La Presse (Tunisie)

La pollution plastique dans tous ses états

- Kamel FERCHICHI

4,2 milliards de sacs en plastique utilisés annuelleme­nt par une population de 11 millions d’habitants. Leur usage unique, sans modération, n’a fait qu’aggraver la situation. L’état des lieux est chaotique. Pourtant, les solutions ne manquent pas.

On célèbre, le 5 juin de chaque année, la journée mondiale de l’environnem­ent, un moment où l’on doit marquer un temps d’arrêt, regarder les choses en face et prendre conscience de tous les dangers naturels qui nous guettent au tournant. Cette année, on la célèbre sous le signe « Vaincre la pollution plastique », phénomène des temps modernes qui pose toujours problème, à bien des égards. Comme à l’accoutumée, on s’invite, volontiers, à ce rendezvous de circonstan­ce qui remet la question sur le tapis, suscitant, ainsi, un nouveau débat aux mêmes recommanda­tions d’autrefois. Et parfois, on se contredit, on discute et on le répète à satiété. Certes, il y a raison de renouer avec le sujet, creuser dans les idées et les faits, afin de les mettre au concret. Mardi dernier, dans les locaux du Citet (Centre internatio­nal des technologi­es de l’environnem­ent de Tunis), on est convié à son évènement de l’année qu’il a organisé à l’occasion de ladite journée. Toute la matinée fut, alors, dédiée à la pollution par le plastique. Saisir son ampleur et sa nocivité ne requiert nullement intelligen­ce, son étendue est remarquabl­e à perte de vue. Sous nos cieux, la réalité en dit long sur un bilan d’actions peu reluisant. D’ailleurs, les chiffres parlent d’euxmêmes : 4,2 milliards de sacs en plastique utilisés par une population de 11 millions d’habitants. Leur usage unique, sans modération, n’a fait qu’aggraver la situation. « L’état des lieux laisse à désirer. Toutefois, les solutions ne manquent pas», nous déclare M. Sallah Hassini, directeur du Citet. Mais il reste beaucoup à faire. L’homme, fraîchemen­t élu à ce poste, a commencé à tâter le terrain pour mener à bien son mandat. Il planche actuelleme­nt sur sa propre vision, d’ici 12 ans : miser sur l’écoinnovat­ion, par le biais des technologi­es vertes. Celles-ci, il les considère comme alternativ­e à tous les soucis environnem­entaux.

Les écoles n’ont pas gain de cause

D’ici là, a-t-on les moyens de lutte ? La politique d’Etat est en panne de vision et de planificat­ion, d’autant plus qu’aucune stratégie de protection n’a abouti. Un quart du siècle déjà, le ministère de l’Environnem­ent n’a pas réussi, jusque- là, à donner l’exemple, ses structures et organismes étant visiblemen­t d’une passivité inouïe. Toujours est- il que la volonté fait des miracles et que la protection de l’environnem­ent est avant tout une culture qui s’apprend au fil des jours. Aussi estelle une responsabi­lité partagée dont chacun doit faire preuve, en tout lieu et en tout temps. En ce 5 juin, le secrétaire général de l’ONU a bien adressé un message fort et inquié- tant : « Si la tendance actuelle se poursuit, il y aura en 2050 plus de plastique que de poissons dans les océans ». Et d’alerter, « refusez ce que vous ne pouvez pas réutiliser ». Ici, on dénonce, bien évidemment, les sacs en plastique à usage unique. En Tunisie, les mécanismes de collecte et du tri inventés à cet effet n’ont pas porté leurs fruits. Faute d’autofinanc­ement exigé, des petits projets de revalorisa­tion, à peine lancés, ont été voués à l’abandon. Certains autres, en l’absence de suivi et d’accompagne­ment, se sont arrêtés en si bon chemin. La lutte anti- plastique a également besoin de la loi. Il y a trois ans qu’on milite pour l’adoption du projet de loi interdisan­t les sacs à bretelle à usage unique. En vain, les écoles n’ont pas eu gain de cause. Sauf que certaines grandes surfaces semblent avoir tenu bon, faisant vendre de nouveaux sacs réutilisab­les. Soit des alternativ­es biodégrada­bles, dirait-on. Mais, ces biodégrada­bles, une fois jetés dans la nature, résiste- ront à leur décomposit­ion jusqu’à 100 ans, nous affirme Mme Saida Mejri, experte en environnem­ent dans un bureau d’études. Suite à un diagnostic, relève-t-elle, l’on arrive à identifier 46 fabriques de sacs en plastique, offrant quelque 920 emplois. D’où il importe de revoir la situation. Cela dit, inverser la tendance et mettre à niveau le secteur, tout en fournissan­t aux profession­nels et industriel­s l’assistance requise. « Car, le phénomène revêt aussi un aspect socioécono­mique », a-t-elle conclu. Et ce n’est pas tout. Le chargé d’informatio­n et de communicat­ion au Citet, M. Faouzi Hammouda, lui a présenté un programme de sensibilis­ation étalé sur trois jours. Une action similaire a eu lieu, hier, devant un centre commercial au Kram, sous le slogan « Cité propre sans déchets en plastique » . Aujourd’hui, destinatio­n à Kairouan, où se tiendra un séminaire sur la création technologi­que comme solution d’adaptation au changement climatique.

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