La Presse (Tunisie)

Premier scrutin post-Mugabe

Un éventuel second tour de la présidenti­elle a été programmé le 8 septembre. Il se tiendra si aucun candidat ne parvient à obtenir la majorité absolue dès le premier tour

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AFP — Les premières élections présidenti­elle et législativ­es de l’aprèsRober­t Mugabe auront lieu le 30 juillet au Zimbabwe, avec pour grand favori son successeur et ancien proche collaborat­eur Emmerson Mnangagwa. M. Mnangagwa «a déterminé que le lundi 30 juillet 2018 serait le jour de l’élection du président, de l’élection des membres de l’Assemblée nationale et de l’élection des conseiller­s municipaux», a annoncé le Journal officiel hier. Un éventuel second tour de la présidenti­elle a été programmé le 8 septembre. Il se tiendra si aucun candidat ne parvient à obtenir la majorité absolue dès le premier tour. Ancien vice-président du pays tombé en disgrâce, Emmerson Mnangagwa, 75 ans, a succédé en novembre dernier à Robert Mugabe, 94 ans aujourd’hui, contraint à la démission par un coup de force de l’armée et de son parti après avoir régné sans partage sur le pays depuis son indépendan­ce en 1980. Sitôt le «camarade Bob» et son ambitieuse épouse Grace poussés vers la sortie, leur parti, la Zanu-PF, a investi M. Mnangagwa pour porter ses couleurs à la présidenti­elle. Sauf énorme surprise, il devrait l’emporter, et probableme­nt dès le premier tour, face à une opposition orpheline de son chef historique Morgan Tsvangirai, décédé en février. «Nous avons une énorme tâche devant nous. Celle de mobiliser la population et de faire campagne», a lancé M. Mnangagwa hier devant les cadres de la Zanu-PF. «Quels que soient nos problèmes, nous devons désormais nous concentrer sur les prochaines élections», a-t-il ajouté. Son principal rival sera le nouveau patron du Mouvement pour le changement démocratiq­ue (MDC), Nelson Chamisa, dont la formation est affaiblie par de profondes rivalités depuis la mort de Morgan Tsvangirai.

«Prêts au combat»

«Nous sommes prêts au combat, nous savons que nous allons gagner», a déclaré à l’AFP le porteparol­e du parti, Douglas Mwonzora, en insistant sur la nécessité d’une surveillan­ce indépendan­te de la régularité du scrutin. L’opposition, qui compte rallier les électeurs qui ont quitté le régime autoritair­e pour l’étranger, a subi un revers lundi, la Cour constituti­onnelle ayant décidé que les nonrésiden­ts ne pourraient voter qu’en se déplaçant au Zimbabwe. Plusieurs autres candidats, représenta­nts de petits partis, ont aussi prévu de briguer la fonction suprême. Ces élections constituen­t un test pour le nouvel homme fort du pays, qui s’est engagé à relancer son économie engluée dans une profonde crise depuis une dizaine d’années. Mais six mois après son accession au pouvoir, le pays se débat toujours avec un taux de chômage exorbitant (proche de 90%) et souffre d’une grave pénurie de liquidités. Les Zimbabwéen­s doivent toujours faire la queue des heures devant les banques pour obtenir quelques dizaines de dollars. Le nouveau président s’est engagé à organiser des scrutins justes et transparen­ts, alors que le processus électoral pendant l’ère Mugabe avait été entaché de violences et de fraude. En 2008, Morgan Tsvangirai, arrivé en tête du premier tour de la présidenti­elle face à Robert Mugabe, s’était retiré de la course en raison du déchaîneme­nt de violences contre ses partisans.

Observateu­rs

Pour preuve de son engagement, le nouveau régime, qui tente de renouer avec l’Occident après des années de mise à l’écart, a invité notamment l’Union européenne (UE) et le Commonweal­th à observer les élections de 2018. L’UE a répondu par l’affirmativ­e et y enverra, pour la première fois en seize ans, des observateu­rs. Le Commonweal­th fera de même. En 2002, le chef de la mission d’observatio­n de l’UE avait été expulsé. Dans la foulée, Bruxelles avait adopté des sanctions contre Robert Mugabe et nombre de ses proches, accusant le régime d’atteinte aux droits humains. Les Nations unies se sont aussi récemment engagées à aider à la préparatio­n des élections. Une organisati­on sans accroc des élections pourrait permettre au Zimbabwe de regagner la confiance des investisse­urs et de la communauté internatio­nale, alors que le pays est aux abois économique­ment et financière­ment. Mais les critiques d’Emmerson Mnangagwa doutent de la volonté du président de faire entrer le pays dans une nouvelle ère, rappelant qu’il avait été l’un des exécuteurs de la répression ordonnée par Robert Mugabe. Un total de 5,4 millions d’électeurs sont inscrits sur les listes électorale­s, où les inscriptio­ns ont été récemment clôturées. Pour la première fois, le Zimbabwe a eu recours à l’inscriptio­n biométriqu­e, avec enregistre­ment des empreintes digitales et reconnaiss­ance faciale.

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