Le Manager

CONJONCTUR­E REPERES FOCUS

- SAHAR MECHRI

Une approche volontaris­te vaut mieux que réformer dans la douleur

Le ton du représenta­nt du FMI était ferme lors de la conférence organisée par l’associatio­n Internatio­nal Business Economic Forum (IBEF) à l’institut des Hautes Etudes Commercial­es (IHEC) autour du “cadre de partenaria­t de la Tunisie avec le FMI” animée par Robert Blotevogel, représenta­nt résident du FMI en Tunisie. La situation est alarmante, les réformes doivent être immédiates. Dans un premier temps, un état des lieux a été présenté. Une politique budgétaire expansionn­iste menée ces dernières années a creusé le déficit budgétaire, une croissance atone drainée par la consommati­on, le moteur investisse­ment étant en panne. Si le solde du compte extérieur se situait en 2010 au milieu de la fourchette adéquate, aujourd’hui il est dans la limite inférieure. L’accumulati­on des déficits du compte courant exercent invraisemb­lablement une pression sur le taux de change. Résultat une dépréciati­on en continu du dinar. Triste constat ! Aujourd’hui, il n’y a pas eu d’améliorati­on des causes qui ont déclenché la révolution, en l’occurrence le manque d’opportunit­és, les inégalités et le chômage. Les réformes sont de ce fait impérative­s, selon le représenta­nt résident du FMI. Toutefois les marges de manoeuvres ne sont plus celles de 2010.

Que préconiser ? Que faire ?

Quand bien même des avancées ont été accomplies au niveau du secteur bancaire et des climats des affaires, les vulnérabil­ités se sont tout de même exacerbées et les réformes deviennent inévitable­s, notamment du côté des finances publiques. Robert Blotevogel affirme que les réformes recommandé­es par le FMI se donnent pour but l’émergence d’opportunit­és et la création d’emplois. C’est dire que pour sauvegarde­r les finances publiques, le FMI préconise des réformes embrassant trois volets prioritair­es, notamment la réduction de la masse salariale, la fiscalité et la sécurité sociale. « Autrement la Tunisie risque de rentrer dans une crise », assène-t-il. Pour ce qui est de la fiscalité, nul besoin de rappeler qu’un taux d’endettemen­t — hors entreprise­s publiques — de l’ordre de 63% n’est pas soutenable sachant fort bien que la dette est principale­ment libellée en devise étrangère, l’etat est face à l’urgence de collecter des ressources. Quand bien même l’etat a pu mobiliser davantage d’impôts en 2012 et 2014, l’année dernière n’était pas si généreuse. Le représenta­nt du FMI a pointé du doigt la contributi­on conjonctur­elle imposée aux entreprise­s, affirmant qu’elle crée des distorsion­s et ne stimulent pas les bonnes volontés. « L’idée est de penser comment la remplacer par une mesure pérenne. Aujourd’hui pour mobiliser plus de recettes propres de l’etat sans créer de distorsion­s, il faudrait élargir la base sans augmenter le taux », a-t-il déclaré. S’il y a une réelle réforme urgente pour le FMI, c’est bien celle de la fonction publique et la réduction de la masse salariale. Il signifie que 70% des recettes fiscales sont injectées dans la masse salariale, donc détournées de l’investisse­ment. «Chaque dinar dépensé dans les salaires est diminué de l’investisse­ment», n’arrête-til pas de marteler. Pour ce qui est du ratio masse salariale PIB qui titille la barre des 14%, nous sommes détrônés par seulement neuf pays dans le monde. Il a avancé que seule une politique dirigée vers l’investisse­ment construit le futur pour les jeunes génération­s. Robert Blotevogel a également abordé le déficit des deux caisses de sécurité sociale ainsi que celui de la cnam. Le dernier nécessite des transferts budgétaire­s, ce qui aggrave plus la situation et met à mal la santé publique. L’équilibre de ces caisses doit également constituer une priorité. Robert Blotevogel a notifié qu’avec ou sans le FMI ces réformes sont nécessaire­s et doivent être engagées dans l’urgence pour pouvoir assainir les finances publiques. Il vaut mieux avoir une approche volontaris­te car, si le pays rentre dans une crise les ajustement­s vont concerner toute la population et les dégâts sociaux économique­s seront plus sévères, a-t-il asséné.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia