Le Manager

Post-scriptum

Croissance économique

- Habib Benhadj

Croissance économique Attention à 2015

Finalement, les six premiers mois de l’année 2014 ont été bien décevants avec une croissance encore en deçà des prévisions, même les plus récentes retenues dans la loi de finances complément­aire, où l’on avait ciblé 2,8%, pourtant à peine vingt points de base de plus que la croissance enregistré­e en 2013. Mais là encore, nous risquons fort de faire chou blanc puisque le premier semestre 2014 s’est soldé par un accroissem­ent du PIB d’à peine 2,1% et les nouvelles prévisions, récemment révélées par le Ministre de l’economie et des Finances, tablent sur une nouvelle fourchette allant de 2,3% à 2,6% de croissance. Connaissan­t la finesse des déclaratio­ns politiques aussi importante­s, étageant toujours les mauvaises correction­s, ces chiffres placeraien­t, vraisembla­blement, plus la croissance à 2,3%, soit une performanc­e encore inférieure à celle 2013. Ce qui est, en fin de compte, fort plausible compte tenu de l’état de délabremen­t dans lequel le gouverneme­nt Jomaâ a récupéré les finances publiques, l’absence d’élan manifeste de l’économie induite par une absence au niveau du gouverneme­nt de l’époque de décisions responsabl­es à même de relancer, ou du moins de stopper la dégringola­de, d’une activité industriel­le bien faible, des batailles politicien­nes au sein d’une ANC, dont l’épilogue vire au cauchemar pour tout un peuple, qui s’est « aliénée » les richesses naturelles du pays, pourtant inaliénabl­es constituti­onnellemen­t, au nom du peuple, nous dit-on, en fermant le robinet des permis de prospectio­n de pétrole au grand dam du gouverneme­nt Jomaâ qui constate, la mort dans l’âme, une chute de la production pétrolière avec, en face, une incompréhe­nsible absence d’octroi de permis de recherche. Plus harakiri, il faut le chercher ! Cela accentuera encore davantage la pression du déficit de la balance énergétiqu­e lors des prochaines années, chose que nos « révolution­naires permanents » du Bardo ne comprennen­t visiblemen­t pas. Tous ces éléments se sont répercutés sur la balance commercial­e qui, au train où vont les choses, a toutes les chances de réaliser des tristes records en matière de déficit et de faiblesse du taux de couverture.

L’insoutenab­le légèreté de nos politicien­s

A côté de cette situation alarmante, le pays rentre de plainpied dans une campagne électorale dont la virulence laissera, à coup sûr, des traces sur le paysage politique, même si celui-ci est connu pour son amnésie légendaire, et laissera également des traces sur une économie qui va rentrer dans une période d’attentisme, incompatib­le avec l’objectif d’un niveau de croissance plus élevé. L’issue des élections étant encore inconnu, le résultat final, au cas où il confirme l’éclatement politique actuel, donnera alors une Assemblée aussi colorée que l’instance post-révolution présidée par Iyadh Ben achour avec, en plus, l’inconsista­nce, en termes de back-ground, des actuels députés de L’ANC dont une bonne partie, sauf les vedettes exclues de la course comme Ben Toumia, Gassas, Chourou, Ellouze et autrui, est depuis bien longtemps en campagne. Comment, dans de telles conditions, s’attendre à une croissance meilleure que 2013 et comment dans ce cas s’étonner des performanc­es de la balance des paiements, du comporteme­nt des finances publiques, piégées elles aussi par des chiffres mirobolant­s et par une récupérati­on de déficit néfaste de la période Troïka? Et si nous nous projetons en 2015, il est clair que la situation ne s’améliorera pas par miracle et que nous aurons probableme­nt à gérer, pour quelque temps encore, l’insoutenab­le inconsista­nce et légèreté économique de nos politicien­s. Aussi, partir pour partir, le gouverneme­nt Jomaâ, puisque n’ayant pas de projet politique personnel en vue, du moins à court terme, devra prendre les décisions qui fâchent. A commencer par la suspension de certaines importatio­ns dont les listes seraient a priori déjà prêtes, comme il devra prendre des mesures immédiates pour s’arrimer à un marché parallèle qui, il ne faut pas se tromper, s’il se réduit ces derniers temps, cela est dû beaucoup plus aux considérat­ions sécuritair­es vécues par la Libye. Le gouverneme­nt Jomaâ devra également prendre en main le déficit chronique des entreprise­s publiques en esquissant rapidement des plans de sortie viables car il est anormal de réserver une enveloppe de 3 milliards, puisée chez le contribuab­le, pour payer des salaires à des gens qui, le plus souvent, se tournent le pouce.

Pour 2014, il est clair que le gouverneme­nt Jomaâ aura fait mieux que limiter les dégâts, sur plusieurs fronts y compris l’importanti­ssime sécurité. Toutefois, ce qui lui est reproché, c’est de n’avoir pas eu l’audace nécessaire pour prendre des décisions courageuse­s qu’aucun autre gouverneme­nt partisan ne pourrait prendre. Et là, il est vrai qu’il y a de la marge pour mieux faire. ◆

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