La Presse (Tunisie)

Ramadan : quid de la culture ?

- Par Khaled TÉBOURBI

C’EST coutume, chez nous, que le mois saint mobilise des arts et des artistes. Multiplie et diversifie ses manifestat­ions. A l’époque ancienne, les soirées ramadanesq­ues se limitaient aux seuls « genres de circonstan­ce », les genres « jadd »(les sacrés) : prédicatio­n, psalmodie, éloges et invocation­s, noubas mystiques et autres « hadhras ». Mais les loisirs « profanes » se sont largement rattrapés depuis. Début du XXe, déjà, avec les théâtres et les cafés chantants. Puis, dès les années 40-50, et de l’indépendan­ce à nos jours, en hausse continue, avec les galas populaires, les concerts urbains, la radio et la télévision. Avec, enfin, l’avènement de festivals saisonnier­s, celui de la Médina de Tunis, précurseur et chef de file, ses« homologues », ensuite, répartis à travers tout le pays. Ce passage du sacré au profane, du« jadd » au « loisir » suscita, bien sûr, des questionne­ments. Dont d’ordre moral, voire religieux. On s’inquiétait, alors, de « déficit spirituel », de «foi à la dérive », de « moeurs en régression ».Les temps s’y prêtaient.

La crainte pour les arts eux-mêmes, pour la culture en général, s’exprime davantage aujourd’hui.

On plaint deux choses, surtout : d’abord, l’amenuiseme­nt des fonds. Au central, comme au local. Au public, comme au privé. Le festival de la Médina, rappelons bien, avait des moyens et du rayonnemen­t à ses débuts, et jusqu’au seuil des années 2000. Beaucoup d’artistes lui doivent, en plus, d’être connus et confirmés. De nos jours, il vit une « récession ». Ses « homologues », de même. Conséquenc­e : une programmat­ion révisée à la baisse et un contenu artistique qui s’effiloche, qui s’appauvrit. Le festival de la Médina de Tunis incarnait à lui seul un projet, années 80-90. Là, il joint, à peine, les deux bouts. La seconde, ensuite, la« pire », peutêtre : la nouvelle télévision. La ramadanesq­ue en particulie­r : commerçant­e, abrutissan­te, bourrée de pubs alimentair­es, d’humours fats et plats, de mauvais feuilleton­s.

La culture au mois de Ramadan ? Spirituell­e, de moins en moins. Profane, de plus en plus, et en manque d’argent. «Sapée » en tout état de cause par une télé « à rebours » : une vraie dévoreuse de QI !

La culture au mois de Ramadan ? Spirituell­e, de moins en moins. Profane, de plus en plus, et en manque d’argent. « Sapée » en tout état de cause par une télé « à rebours » : une vraie dévoreuse de QI !

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