«Se donner à fond dans une mission, c’est aussi être toujours présent»
Diplômée d’un DEA en arts plastiques, recherches fondamentales et appliquées à La Sorbonne Paris, assistante à l’Institut supérieur des Beaux-Arts de Sousse et doctorante en théories de l’art à l’Institut supérieur des Beaux-Arts de Tunis, Nesrine Elamine
Diplômée d’un DEA en arts plastiques, recherches fondamentales et appliquées à La Sorbonne Paris, assistante à l’Institut supérieur des beauxarts de Sousse et doctorante en théories de l’art à l’Institut supérieur des beaux-arts de Tunis, Nesrine Elamine est une artiste plasticienne qui enchaînait les expositions en Tunisie et à l’étranger depuis 2005. Sa sculpture en marbre «Relationship» a été retenue en 2016 pour être agrandie et surtout exposée dans l’un des plus grands parcs de Chine, le «China arab friendship sculpture Park». Elle est la commissaire de l’exposition collective qui faisait suite à un colloque et qui est actuellement visible au Palais Kheïreddine à Tunis dans le cadre du forum d’art contemporain «Point-virgule». Entretien…
Comment est venue cette idée du projet « Point-virgule » et quel est son objectif ?
L’idée de ce forum est une initiative de l’association Rakch pour l’art, la culture et le design dont le président est Khaled Abida, docteur en sciences et techniques des arts et artiste visuel. L’objectif de son association dont je suis membre (communication médiatique et sponsoring) est la décentralisation de l’art et de la culture en Tunisie. Khaled m’a aidée au transport des oeuvres en dehors de la capitale ; ce fut l’objectif de l’association : permettre de regrouper le maximum de jeunes de Gabès, Nabeul, Sfax, pour se rencontrer avec les artistes de la capitale et pourquoi pas échanger entre eux. Cela ne peut qu’enrichir la scène artistique tunisienne.
Peut-on considérer « Point-virgule » comme étant un Salon des arts plastiques ?
Il s’agit d’un Forum national qui a pris deux formes d’événement : le colloque national sur « L’art aujourd’hui en Tunisie : réalité, enjeux et prospections de la nouvelle génération ». Les intervenants sont des chercheurs universitaires, artistes, critiques et commissaires, des galeristes, et une exposition de groupe qui réunit 73 artistes et plus de 150 oeuvres. J’écris des articles dont deux ont été sélectionnés pour publication aux Etats-Unis et en Italie et dont les thèmes se rapportent à l’art et à la culture. Ceci me facilite la rédaction d’une biographie des artistes et de porter un regard poétique ou critique qui rend légitime le choix d’une oeuvre et plus crédible au niveau esthétique ou historique. Le catalogue de cette exposition sera prêt en mars 2019 avec les actes du colloque.
L’exposition, qui a eu lieu au Palais Kheïreddine a réuni 73 artistes et plus de 150 oeuvres. Quelles étaient les critères de cette sélection ?
Je suis la commissaire de cette exposition et la thématique « Pointvirgule » était la base de ma sélection des oeuvres qui m’ont été proposées par les artistes participants. J’ai choisi les artistes d’abord pour la sensibilité que j’avais pour leurs oeuvres, la majorité sont des jeunes que je connais personnellement, donc je connais la sincérité de leur pratique. Je pense que c’est important qu’un commissaire dispose de cette «vision de la chose ». Pour les artistes qui m’ont été proposés par Khaled, qui a enseigné à Siliana et connut pas mal d’artistes de l’intérieur de la Tunisie, vu son poste de président de l’association, j’ai été très sélective, vu que je ne les connaissais pas auparavant. Ma sélection était à double objectif : retenir les oeuvres qui me touchaient personnellement (je suis artiste visuelle, docteur en théories de l’art et j’enseigne la lecture de l’art et la critique à l’université) et les oeuvres qui vont prouver que vivre et être artiste en dehors de la capitale et ses galeries ne nie pas qu’on puisse avoir une grande réflexion sur notre pratique. Il y a quelque chose de commun qui réunit les artistes tunisiens que j’ai essayé de réunir dans cette exposition. Ce n’était pas facile, mais je pense que j’ai réussi.
Dans cette sélection, on remarque qu’outre les artistes confirmés et de renommée nationale et internationale figurant dans cette exposition, vous avez également privilégié de jeunes débutants et artistes plasticiens qui ne sont pas forcément connus. Pourquoi ?
Il est très important qu’un commissaire d’exposition connaisse les artistes de renommée et qui sont connus des grandes galeries
nationales et internationales, mais ce qui fait la différence , c’est qu’il éprouve l’intérêt aussi à de jeunes Tunisiens qui ne sont pas forcé-
ment « de grands noms » mais qui commencent à exceller sur la scène artistique par une démarche et une problématique claires et dont la pratique est engagée et confirmée. Ceci est une stratégie noble pour la promotion de l’art. Après avoir suivi une bonne formation en études d’art, l’encadrement de projets artistiques de fin d’études et vu l’opportunité que j’avais pendant mes voyages de visiter des expositions dans plusieurs pays occidentaux, il m’est facile de détecter cet aspect de talent prometteur
chez un jeune artiste. Mes activités en dehors de l’enseignement comme les participations à des tables rondes (sur l’état de l’art
et de la culture), aux colloques et aux conférences internationales, la collaboration dans des événements ou projets culturels et artistiques représentent des atouts pour la facilité de la communication et d’intégration. Dans cette perspective, ceci me permet de connaître de plus près les problématiques et les enjeux de la pratique artistique en Tunisie et dans le monde arabe et occidental. Tout au long de ma carrière, j’ai appris que la disponibilité fait partie du professionnalisme. Se donner à fond dans une mission, c’est aussi être toujours présent. Présenter les artistes, leurs oeuvres, les contextes socio-culturels de l’évolution de leur travail et de leur création est essentiel dans plusieurs occasions : expositions, vernissages, rencontres avec des personnalités haut placées de la société, médias. Tout cela peut assurer le succès de l’événement.
Que pourriez-vous dire à propos de cette expérience ?
Avoir l’opportunité de gérer une exposition est une grande chance de mettre en oeuvre tout ce que j’ai pu apprendre tout au long de ma carrière. Cette opportunité représente pour moi une grande faveur et une belle expérience des plus importantes de ma vie professionnelle et qui peut m’ouvrir des horizons. Pour cette raison, je considère cette mission la mienne, à l’image de la Tunisie, des artistes que j’ai choisis mais aussi à mon image et donc elle doit être prestigieuse et parfaite.