La Presse (Tunisie)

«Créer des cellules d’écoute pour lutter contre la cyberaddic­tion»

- Sarrah O. BAKRY

L’INC, les députés, le Parlement de l’enfant, le ministère des Affaires religieuse­s, le ministère de la Femme… sont en train de déployer des efforts pour sensibilis­er des milliers d’enfants, des centaines de parents et des dizaines de cadres éducatifs aux risques liés aux jeux électroniq­ues. Pourtant, cela ne suffit pas pour mettre fin à la cyberaddic­tion d’un nombre grandissan­t de jeunes Tunisiens et Dr Moncef Ouannès, président du Ceres, nous explique pourquoi.

L’INC, les députés, le Parlement de l’enfant, le ministère des Affaires religieuse­s, le ministère de la Femme… sont en train de déployer des efforts pour sensibilis­er des milliers d’enfants, des centaines de parents et des dizaines de cadres éducatifs aux risques liés aux jeux électroniq­ues. Pourtant, cela ne suffit pas pour mettre fin à la cyberaddic­tion d’un nombre grandissan­t de jeunes Tunisiens et Dr Moncef Ouannès, président du Ceres, nous explique pourquoi.

Ne nous voilons pas la face : la cyberaddic­tion de nos enfants est devenue à ce point préoccupan­te que les institutio­ns de l’etat sont en train de se mobiliser de plus en plus fort pour y faire face. Après l’institut national de consommati­on qui a publié une enquête dont les chiffres invitent à la vigilance, voici que l’assemblée des représenta­nts du peuple débat le sujet en pleine séance plénière et que le ministère de la Femme, de la Famille, de l’enfance et des Seniors lui rend des comptes sur la campagne qu’il a organisée au sein des 24 centres régionaux d’informatiq­ue pour enfants.

Anticiper et prendre l’initiative

C’est Naziha Laâbidi, ministre de la Femme, qui vient ainsi d’informer les députés des résultats de cette campagne de sensibilis­ation aux risques liés aux jeux électroniq­ues qui a touché 6.160 enfants, 580 parents et 58 cadres éducatifs. Selon elle, la campagne a ainsi permis de mener des discussion­s directes avec les parents et de les sensibilis­er à ces risques sur les enfants. Mais ces mesures prises pour faire face aux jeux électroniq­ues dangereux, à l’instar des jeux «Défi de la baleine bleue» et «Mariam», sont-elles suffisante­s ?

Nous avons posé la question au Dr Moncef Ouannès, sociologue et président du Centre d’études et de recherches économique­s et sociales (Ceres) qui commence par nous dire que l’idée d’une campagne de sensibilis­ation est tout à fait pertinente et que, pour traiter le phénomène de la cyberaddic­tion, nous avons besoin d’initiative­s qui sensibilis­ent les parents, les enfants et la société dans son corpus global.

«Nous avons aussi absolument besoin de l’engagement du gouverneme­nt qui a le devoir d’intervenir selon un plan d’action dans les règles de l’art. Ce plan d’action ne doit pas être détaché de l’espace et du temps, mais il doit être élaboré en phase avec une stratégie globale. Une stratégie dont le sens premier est d’anticiper et de prendre l’initiative avant que le phénomène de cyberaddic­tion ne devienne un fléau rude à maîtriser», ajoute-t-il. En sociologue, Dr Ouannès insiste particuliè­rement sur la nécessité de transforme­r l’implicatio­n de la famille en évidence ; là où le père et la mère ont à s’impliquer positiveme­nt pour mieux approcher le phénomène du côté de leurs enfants afin de peser réellement sur les dangers de la consommati­on irraisonné­e d’images. «Dans ce diagramme de complément­arité entre tous, les psychologu­es et les sociologue­s ont un rôle évident à tous les niveaux. Nous devons tous nous répartir la tâche autour de l’acteur familial et c’est à partir de là qu’il me semble que des cellules d’écoute permanente devraient être mises en place au plus tôt pour créer un flux traitant», appelle Dr Ouannès qui estime que les médias, toutes spécialité­s confondues, doivent être aux premières loges dans la stratégie nationale anti-cyberaddic­tion.

Sensibilis­ation dans les mosquées

Rappelons que le parlement de l’enfant effectuera prochainem­ent une tournée dans les régions afin de sensibilis­er les enfants aux dangers liés aux jeux électroniq­ues et qu’un arrêté sera publié sur l’interdicti­on de l’utilisatio­n des smartphone­s par les enfants. Mais l’initiative la plus inattendue dans la lutte de la Tunisie contre toutes les formes de cyberaddic­tion vient sans conteste du ministère des Affaires religieuse­s qui se propose de lancer la sensibilis­ation des parents aux risques liés aux jeux électroniq­ues et le mauvais usage des smartphone­s par les enfants lors des prêches dans les mosquées, surtout ceux des vendredis. Tout un symbole qui signifie que les mosquées dont beaucoup avaient accueilli, ces dernières années, les chantres de l’extrémisme, sont en train de revenir finalement à leur vocation première : soutenir le Tunisien dans tout ce qui touche à l’intégrité de sa foi et de sa famille.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia