Francis Fukuyama: “Pour asseoir une démocratie, il faut bien plus que des élections”
CENTER ON DEMOCRACY, DEVELOPMENT AND THE RULE OF LAW
Philosophe, économiste et professeur en sciences politiques, théoricien de “la fin de l’histoire”, le livre qui a fait couler beaucoup d’encre à la suite de la chute du mur de Berlin. Cet américain affirmait que le consensus sur la démocratie libérale va mettre fin à à la guerre idéologique. Lors de sa dernière visite en Tunisie, le manager est allé à sa rencontre pour l’interroger sur la transition démocratique et économique en Tunisie. Que pensez-vous de la situation en Tunisie?
Je dirais que la Tunisie passe par plusieurs difficultés pour relancer son économie et accélérer la création d’emplois. A mon avis, le pays est confronté aux mêmes problèmes qu’en France: une régulation gouvernementale excessive et un marché du travail qui n’est pas assez flexible. De plus, les syndicats détiennent un pouvoir énorme leur permettant de bloquer toute décision qui ne leur convient pas. J’ai constaté également qu’il y a un manque de confiance entre les syndicats, le gouvernement et les employeurs. Cela dit, le secteur privé tunisien est encore assez fragile, les grandes entreprises prospères sont rares et la barrière à l’entrée pour les entrepreneurs est très haute. La transition démocratique ne se résume pas à des élections démocratiques, il faudrait renforcer le rôle de l’etat à travers des institutions de meilleures qualité, ce qui est plus difficile. Autant d’éléments qui représentent des faiblesses qui ne font que ralentir la croissance économique.
Pensez-vous qu’augmenter aujourd’hui l’impôt sur les sociétés serait une solution adéquate sachant fort bien que la tendance mondiale est de réduire ces taxes?
Il est vrai qu’aux États-unis les taxes ont été baissées avec les dernières réformes, pour passer de 35 à 21%, mais pendant de longues