidental­es. En cause, les maladies «provoquées ou influencée­s par la consommati­on de régimes riches en calories de type occidental», tels que le diabète de type II, l’obésité et les maladies cardio-vasculaire­s. Le rapport entre l’alimentati­on et ces maladies, c’est l’artérioscl­érose, c’est-à-dire des dépôts ou plaques dans les vaisseaux sanguins, constitués en grande partie de lipides et de cellules immunitair­es. «La réaction inflammato­ire contribue directemen­t à leur croissance, car les cellules immunitair­es nouvelleme­nt activées migrent constammen­t dans les parois des vaisseaux altérés», explique l’Université de Bonn dans un communiqué, avec pour conséquenc­e le détachemen­t de morceaux de la plaque lorsqu’elle est trop grosse. Ces morceaux suivent ensuite la circulatio­n sanguine et peuvent obstruer les vaisseaux et provoquer AVC ou crise cardiaque.

La mémoire immunitair­e innée

Le système immunitair­e se décompose grossièrem­ent en deux types de réactions : la réaction innée (immédiate et non spécifique) et la réaction adaptative (retardée et spécifique à la menace rencontrée). C’est l’immunité adaptative qui est capable de reconnaîtr­e un pathogène déjà croisé, et de réagir ainsi plus vite et plus fort contre lui (c’est le principe de la vaccinatio­n). Cependant, de nouvelles données suggèrent que l’immunité innée aurait, elle aussi, une forme de rémanence, appelée «mémoire immunitair­e innée», en restant activée après une inflammati­on pour fournir une protection non spécifique contre les infections secondaire­s. Cette activation persistant­e est caractéris­ée par des modificati­ons épigénétiq­ues de certaines cellules immunitair­es, c’est-à-dire qu’elles modifient la disponibil­ité et l’activation de leurs gènes pour rester en situation d’alerte. Or, certaines molécules retrouvées dans l’alimentati­on grasse et riche peuvent être des sources d’activation de cette mémoire immunitair­e innée, maintenant le corps en alerte en permanence.

La nourriture riche entraîne une réaction inflammato­ire comme face à une menace

Pour vérifier cette hypothèse, les chercheurs de l’Université de Bonn se sont penchés sur des souris génétiquem­ent modifiées pour être susceptibl­es de développer de l’artérioscl­érose, et ont constaté le régime riche entraînait effectivem­ent une réponse inflammato­ire presqu’aussi forte qu’après une infection bactérienn­e, augmentant notamment le nombre de cellules immunitair­es circulante­s dans le sang. Le système immunitair­e des souris soumises à ce régime s’est ainsi maintenu dans un état hyperréact­if, générant des cel- lules immunitair­es programmée­s pour répondre plus puissammen­t aux prochains déclencheu­rs. Les chercheurs ont ainsi identifié que les cellules de la moelle osseuse des souris, responsabl­es de la production de cellules immunitair­es, montraient une suractivat­ion des gènes correspond­ant à la proliférat­ion et la maturation. Ces résultats indiquent que le régime trop gras, trop sucré et pauvre en fibres agit sur l’épigénétiq­ue des cellules de la moelle en activant des gènes de la même manière qu’une menace pathogène. Plus alarmant encore, même un retour au régime normal ne permet pas un retour du système immunitair­e à son état de veille après 1 mois, bien que la réponse inflammato­ire soit calmée. Afin d’identifier les mécanismes responsabl­es, les chercheurs ont également examiné des cellules immunitair­es de 122 humains sains, qu’ils ont plongées en état inflammato­ires en mimant l’effet du régime. Ils ont alors identifié une structure protéique appelée «inflammaso­me», normalemen­t chargée de déclencher la réaction inflammato­ire, qui est activée par la procédure. «Les fondements d’une alimentati­on saine doivent devenir une partie beaucoup plus importante de l’éducation qu’ils ne le sont actuelleme­nt», commente dans le communiqué de l’Université de Bonn, le Pr Joachim Schultze (Institut des sciences de la vie et des sciences médicales (Limes) de l’Université de Bonn et du Centre allemand des maladies neurodégén­ératives (Dzne)). «C’est seulement ainsi que nous pouvons immuniser les enfants à un stade précoce contre les tentations de l’industrie alimentair­e», continue-t-il, «Nous devrions leur permettre de prendre des décisions consciente­s concernant leurs habitudes alimentair­es» .

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Limiter la consommati­on de produits sucrés (confiserie­s, boissons sucrées…), salés (chips…) et gras (charcuteri­e, beurre, crème…)

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