Quand les cahiers subventionnés investissent les étals anarchiques
Que font les cahiers subventionnés chez les vendeurs ?
L’etat a-t-il réellement mainmise sur les produits qu’il subventionne ? En contrôle-t-il concrètement la commercialisation ? Pour appeler un chat un chat, nous oserons répondre par la négative. Hélas. Et pour s’en convaincre, on n’a qu’à recenser les importantes quantités de cahiers subventionnés bouffés (kidnappés ?) par le marché parallèle. Le constat est plus frappant dans le Grand-tunis où dans quasiment tous les étals anarchiques sévissant notamment dans les rues Charles-de-gaulle et Sidi Boumendil, le citoyen lambda peut tranquillement acquérir le fameux cahier subventionné écoulé ici abondamment, et dans ses quatre formats.
Et dire que ces… librairies à ciel ouvert ne désemplissent pas, en dépit de la facilité avec laquelle leurs propriétaires jonglent avec les prix et abusent, à coups de hausses des prix, de la naïveté d’une bonne partie de la clientèle. Celle-ci ne s’aperçoit que tardivement qu’elle a été leurrée et qu’elle aurait dû aller s’approvisionner chez le libraire du quartier, si reine soit la bousculade qui y règne.
Une filière à remonter
Dès lors, surgissent les questions suivantes : comment les cahiers que l’etat subventionne aux dépens de son pourtant fragile budget ont-ils pu atterrir dans le marché parallèle ? Quelles sont les parties qui sont derrière ? Y a-til complicité, quelque part ? Et puis, parbleu, pourquoi la «mascarade» tient-elle encore la route, en toute impunité ? A-t-on pensé aux libraires exerçant légalement et qui payent impôts, taxes et autres agios bancaires, tout en supportant le fardeau du manque à gagner engendré par cette concurrence déloyale ?
De toute façon, ces victimes potentielles n’hésitent pas à parler, à l’unisson, de pratiques suspectes et mafieuses qui sévissent essentiellement dans les circuits de distribution des fournitures scolaires, outre le ministère du Commerce auquel on reproche un manque de rigueur et de suivi dans la gestion de ces circuits, ce sont surtout les imprimeries qui sont pointées du doigt. En effet, deux libraires sur trois vous diront que la plupart des maisons d’édition s’évertuent à imprimer des quantités supplémentaires dépassant le quota commandé, avant de les écouler dans les circuits parallèles. Selon les mêmes révélations des victimes, les transactions sont facilement concluables, parce que exonérées de taxes et donc basées sur le gagnant-gagnant. C’est-à-dire… au diable les perdants, en l’occurrence le consommateur et l’etat ! Si le premier se laisse prendre dans la plupart des cas, soit par naïveté, soit par lassitude, le second ne compte plus les dégâts qui en découlent, dont sa baisse d’autorité, la grogne des libraires et le coup de fouet «offert» aux contrebandiers ! Et pourtant, tout le monde sait que le ministère du Commerce, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a tout un département chargé du suivi et des brigades de contrôle des prix qui opèrent un peu partout dans le pays flanquées de policiers. Normalement, quand une structure si bien «armée» est à l’oeuvre, rien ne passe et les réseaux du commerce parallèle en pâtissent. Et c’est justement ces filiales qu’il faudra absolument remonter, en dépit du brouillage de leurs pistes, de l’immensité de leurs ramifications et du machiavélisme de leurs pratiques.