L’AUTRE, L’AUTRE, L’AUTRE …
Qui est cet autre auquel je pense tout le temps, qui prend ma liberté, m’empêche d’agir comme je veux, m’empêche de prendre plaisir à faire les choses, à décider, à ressentir, à penser ? Je partirai de l’histoire de Emna qui racontait un jour : « Au fond de moi, ça me va si je passe ma vie à occuper des postes différents dans des entreprises différentes. Je découvre et je revis avec chaque aventure. Je me sens comme un papillon, légère et joyeuse… Sauf que là, je suis dans cette entreprise depuis 13 ans déjà… Je ne peux pas partir, parce que je suis une maman maintenant. J’ai des responsabilités, j’ai des enfants à nourrir. Je dois leur donner l’exemple aussi, l’exemple de la responsabilité, de la stabilité… Et puis, mon mari aussi a besoin de stabilité, il s’est senti angoissé à chaque fois que j’ai changé de travail». Je garde pour la fin que cette femme est profondément triste. Elle ne veut pas et ne peut pas le dire, encore une fois parce que les autres vont dire : « comment tu peux être triste alors que tu as tout ce dont rêve une personne de ton âge : un boulot extra avec un très bon salaire, un mari qui t’aime, des enfants, une voiture, un bel appartement… » Et un jour, elle a explosé. Elle a eu des problèmes de santé à répétition. Son corps se manifestait. Parfois, nous vivons dans une espèce d’illusion. On se crée nos propres croyances parfois aidantes et parfois limitantes. L’idée n’est pas de nous débarrasser de toutes les croyances limitantes. L’idée c’est d’en prendre conscience, de les comprendre, de nous écouter activement, d’écouter notre besoin. Emna est à l’écoute de tous ceux qui l’entourent : son boss, ses collègues, ses enfants, son mari, ses amis. C’est sa façon de faire pour exister. Et un jour, elle s’est rendue compte que souvent elle n’est pas écoutée, qu’elle ne sait pas demander, qu’elle ne s’écoute pas elle même. Elle s’est rendue compte qu’elle est gentille et que tout le monde l’apprécie, mais que personne ne voit. Elle se sent transparente dans son monde : elle se fait discrète dans les réunions de travail et personne ne demande son avis. Elle est dans cette bienveillance d’accueillir les histoires que proposent ses amis ou sa famille, elle est généreuse par ses conseils quand on vient lui demander de l’aide… Mais elle parle rarement de ce qui ne va pas chez elle. Elle est cette bonne fée, cette petite étoile qui brille et qui est inaccessible. Finalement, elle s’est rendue inaccessible en pensant trop à l’autre. Cette étoile qui semble libre et libérée est finalement prisonnière. Prisonnière de sa fonction qui est d’apporter de la lumière à l’autre. Cette bonne fée qui est illustrée dans les bandes dessinées et dessins animés par une jeune dame avec des ailes, lumineuse et rayonnante avec sa baguette magique. Cette bonne fée qui vole, qui semble libre est prisonnière par ce qu’elle fait : exécuter les rêves de l’autre. Alors, écoutez-vous activement. L’écoute active que nous apprenons dans des cours de communication sert à écouter cet autre qui me terrorise. Cet autre qui me juge, qui m’aime, qui m’accueille, qui me repousse, qui attend de moi, qui me valorise ou me dévalorise. En vrai, c’est ma façon de percevoir et d’intégrer le comportement de l’autre. C’est moi qui décide d’être cette étoile ou cette bonne fée prisonnière du « qu’en dira-t-on ?». C’est moi qui décide de m’en libérer en commençant par apprendre à m’écouter moi-même, à écouter mon besoin. Je veux agir, faire, donner, pour moi. Intégrer cette étoile à l’intérieur de moi, est juste merveilleux. Je vais briller de l’intérieur en répondant à ce que je veux, en me libérant de l’autre. Alors, allez-y. Faites, agissez pour votre libération. Aimez-vous, comprenez-vous et acceptez, accueillez la vie. Prenez du plaisir. La vie est une expérience courte. Vivons l’instant présent et occupons-nous à le croquer. De toutes les façons, l’avenir est incertain alors ne cherchons pas la vérité. Jouons, amusons-nous. Toute la vie est un jeu basé sur l’amour.
Le défi de Sofrecom Tunisie est de prendre la vague en plaçant l’homme au coeur de ses préoccupations, a signifié d’emblée Abdelkader Dali, Directeur Général Sofrecom Tunisie. Avec une moyenne d’âge de 29 ans et un taux de parité de 50%, elle a adopté pour règles d’or le partage des valeurs, l’engagement sociétal et la collaboration avec les universités. Désirant devenir un hub vers l’afrique et dépasser le cap des 700 collaborateurs : “Notre souci numéro un est de maintenir nos talents et anticiper”, annonce Abdelkader Dali. Comment ? “En pensant à demain”, dit-il. “Nous essayons de développer au maximum les partenariats avec les universités, car ce sont les talents de demain, on adopte aussi une approche inclusive, en impliquant les écoles d’ingénieurs dans les régions éloignées de la Tunisie. Le programme challenge IOT concrétise cette idée. Nous voulons être une entreprise qui donne sa chance à tout le monde”. De son côté, Hajer Almi, directrice RSE et communication, a présenté quelques outils adoptés par la filiale pour favoriser la rétention des talents, à commencer par le programme “Les Ambassadeurs de Sofrecom”. “Nous avons choisi des collaborateurs volontaires, pour animer l’image de marque de l’entreprise et améliorer sa marque employeur”. Les team building et la RSE forment également une grande partie de la stratégie. “Nous sommes très engagés dans le social, et accordons beaucoup d’importance à la solidarité, pour renforcer le sentiment d’appartenance”. Mohamed Adnene Berriche, DRH de Sofrecom Tunisie, a soulevé la nouvelle configuration qui est de rigueur aujourd’hui : “La situation est inversée, de nos jours, c’est l’entreprise qui doit convoiter l’employé. A sofrecom, nous sommes dans un modèle digital à travers des solutions “faites maison” pour améliorer notre fonctionnement et veiller à améliorer le bien-être quotidien de nos collaborateurs”. Au Royaume-uni, une enquête de l’association Engineering UK a révélé qu’il faudra près de 1,5 million d’ingénieurs qualifiés de plus en 2025. La pénurie d’ingénieurs menace l’europe entière. Appréhendant ces événements, Abdelkader Dali insiste sur la nécessité d’avoir cette culture de l’anticipation et du mindset “apprendre à apprendre”.
Pas de gestion des talents sans leadership! Pour Hichem Ketata, directeur de développement RH chez Tunisie Télécom, le premier acteur de la gestion des talents est la direction générale : “Elle doit montrer la voie, partager la vision, développer l’esprit d’équipe”. Le rôle du manager prend alors tout son poids, puisqu’à son tour, il devra engager les collaborateurs autour de cette vision : “Le manager doit donner l’occasion aux collaborateurs d’exprimer leur talent, favoriser leur mobilité, éclore l’esprit collectif, tout en restant alignés aux objectifs stratégiques de l’entreprise”. Zina Seceragic, DRH West Europe & Mediterranean Area (Benefits & Rewards) chez Sodexo, met l’accent sur l’individu et son besoin d’appartenance. Elle annonce la couleur en lançant “Nous sommes tous des talents, nous avons tous quelque chose d’unique ! ”. Pour cette passionnée des ressources humaines, nous vivons aujourd’hui à une époque où l’individu est devenu le point focal. A un moment où la question de la cohésion devient décisive pour l’amélioration de la performance, il y a lieu de fédérer les personnes à travers l’amélioration de la qualité de vie en entreprise, le partage des mêmes valeurs, développer les sentiments d’appartenance et surtout donner du sens à la mission de l’entreprise pour révéler l’utilité de chacun. Riche de son expérience à travers plusieurs pays, notamment en Europe de l’est, Zina Seceragic nous donne quelques bonnes pratiques. Elle dévoile les bienfaits de la création de communautés de managers pour développer leur appartenance à l’organisation. Elle met l’accent sur le rôle du
manager, en première ligne pour détecter les talents et comprendre les besoins. Ce dernier doit à tout prix instaurer une équité interne et la communiquer clairement, montrer l’exemple, faire preuve d’empathie et d’humilité et ne jamais se positionner en donneur de leçons !
Le référentiel des métiers, l’outil-phare pour la rétention des talents Le référentiel des métiers se pose aujourd’hui parmi les préalable de la rétention des talents. Pour Kais Allani, Directeur Général Neoxam Tunisie, la gestion des talents passe par la méritocratie, la mutualisation des connaissances, la construction d’équipe et la gestion des carrières. “A Neoxam, nous avons développé tout un référentiel des métiers et des compétences, qui nous a permis d’attirer et garder les meilleurs”. C’est un véritable outil permettant d’aligner la politique RH sur la stratégie business de l’entreprise. Mais le système ne vaut que s’il est basé sur l’échange et la communication. “Un collaborateur doit savoir où il va et en quoi il s’engage”. Les talents, si on ne les fait pas évoluer, on les perd, il faut comprendre les attentes, dialoguer, fixer des objectifs clairs, valoriser en continu le travail et surtout dresser une relation de confiance”, précise Kais Allani. “A Neoxam, on effectue les évaluations tous les trois mois sur la base de ce référentiel, ce qui permet au collaborateur de se situer dans son parcours professionnel”. Pour Nouhoum Diakite, Président de l’association Malienne des Gestionnaires en Ressources Humaines : “Les talents c’est ce qui produit la valeur ajoutée, d’où l’importance d’évaluer les risques de les perdre”. Il faut donc “baliser” les parcours professionnels, à travers les référentiels métiers, desquels doivent découler les rémunérations, développer l’employabilité au sein et en dehors de l’entreprise, favoriser le développement des carrières et la mobilité horizontale et verticale, personnaliser les offres RH, sans tout miser sur l’argent.
DG-DRH : un duo tumultueux ? Abordant la question incontournable de la relation DG-DRH, Selim Jaidane, DRH Orange Tunisie, la décrit comme basculant tantôt vers les antagonismes, tantôt vers l’harmonie. Pour ce spécialiste des ressources humaines, le DRH a une grande mission, s’adapter à son environnement : “Nous avons un métier plutôt ingrat, nous gérons des hommes ! Et le DG attend de son DRH qu’il mette en place une vision partagée, et qu’il conjugue entre les besoins des hommes et le business”. Le tout est de construire une relation de confiance, c’est la clé pour réussir cette relation. Selim Jaidane s’est alors attardé sur le plus important, le comment ? “Il faut lui montrer que nous sommes en phase avec sa stratégie”. Son expérience lui a appris qu’un bon DRH possède incontestablement ces trois sens : être orienté résultats, avoir une culture de l’amélioration continue, et l’ingrédient miracle, l’anticipation! C’est la valeur ajoutée du DRH ! Pour évoluer dans ce sens, il faut impérativement qu’il ait une connaissance des métiers et du business de l’entreprise. Sa devise nous pousse à la réflexion et la remise en cause: “Il n’y a pas de croissance durable sans vision RH à long terme ; il n’y a pas de vision RH long terme si on ne sait pas ce qu’est le capital humain”. Mais là où le bât blesse, précise-t-il, c’est que le DG, lui, veut des résultats à court terme, c’est tout le challenge des DRH ! Le positionnement du DRH ne rend pas les choses plus faciles ! Il doit être présent sur tous les fronts : il est à la fois face au DG, face aux autres fonctions de l’entreprise, mais aussi face aux partenaires sociaux ! Pour Selim Jaidane : le binôme ne peut marcher que si le DRH a le sens de l’organisation, une vision transversale, le sens du co-leadership, une grande loyauté, et savoir se préserver. Sans oublier la relation DRH-CFO : il ne faut pas mâcher ses mots, généralement ça ne colle pas ! Ce n’est pas surprenant vu leurs missions à l’un et à l’autre ! L’un doit veiller à l’équilibre humain-business, l’autre à l’équilibre budgétaire. Selim Jaidane répond à cette impasse par une séduisante plaisanterie que l’on doit à James Sale, expert européen sur le pouvoir de la motivation: “CFO to CEO : What happens if we invest in developing our people and they leave ?”, “CEO to CFO: “What happens if we don’t and they stay ?”. Selim Jaidane conclut sur une note nuancée: “DG-DRH : c’est aussi une question d’affinité, le DRH doit savoir s’affirmer, son appartenance au comité directeur est également une nécessité, mais au bout du compte, c’est le DG qui décide de favoriser ou pas ce lien”. A la conférence de clôture, Sayida Ounissi, Secrétaire d’etat à la Formation Professionnelle chargée de l’initiative Privée, précise qu’au niveau du ministère, un certain nombre d’outils sont disponibles pour les entreprises, notamment en matière de formation. Focalisant toute son attention sur l’importance de l’homme comme source de richesse, elle est d’avis que la force d’une entreprise réside principalement dans sa capacité à savoir garder et attirer les talents: “La croissance de tout le pays passe par la façon dont nous traitons celles et ceux qui constituent la force de travail, et pas seulement par les investissements étrangers; l’économie bleue peut être une alternative pour répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés”. Concluant sur la bouillonnante question du Code du Travail : “Nous n’avancerons pas sans une refonte de la législation, concernant particulièrement le Code du Travail, et j’appelle surtout les professionnels des métiers RH à soulever ce débat”. S’il y a bien une particularité féminine, c’est bien celle de constamment se dévaloriser. Amina Mezghani, coach professionnelle et formatrice spécialisée dans l’art oratoire, le leadership et l’intelligence collective, avec 20 ans d’expérience managériale à son actif, a consacré son intervention au 11ème salon HR Expo à un atelier coaching intitulé : “Booster les talents féminins par le coaching”. Le constat est indéniable: la femme a tendance à être obnubilée par le syndrome de l’imposteur. Pour cause, elle accepte un poste lorsqu’elle en a au moins 60% des compétences, tandis que l’homme accepte même à 25%! La femme a le sentiment de toujours devoir faire plus, d’où un besoin de valorisation plus important, annonce Amina Mezghani. Parlant de talent, il s’agit d’une chose que l’on fait bien naturellement, alors comment le trouver et le renforcer? Il s’agit de se questionner sur ce qui ce qui dépend de nous. Car la plupart du temps, nous nous construisons un hologramme inhibant et réprimant notre talent, et au bout du compte, nous ne sommes plus “alignés à soi”, et on agit par rapport aux autres. Libérant sa grande passion pour l’humain, Amina Mezghani évoque le rôle clé du coaching dans cette quête du talent. Elle nous dévoile que notre comportement est conditionné à 50% par nos gènes, 10% par notre environnement et 40% par nos décisions. Réveillez-vous mesdames ! Nous sommes à 40% victimes de nous-mêmes ! Sous sa casquette de coach, Amina Mezghani nous fait savoir qu’il faut agir sur ces 40%. C’est-à-dire, là où l’on a un véritable pouvoir de changement, afin de briser cet hologramme et observer notre plein talent. Le coaching, dit-elle, apporte une meilleure connaissance de soi mais on doit l’avoir choisi. Il faut avoir une meilleure connaissance de soi et savoir où on veut aller”.