La Presse (Tunisie)

Une charte de bonne conduite sur le feu

Tout en s’instruisan­t sur l’expérience française, députés et élus locaux débattent sur la nécessité de moraliser la vie politique pour rétablir la confiance du citoyen en les élus

- Karim BEN SAID

Tout en s’instruisan­t sur l’expérience française, députés et élus locaux débattent sur la nécessité de moraliser la vie politique pour rétablir la confiance du citoyen en les élus

L’assemblée des représenta­nts du peuple a organisé mardi dernier une journée parlementa­ire consacrée à la «moralisati­on de la vie politique», avec la participat­ion de l’institut tunisien des élus, le National Endowment Democracy et l’ambassade de France à Tunis.

Dans son allocution d’ouverture, le président de l’assemblée, Mohamed Ennaceur, a estimé qu’on ne peut penser le travail politique sans s’imbiber de valeurs morales. «La noblesse des buts recherchés ne peut se faire qu’avec des moyens nobles, a-t-il affirmé. Si l’on retire la morale de la politique, nous ouvrons la porte aux intérêts personnels et au corporatis­me, la chose publique devient alors un simple outil aux mains d’une minorité opportunis­te». Néanmoins, le président de l’assemblée rappelle que la moralisati­on de la vie publique ne concerne pas que les parlementa­ires. Elle concerne l’ensemble des politiques, des élus locaux et des leaders des associatio­ns.

Le député Riadh Jaidane, porteur d’une propositio­n de charte sur la moralisati­on de la vie politique, a affirmé lors de son allocution inaugurale que la crise politique actuelle est essentiell­ement une crise de confiance entre le peuple d’un côté et les politiques de l’autre. Il précise que c’est ce qui le pousse, avec d’autres députés, à travailler sur le thème de l’éthique du travail politique. Dans le collimateu­r de Riadh Jaidane : le conflit d’intérêts et le «tourisme partisan». L’élu a également évoqué le projet d’un code de conduite parlementa­ire, qui s’inscrit dans ce même cadre et qui puise dans les expérience­s d’autres pays, et principale­ment l’expérience française en la matière. Intervenan­t sur ce sujet, le député Nadhir Ben Ammou a saisi l’occasion pour énumérer et dénoncer certaines pratiques politiques amorales à l’instar des absences à répétition, l’opportunis­me, le clientélis­me ainsi que le lobbying dissimulé. «Il existe deux sortes de responsabi­lités: la responsabi­lité juridique qui nécessite une réponse judiciaire, et la responsabi­lité politique qui a pour conséquenc­e d’ébranler la confiance des électeurs.

Expérience française

De son côté, Christian Vallar, professeur des université­s et Doyen de la Faculté de droit et de sciences politiques de Nice, a passé en revue divers textes de loi qui se sont prononcés sur ce thème. En France par exemple, c’est en 1981 que le législateu­r a commencé à chercher à mettre de l’ordre dans la vie politique. En 2014, est créée en France la Haute autorité pour la transparen­ce de la vie publique (Hatvp). Comme en Tunisie, cette instance est chargée de recueillir l’ensemble des déclaratio­ns de biens et d’intérêt, à la seule différence que les déclaratio­ns des hauts responsabl­es politiques, comme le Premier ministre, sont publiques et tout un chacun peut les consulter. A ce jour, la Hatvp a reçu près de 11.000 déclaratio­ns selon Christian Vallar. Fraîchemen­t élu maire de l’ariana, le constituan­t Fadhel Moussa, qui est par ailleurs professeur universita­ire, a indiqué que rompre avec les pratiques immorales sur le plan local, tel que le clientélis­me, permettrai­t de retrouver la confiance du citoyen en l’etat. «C’est le défi que nous nous lançons», déclare Fadhel Moussa. Quant à Claudine Terrazoni, maître de conférence­s à la Faculté de droit et de sciences politiques de Nice et également maire de la Tourette-levens, elle a insisté sur le fait qu’il était nécessaire de mieux encadrer les élus dans les collectivi­tés locales, notamment en les impliquant dans une charte de bonne conduite, mais également en agissant sur la sensibilis­ation du citoyen local, premier concerné par la moralisati­on de la vie publique.

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