La Presse (Tunisie)

Le Soviet suprême

Entre pragmatism­e froid et volonté de mourir avec ses idées, les dieux du stade ont tranché !

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Le sélectionn­eur Stanislav Cherchesov est forcément aux anges. Présenté comme un onze de figurants, son escadron n’a pas tardé à tout d’abord gagner ses galons d’outsider avant de carrément afficher ses ambitions gargantues­ques. Récemment, à Moscou, l’Espagne en a fait les frais. Et au pays hôte du Mondial de valider son ticket pour le premier quart de finale de son histoire. Des moments forts, il y en a eu à profusion. De l’adrénaline aussi! Au moment du penalty inscrit par Artem Dzyuba. Puis lorsque Igor Akinfeev a arrêté les tirs au but de Koke et Aspas. Tout un pays en a rêvé. La «Sbornaia» l’a fait ! Pour un onze qui n’a pu compter sur le soutien des journalist­es locaux mais sur la ferveur populaire, ça sonne comme un air de revanche. C’est qu’effectivem­ent, personne ne les attendait là. On avait même coutume de dire que si la «Sbornaïa» passait le premier tour, ce serait un miracle. Alors battre la Roja, un onze constellé de vedettes, c’est en soi un accompliss­ement. La cerise sur le gâteau aura été ce passage au tour suivant. Puis, l’appétit vient en mangeant ! Forcément, cette Russie-là a bien joué le coup. Et tant pis s’il a fallu bétonner face aux Ibères ! Tant pis si les locaux ont évité de se projeter vers l’avant. L’important est de tenir, ne pas craquer, garder toute sa lucidité ! En face, même si le jeu andalou était plaisant, le manque de percussion était au rendez-vous. Pas de prise de risques pour les Russes mais une attention de tous les instants. Entre pragmatism­e froid et volonté de mourir avec ses idées, les dieux du stade ont tranché ! Et à la Russie de se remémorer le bon vieux temps, celui de Blokhine, Yachine et même Belanov et Dassaev. Coach Cherchesov, lui, n’a pas envie de s’arrêter en si bon chemin. Il veut que les siens écrivent l’histoire et atteignent les hautes sphères, celles menant au panthéon du sport-roi. L’ambition peut prêter à sourire, mais ce n’est pas vraiment le genre de la maison. L’impossible n’est pas russe !

Pic de décibels et disparitio­n du scepticism­e !

Cette Russie-là a donc fini par achever la Roja, une sélection habituée à remplir éternellem­ent son armoire à trophées sans laisser de miettes à la concurrenc­e. Cette période est, semble-t-il, révolue. Et il fallait avoir pas mal d’imaginatio­n pour devi- ner que la Russie allait éliminer l’Espagne. Une Espagne en fin de cycle, mais une Espagne quand même, qui du haut de sa stature et son rang, ne pouvait pas se douter qu’elle tomberait sur un os. Et même si, en fin de compte, la Russie n’est pas vraiment brillante, elle est attachante et sanguine ! Les Russes ont désormais de bonnes raisons de voir leur équipe nationale plus belle qu’elle ne l’est ! L’opération séduction peut maintenant débuter. L’alchimie et la cohésion de groupe étant ce qu’elles sont, l’équipe entend bel et bien se sublimer et faire prévaloir son osmose pour s’imposer. Au final, la Russie a déjà réussi son Mondial. En clair, elle aura déjà réussi à mettre toute la Russie dans la poche! L’exemple le plus frap- pant aura été ce pic de décibels au moment où Igor Akinfeev a repoussé le tir au but de Iago Aspas ! Gageons qu’à l’avenir, la tendance n’est pas près de s’inverser. Car la disparitio­n du scepticism­e, quant au niveau de cette équipe, est aussi la garantie d’un gros boucan pour la prochaine sortie de la «Sbornaïa» !

Khaled KHOUINI

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