La Presse (Tunisie)

Ce qu’est la chanson tunisienne sans Hassen Dahmani ?

Peu d’entre nous s’en rendent compte aujourd’hui.

- Khaled Tebourbi

La vérité est que pendant ses plus que trente années de brio vocal et musical Hassen Dahmani fut un artiste discret. Sa voix irradiait la scène, par son ampleur, sa finesse, ses couleurs, mais il préférait toujours être discret. Orpheline, voilà ce qu’est la chanson tunisienne après lui. Orpheline d’un des chanteurs les plus doués, les plus dotés, de ces quatre à cinq dernières décennies. D’aucuns parmi nous vont jusqu’à pousser loin la comparaiso­n. Jusqu’àifrit, jusqu’à Hassen Omrane, Ajej et Trilliati. C’étaient des gros calibres du chant populaire et de l’inchad : il avait leur souffle, leur aisance, leur facilité. Mais il n’avait pas que cela, il avait le don et la maîtrise du Tarab,ducharqi et des mawels: du plus ardu! Notre musique est dualiste, maghrébine et orientale, il posséda d’emblée cette dualité.

Hassen Dahmani était tout cela à la fois, mais il préférait la discrétion: nous ne mesurons, hélas, sa perte qu’aujourd’hui. La chanson tunisienne est orpheline de la voix, du chant de Hassen Dahmani : ce manque nous pèsera tous et pour longtemps. Mais il nous manquera aussi, qu’il n’ait pu compléter une oeuvre. Qu’il n’ait pu tracer complèteme­nt son sillon. Le répertoire qu’il nous laisse est sérieux, savoureux, bien écrit, bien composé, mais peu «prodigue». Le tempéramen­t peut-être, l’exigence assurément,la patience encore (autre forme de discrétion). Lotfi Bouchnaq nous rapportait hier que quatre titres l’attendaien­t ces derniers jours en studio. Il était formel : « Personne ne les chantera comme lui ». Le meilleur, maintenant : c’était le plus aimable et le plus paisible des artistes. Jamais de querelles, jamais un mot de plus. Dans le mileu de la chanson les coeurs purs sont si rares. «Quasi» introuvabl­es. Dieu vous bénisse Hassen Dahmani, vous l’étiez une vie durant.

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