Bonne gouvernance, dites-vous ?!
SURRÉALISTE, l’affaire frise le tragi-comique kafkaïen : un investisseur tunisien exploite, dans les zones côtières de Monastir, un champ pétrolifère sans disposer de permis. Il a même sollicité le chef du gouvernement pour inaugurer le champ en question, dénommé «Halk El Menzel». Cependant, après vérification, il s’est avéré que le délai d’exploitation de son permis a expiré depuis 2009.
L’essence même de cette affaire qui secoue le pays depuis trois jours met en évidence les grandes faiblesses de notre administration. Ou plus exactement, l’absence d’une administration intelligente capable de décider et de réguler sa propre décision et surtout de l’exercice d’un droit de regard par rapport aux décisions prises. Depuis 2009, est-ce qu’il y a eu un accompagnement, un contrôle de la décision ?! Dans cette affaire, la corruption ne serait peut-être pas absente, mais la corruption est la résultante d’un déficit aussi du processus décisionnel. La «bonne gouvernance» est un terme galvaudé. Sans doute, mais ici et en l’occurrence dans cette affaire, elle renvoie à cette capacité de l’administration de produire son propre droit de regard, ses propres mécanismes de contrôle et de régulation.
Et puis, au-delà de la question de la bonne gouvernance, se pose la question du fonctionnement de l’etat. Comment se fait-il que depuis 2009 personne ne s’en soit rendu compte ? Où sont les contre-pouvoirs à l’intérieur de l’etat ? Un Etat est un tout, unité et indivisibilité. Or, ce qui rend un État fort dans son unité, c’est sa capacité dialectique de pouvoir éviter ce genre de débordements. C’est la capacité aussi de l’etat lui-même de s’autocontrôler, de rendre un service transparent et de qualité aux contribuables. L’affaire dont il est ici question révèle un énorme déficit à ce niveau-là.
En attendant les résultats de la commission d’enquête diligentée par le chef du gouvernement, il est à craindre de voir cette affaire exploitée par la politique de la petite lorgnette. Au détriment de l’intérêt national, de l’intérêt général et de l’intérêt de l’etat lui-même.