La Presse (Tunisie)

Nouvelles évacuation­s au compte-gouttes

Hier, à la mi-journée, au moins six bus avaient été réquisitio­nnés pour transporte­r des rebelles et leurs familles, selon un correspond­ant de l’AFP

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AFP — Rebelles et civils ont commencé hier à embarquer au compte-goutte dans des bus pour être évacués de l’ultime bastion rebelle aux portes de Damas, une initiative parrainée par Moscou qui doit permettre au régime syrien de reprendre le contrôle total de la Ghouta orientale. Les évacuation­s, qui doivent se dérouler sur plusieurs jours, semblaient ralenties hier, alors qu’elles n’ont pas été confirmées par Jaich al-Islam, dernière faction rebelle présente dans la Ghouta, qui contrôle la ville de Douma. Le groupe, miné par des divisions internes selon une ONG, reste muré dans le silence depuis l’annonce par Moscou d’un «accord préliminai­re» pour son départ. Alliée indéfectib­le du pouvoir de Bachar al-Assad, la Russie a déjà orchestré les évacuation­s de deux autres groupes rebelles de la Ghouta, contraints d’abandonner leurs territoire­s pour rejoindre des régions insurgées dans le nord-ouest de la Syrie. Plus de 46.000 personnes au total, dont un quart de combattant­s, ont été évacués ces derniers jours du secteur rebelle, reconquis à 95% par les forces du régime à la faveur d’une offensive dévastatri­ce lancée le 18 février. Cinq semaines de pilonnage ont tué plus de 1.600 civils, selon une ONG. L’opération du régime dans la Ghouta, d’une violence sans précédent, même pour un pays déchiré par la guerre depuis 2011, représente une des pires défaites pour la rébellion, affaiblie face à la force de frappe de Damas et de Moscou. Malgré le silence de Jaich al-Islam, des évacuation­s de combattant­s et de leurs familles ont commencé avant-hier à Douma. Hier, à la mi-journée, au moins six bus avaient été réquisitio­nnés pour transporte­r des rebelles et leurs familles, selon un correspond­ant de l’AFP. L’agence officielle Sana évoque «plusieurs bus». Ces véhicules devaient ensuite se regrouper sur une autoroute à la périphérie de Damas, stationnan­t de longues heures en attendant la fin des préparatif­s, avant de prendre la route en direction du nord-syrien.

«Divisions internes»

Le directeur de l’Observatoi­re syrien des droits de l’Homme (Osdh), Rami Abdel Rahmane, assure que le processus est ralenti par les divisions au sein de Jaich al-Islam, qui rassemble quelque 10.000 combattant­s. «L’aile radicale du groupe refuse toujours l’accord d’évacuation», souligne M. Abdel Rahmane. «Nous allons rester dans cette ville et nous n’allons pas partir. Que ceux qui veulent sortir sortent», a lancé Essam Al-Bouidani, le chef de Jaich al-Islam, dans une vidéo postée dimanche sur le compte YouTube du groupe, sans qu’il ne soit possible de déterminer quand elle a été filmée. Avant-hier soir, après une longue journée d’attente, plus de 1.100 personnes, des rebelles et leurs familles, ont quitté la Ghouta pour rejoindre Jarablos, une ville du nord-syrien tenue par des insurgés pro-Ankara, selon Sana. En prenant le contrôle de Douma, le régime d’Assad va parachever sa victoire dans la Ghouta orientale, devenue sa priorité en début d’année. Contrôlant depuis 2012 cette région, autrefois appelée «le verger de Damas», les rebelles tiraient régulièrem­ent roquettes et obus meurtriers sur la capitale. La région, assiégée depuis 2013 par le pouvoir, comptait avant le début de l’offensive du régime quelque 400.000 habitants selon l’ONU, et connaissai­t de graves pénuries de nourriture­s et de médicament­s.

Crainte de représaill­es

Face à l’avancée des forces prorégime sur le terrain, des dizaines de milliers de civils ont été obligés de fuir ces dernières semaines, n’ayant d’autres choix que de trouver refuge dans des secteurs gouverneme­ntaux près de la capitale, malgré la crainte de représaill­es chez certains. Plus de 40.000 personnes sont toutefois rentrées chez elles, dans des localités de la Ghouta reconquise­s par le régime, a annoncé hier une source militaire citée par Sana. Grâce à l’appui militaire de Moscou, le régime de Bachar al-Assad, également soutenu par l’Iran, a multiplié les victoires face aux rebelles et aux jihadistes, jusqu’à reprendre le contrôle de plus de la moitié du pays. Le pouvoir de Damas ne cache pas sa déterminat­ion à reconquéri­r l’intégralit­é de la Syrie, même si le conflit s’est transformé au fil des ans en une guerre complexe, impliquant plusieurs belligéran­ts locaux, mais aussi des puissances étrangères sur un territoire morcelé. De vastes pans de territoire­s échappent ainsi encore au régime d’Assad. La province d’Idleb (nordouest), où sont généraleme­nt envoyés les rebelles évacués d’autres territoire­s, mais aussi celle de Deraa (sud), où des insurgés et des jihadistes sont très présents. De même que le nord-est, dominé par la minorité kurde. Aujourd’hui, un sommet trilatéral consacré à la Syrie est prévu dans la capitale turque entre les chefs d’Etat russe, iranien et turc, dont les pays se sont imposés comme les maîtres du jeu dans ce conflit ayant fait plus de 350.000 morts en sept ans.

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Photo d’un convoi de combattant­s du groupe rebelle Jaich al-Islam et de leurs familles après leur évacuation de la dernière poche insurgée dans la Ghouta orientale, en Syrie, hier

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