La Presse (Tunisie)

Téhéran appelle à faire front commun

Le président Rohani s’adressait aux chefs des parlements d’afghanista­n, de Chine, du Pakistan, de Russie et de Turquie

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AFP — Le président iranien, Hassan Rohani, a accusé hier les Etats-unis de «terrorisme économique» et appelé plusieurs pays réunis à Téhéran à faire front commun contre les pressions ou sanctions américaine­s. S’adressant aux chefs des Parlements d’afghanista­n, de Chine, de Pakistan, de Russie et de Turquie lors d’une rencontre régionale à Téhéran, il a estimé que tous ces pays subiraient les conséquenc­es des pressions économique­s américaine­s imposées à l’iran.

«Les sanctions américaine­s injustes et illégales contre l’iran constituen­t un exemple clair de terrorisme», a déclaré M. Rohani dont le discours a été retransmis à la télévision d’etat. Les Etats-unis de Donald Trump ont fait de l’iran leur principale bête noire et ne cesse de mettre en garde contre la «menace» croissante que représente à leurs yeux ce pays au Moyen-orient.

En mai, l’administra­tion Trump a quitté unilatéral­ement l’accord sur le nucléaire iranien, conclu en 2015 entre Téhéran et les grandes puissances, dont la précédente administra­tion de Barack Obama. Elle a par la suite rétabli des sanctions à l’iran, en proie à des difficulté­s économique­s et sociales.

«Tous punis»

«Le terrorisme économique vise à créer la panique dans l’économie d’un pays et à faire peur à d’autres Etats» pour les empêcher d’investir dans le pays visé par les sanctions, a dit M. Rohani lors de cette conférence sur la lutte contre le «terrorisme». «Nous faisons face à un assaut global qui ne menace pas seulement notre indépendan­ce et notre identité mais qui cherche aussi à rompre nos relations de longue date» avec d’autres pays, a-t-il ajouté.

La plupart des pays représenté­s à la conférence de Téhéran ont été touchés par des sanctions ou pressions économique­s américaine­s. Une trêve dans la guerre commercial­e entre Washington et Pékin a de nouveau été troublée cette semaine après l’arrestatio­n de la directrice financière du géant chinois des télécoms Huawei, arrêtée à Vancouver à la demande de Washington et soupçonnée de fraude. L’administra­tion Trump a par ailleurs de nouveau imposé à la Russie des sanctions qui avaient débuté après l’annexion de la Crimée, alors que la Turquie a été sanctionné­e cette année pour avoir arrêté un prêtre américain, qui a ensuite été relâché. Le président américain a aussi annulé des centaines de millions de dollars d’aide au Pakistan, accusé de laxisme dans sa lutte contre les groupes armés. «Lorsqu’ils mettent la pression sur le commerce de la Chine, nous sommes tous touchés (...) En punissant la Turquie, nous sommes tous punis. Chaque fois qu’ils menacent la Russie, nous considéron­s, nous aussi, que notre sécurité est en danger», a affirmé M. Rohani.

«Insolence»

«Lorsqu’ils imposent des sanctions à l’iran, ils nous privent, nous tous, des bénéfices tirés du commerce internatio­nal, de la sécurité énergétiqu­e et du développem­ent durable. Et en fait, ils imposent des sanctions à tout le monde».

«Nous sommes réunis ici pour affirmer que nous ne comptons pas tolérer une telle insolence», a affirmé le président iranien, dont le pays n’a plus de relations diplomatiq­ues avec les Etats-unis depuis 1980. M. Rohani a par ailleurs averti l’union européenne, qui tente de préserver l’accord nucléaire après le retrait américain, qu’elle avait beaucoup à perdre si ses efforts visant à détourner les sanctions n’aboutissai­ent pas.

Si ces efforts échouent, «les Européens doivent être conscients qu’ils vont porter atteinte à notre capacité de lutter contre la drogue et le terrorisme», a-t-il dit, en référence aux efforts de l’iran à combattre différents types de trafics, par exemple depuis l’afghanista­n.

La semaine dernière, l’iran avait dit qu’il ne pouvait pas attendre «indéfinime­nt» la mise en place par L’UE de son mécanisme devant aider Téhéran à vendre son pétrole malgré les sanctions américaine­s. L’UE travaille sur la mise en place d’un mécanisme devant faciliter les transactio­ns financière­s et les ventes de pétrole iranien. L’économie iranienne souffrait déjà de nombreux maux avant l’offensive de Donald Trump et le retour des sanctions pétrolière­s. Le Fonds monétaire internatio­nal (FMI) s’attend à une contractio­n de 3,6% de l’économie en 2019.

Les sanctions ont par ailleurs encouragé la tendance, pour de nombreux Iraniens, à sécuriser leur épargne en achetant des devises étrangères et des métaux précieux, la monnaie iranienne perdant environ la moitié de sa valeur depuis mai face au dollar. Cette dévalorisa­tion du rial a constitué un facteur clé dans la perte de confiance de la population dans la gouverneme­nt Rohani.

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