La Presse (Tunisie)

Au chômage, la majorité des migrants ne bénéficien­t pas de la prise en charge

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L’Office national de la famille et de la population (Onfp) a organisé, le vendredi 29 juin, un atelier de présentati­on des résultats de l’étude nationale «Cartograph­ie nationale des migrants et des organismes prestatair­es de services de santé en Tunisie». Le but de cette étude vise à identifier le statut socioécono­mique des migrants, principale­ment ceux en situation irrégulièr­e et précaire, et à inciter les organes gouverneme­ntaux et non gouverneme­ntaux à les prendre en charge médicaleme­nt et garantir leur droit à la santé…

La Tunisie est aujourd’hui touchée par le phénomène de la migration. Elle est devenue une terre d’accueil de nombreux migrants (illégaux) dont la santé se voit menacée de jour en jour. «Nous avons constaté que ces dernières années étaient celles de la mobilité pour beaucoup de personnes. Nous avons également remarqué que leur droit à la santé (droit fondamenta­l) est négligé. Surtout face aux différents facteurs économique­s, culturels, linguistiq­ues auxquels ils font face, mais aussi les barrières juridiques qui entravent leur accès à la santé, comme le reste des citoyens tunisiens» , a déclaré la présidente-directrice générale de l’Onfp, Dr Rafla Dallegi. Elle a également rappelé le rôle pionnier du fonds mondial dans son appui continu pour la lutte contre le sida et la tuberculos­e.

Une condition sanitaire précaire pour les migrants

Le Dr Kheireddin­e Khaled a également déclaré : «Nous sommes réunis aujourd’hui afin de rendre compte de la cartograph­ie des migrants d’abord et de leurs conditions vulnérable­s. Mais heureuseme­nt que le fonds mondial a contribué à acheter des médicament­s pour ces migrants, ce qui constitue une nouveauté. C’est un grand apport, mais pas suffisant» . Il a également déclaré que le nombre de migrants séropositi­fs a augmenté depuis quelques années. «C’est un chiffre alarmant et on ne peut pas rester inerte devant cette situation» . La présentati­on de l’étude a tout d’abord révélé les zones géographiq­ues où se trouvent le plus grand nombre de migrants en Tunisie. «Nous avons constaté que plus de la moitié des migrants se trouvent surtout dans le centre ville et les zones côtières. Ils proviennen­t principale­ment d’Algérie, de Libye, d’Afrique subsaharie­nne et du Maroc». L’étude a notamment révélé les principale­s difficulté­s auxquelles font face les migrants, qui peuvent être culturelle­s (difficulté d’expression des attentes, dégradatio­n de la santé mentale et difficulté d’adaptation et d’intégratio­n…), financière­s et administra­tives (peur des arrestatio­ns et du renvoi), éducatives (méconnaiss­ance du danger et des risques de certaines maladies, méconnaiss­ances des droits, difficulté­s linguistiq­ues…). Toutes ces difficulté­s vont déboucher sur une incapacité à s’intégrer.

La révision du système juridique est devenue indispensa­ble

Parlant des conditions cruelles dans lesquelles vivent ces migrants, principale­ment ceux dont la situation n’est pas réglementé­e, le Dr Kheireddin­e Khaled, qui a recueilli les témoignage­s de plusieurs migrants, a affirmé qu’ «en les interrogea­nt, ces migrants ont fait entendre leur souffrance et leur difficulté quotidienn­es» . Et d’ajouter : «La principale raison est notre organisati­on sanitaire très complexe et parfois inaccessib­le. Ainsi, beaucoup d’entre eux avouent préférer renoncer au recours aux soins même primaires de peur d’être renvoyés chez eux» . Le chercheur a notamment indiqué que la majorité des migrants sont au chômage, et les autres exercent dans le secteur privé et ne bénéficien­t donc pas d’une prise en charge. «50% ont recours aux organisati­ons internatio­nales, à l’image de l’OIM pour bénéficier de soins, ce qui est dramatique pour un pays comme le nôtre» . Ainsi, il a appelé à une meilleure connaissan­ce du profil des migrants et de leurs besoins les plus urgents car la santé représente un droit fondamenta­l. «Il faut réviser notre cadre juridique, ainsi que les conditions d’accès aux soins. Sinon nous frôlerons de plus grands drames» , a-t-il précisé.

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