Partenariat tuniso-français
Créer les conditions d’un retour à la sérénité et à la concorde en libye est un but ambitieux qui, s’il était réalisé, consacrerait les efforts consentis par la tunisie en ce sens. Mais consacrerait aussi un effort conjugué entre différents partenaires, parmi lesquels le couple tuniso-français occupe une place prépondérante
LE ministre français de l’europe et des Affaires étrangères, M. Jean-yves Le Drian, a achevé hier une visite de deux jours à Tunis, à l’invitation de son homologue tunisien, M. Khemaïes Jhinaoui. Depuis la mise en place d’une «feuille de route» commune, à l’occasion du passage chez nous du président français au début du mois de février dernier, il s’agissait sans doute de faire le point sur ce nouveau partenariat qui, par-delà les domaines traditionnels de coopération, s’étend aux questions politico-sécuritaires, dans leur double dimension locale et régionale.
On ne perd pas de vue que M. Le Drian compte parmi les figures les plus centrales de l’etat français, dans la mesure où il fut ministre de la Défense de 2012 à 2017, sous la présidence de François Hollande, et qu’il occupe désormais son poste de chef de la diplomatie depuis l’arrivée d’emmanuel Macron au pouvoir. Pareille longévité à un tel niveau de responsabilité confère à ses visites un caractère qui ne saurait être simplement technique.
Bien sûr, le partenariat visé entre les deux pays, pour lequel on a donc élaboré une feuille de route et qui doit donner lieu à une nouvelle rencontre au premier semestre 2019 — le 2e Haut conseil de coopération franco-tunisien — comporte des dossiers à vocation sociale et économique. Hier, des accords ont été signés au palais de la Kasbah pour une valeur de 49 millions d’euros. Ils relèvent en grande partie de cette vocation. Cet aspect de la coopération, toutefois, n’est pas séparable d’une démarche plus globale vers laquelle le ministre français a fait signe quand, dans une déclaration, il a évoqué l’engagement de la France à «se tenir aux côtés de la Tunisie afin qu’elle joue son rôle dans la garantie de la sécurité et de la stabilité de la région». A l’issue d’une rencontre avec Béji Caïd Essebsi au palais de Carthage, la présidence de la République a indiqué pour sa part, dans un communiqué, que l’entretien avec M. Le Drian avait « permis de passer en revue les derniers développements en Libye »…
De fait, la situation qui prévaut en Libye constitue la matière d’un partenariat essentiellement politique, celui-là. Les deux pays sont des acteurs engagés en vue d’aider les Libyens à trouver une solution à la crise qui prévaut chez eux depuis de nombreuses années : la Tunisie, en tant que nation qui offre l’exemple concret d’une démocratie de consensus dans son mode de gouvernement, mais aussi en tant que nation qui a poussé de façon énergique en vue de pourparlers interlibyens à travers une initiative qui a associé les pays du voisinage depuis février 2017… Et la France en tant que pays dont le rôle s’est manifesté en particulier à travers l’organisation en mai dernier d’une conférence internationale sur la Libye, à l’issue de laquelle l’objectif d’organiser des élections libres d’ici la fin de l’année avait été fortement évoqué.
Créer les conditions d’un retour à la sérénité et à la concorde en Libye est un but ambitieux qui, s’il était réalisé, consacrerait les efforts consentis par la Tunisie en ce sens. Mais consacrerait aussi un effort conjugué entre différents partenaires, parmi lesquels le couple tuniso-français occupe une place prépondérante. Et cela donnerait pour ainsi dire le la à une diplomatie plus active et plus ouverte sur le monde, où l’entrée en démocratie se traduit par des initiatives pacifiques mais persévérantes au service de la paix et de la dignité dans le monde, à mener seuls ou en partenariat avec d’autres pays, qu’ils soient de la rive sud ou de la rive nord.