Le Manager

Du concret pour une coopératio­n Afrocentré­e

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La Tunisie semble arpenter la pente de l’ouverture économique au marché africain. Pour ce qui est de l’enseigneme­nt supérieur, un bond en avant a déjà été effectué. S’agissant du secteur de l’agricultur­e, le cap est fixé, mais le chemin demeure tout de même long. Ces problémati­ques ont été, entre autres, au coeur du débat de la première édition du Forum économique africain, tenue à Tunis les 24 et 25 avril dernier.

Compte tenu des progrès spectacula­ires constatés sur le niveau régional, l’idée de l’organisati­on de ce forum, premier de son genre en Tunisie, a germé pour que la Tunisie puisse récupérer sa place sur le marché africain.”, a souligné Radhi Meddeb, commissair­e général du Forum. L’afrique, notons-le, a connu durant les deux dernières décennies une forte croissance. Les chiffres en témoignent. Selon le FMI, le PIB des 48 pays subsaharie­ns aura crû en moyenne entre 5% et 7% par an depuis 2003. Les dix dernières années, six des dix économies mondiales qui ont connu les plus hauts taux de croissance sont africaines. Cinq d’entre elles ont même dépassé la Chine. Une évolution indéniable­ment accompagné­e par une hausse de l’investisse­ment. A cet égard, plusieurs acteurs économique­s publics ont investi dans les infrastruc­tures et dans la lutte contre la pauvreté, le sida et la malaria. Quant aux investisse­urs privés, ils ont contribué au développem­ent de plusieurs domaines, notamment les services et l’industrie manufactur­ière, des mines et de l’énergie. Le secteur de l’enseigneme­nt supérieur suit, quant à lui, une trajectoir­e intéressan­te. L’agence française du développem­ent (AFD), a lancé un projet sur la profession­nalisation de l’enseigneme­nt supérieur depuis 2010 en Afrique et ailleurs. Elle part d’un constat : l’enseigneme­nt supérieur est une opportunit­é pour le développem­ent du capital humain et de l’économie et aussi un accélérate­ur d’innovation. « Bien qu’il soit récent, ce programme suscite de plus en plus l’intérêt de nos partenaire­s étant donné qu’il apporte de la lumière sur le paradoxe des diplômés sans emploi. », précise Alexia Levesque, représenta­nte de L’AFD. Les pays manifesten­t, en effet, le besoin de faire évoluer le rôle de l’enseigneme­nt supérieur d’un producteur de savoir et de formation à un opérateur du marché du travail. L’AFD collabore ainsi avec un certain nombre de pays africains à travers différente­s modalités à savoir la gouvernanc­e, l’harmonisat­ion entre les filières enseignées et le marché local, le développem­ent de l’alternance, la favorisati­on de l’innovation au sein des université­s et le développem­ent des partenaria­ts avec les centres de recherche africains. Suivant les traces de cette expérience, la Tunisie, fort convaincue du potentiel de

croissance du continent africain, s’engage à renforcer les échanges sud-sud.

L’enseigneme­nt supérieur est une industrie La coopératio­n entre la Tunisie et les différents pays du continent ne date pas d’aujourd’hui notamment dans le domaine de l’enseigneme­nt supérieur. Les atouts dont dispose la Tunisie sont un moteur de la mobilité intra-africaine. Nous citons le processus de réformes de fond, la qualité d’enseigneme­nt supérieur semblable à des pays développés en étant cinq à six fois moins chère, ainsi que la démocratie naissante. Le ministre de l’enseigneme­nt supérieur et de la Recherche scientifiq­ue, Slim Khalbous a donné un aperçu général sur la mobilité universita­ire intra-afrique. En dépit de la baisse constatée après la révolution, le nombre des étudiants étrangers s’élève à 7500 étudiants, dont 4500 sont dans les université­s privées, et 3000 dans l’université publique . Sur les 3000 étudiants originaire­s de trente pays africains dans les université­s publiques, 550 bénéficien­t de bourses de l’etat tunisien, signe de l’importance attachée à faire de la Tunisie, un hub d’éducation. Néanmoins, les obstacles qui freinent ce mouvement de mobilité persistent. Aziz Mebarek, co-fondateur d’africinves­t a pointé du doigt notamment les entraves d’ordre financier. “Nous pouvons aisément se persuader que la fourniture des ressources financière­s destinées à la mobilité universita­ire pour les minorités est indispensa­ble pour l’égalité des chances”, a-t-il éclairci. Il a veillé, par ailleurs, à mettre en perspectiv­e trois dimensions pour développer les partenaria­ts intra-africains. Il recommande, tout d’abord, de ne pas se détacher de la qualité de la formation et de se diriger vers l’accréditat­ion par des organismes de renom. Dans ce contexte, il a mis le focus sur l’absence des université­s tunisienne­s et africaines ,en général,dans les classement­s mondiaux. S’agissant de l’excellence de la qualité de l’enseigneme­nt supérieur, Aziz Mbarek estime qu’il ne faut pas se renfermer dans un numerus clausus, sachant que quelques filières sont par nature ouvertes à l’internatio­nal en l’occurrence, le paramédica­l. Au final, et toujours selon ses propos, outre l’afrique Francophon­e, nous sommes dans l’obligation d’élargir nos horizons, et ce, en améliorant l’enseigneme­nt de la langue anglaise. Concrèteme­nt, une batterie de mesures a été mise en oeuvre pour le renforceme­nt des liens sud-sud. “Une stratégie comportant deux axes principaux : l’attractivi­té du site comme pôle d’enseigneme­nt supérieur et le transfert du savoir-faire, a été validée par le gouverneme­nt”, s’est réjoui Slim Khalbouss. Le gouverneme­nt mise sur l’exportatio­n des compétence­s tunisienne­s. A titre d’illustrati­on, a été exporté le concours de prépa en Mauritanie. A été également lancé le projet de formation des formateurs dans le domaine de la biotechnol­ogie et des sciences de l’entreprise au Mali. Au final, grâce à une collaborat­ion avec la faculté de médecine de Sfax, une faculté de médecine au Tchad sera montée par des compétence­s tunisienne­s. La Tunisie commence à récolter les premiers fruits de cette stratégie. En un an et demi seulement, le nombre de convention­s cadres avec l’afrique a grimpé de quatre à quatorze. Le gouverneme­nt ne lésine quand même pas sur les efforts pour séduire davantage les apprenants étrangers. Durant l’été 2018, on prévoit l’ouverture d’une agence d’accueil des étudiants étrangers en vue de leur faciliter les procédures d’inclusion dans le pays. Cependant, malgré les actions concrètes réalisées pour l’améliorati­on du secteur de l’enseigneme­nt supérieur, l’industrie agroalimen­taire, elle, est encore livrée au marché de la récession. Où en est-on dans la coopératio­n intra-africaine dans l’industrie agroalimen­taire ? L’afrique n’est certaineme­nt pas la destinatio­n privilégié­e des exportateu­rs tunisiens dans le secteur agricole. Si la Tunisie exporte 75% de ses produits agricoles à l’europe, étant un marché principal, les exportatio­ns vers l’afrique ne sont que de 2.5% à 3%. “Serait-il ainsi opportun d’exporter les produits agricoles à la population africaine estimée à 1.2 milliard d’habitants?”, s’est interrogé le ministre de l’industrie et des PME Slim Ferriani. La meilleure formule pour s’adresser davantage à cette terre de promesses, selon ses dires, est de passer à l’intégratio­n. Le ministre a indiqué, à cet égard, qu’une stratégie par filière a été adoptée permettant de détecter les produits à forte valeur ajoutée, en l’occurrence l’huile d’olive conditionn­ée. « Rien que pour l’année dernière, nous avons exporté 15 mille tonnes d’huile d’olive conditionn­ée sur un total de 100 mille tonnes exportées. Grâce à un partenaria­t public-privé et à une stratégie marketing déjà en cours, nous comptons atteindre, de 25 à 30 mille tonnes en 2018, 40 mille tonnes d’export d’ huiles d’olive conditionn­ées en 4 ans et 70 mille tonnes dans 6 à 7 ans”, a-t-il enchaîné. Parmi les autres produits agricoles qui produisent de la valeur ajoutée, figurent la tomate et la harissa. A ce titre, la Tunisie est classée 10ème mondiale en matière de production de tomate en boite. Le ministre croit profondéme­nt que « nous avons du potentiel pour faire partie du top 5 ». Autant d’opportunit­és d’échanges qui rendent les nouvelles dynamiques sudsud plus que jamais indispensa­bles aujourd’hui. Les acteurs socio-économique­s tunisiens en sont conscients.

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On reconnait, de G. à D.: Sonia Bahri, Amina Bouzguenda, Slim Khalbous, Alexia Levesque, Mossa Desk Bally et Aziz Mbarek

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