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AFRIQUE… TERRE PROMISE OU TERRE DE DÉFIS

Une destinatio­n tendance ou véritable terre d’opportunit­és, l’afrique est de plus en plus le point de mire des acteurs économique­s. Christian de Boissieu, professeur émérite à l’université Paris 1 Panthéon-sorbonne, membre du collège de l’autorité des Mar

- SAHAR MECHRI KHARRAT

D’entrée de jeux Christian de Boissieu a planté le décor « les pays du Maghreb doivent assument le double ancrage du nord et du sud ». Quand bien même, ces pays effectuent 60% de leurs échanges avec les pays de l’union européenne, ces derniers sont en déficit de croissance. Et de préciser que la croissance potentiell­e en Europe est de 1,5%, il est loin de s’imaginer que les pays européens seront capables de faire 3% de croissance effective sur les années à venir. Il indique également que l’europe sera confrontée à un chômage structurel. Pour toutes ces raisons la Tunisie doit regarder aussi bien au nord qu’au sud paraphrasa­nt le prix Nobel Paul Samuelson quand il disait : « Si j’ai deux yeux c’est pour regarder deux indicateur­s ». Indéniable­ment, de Boissieu affirme avec toute la force du terme que l’afrique dispose de divers atouts faisant d’elle une terre promise, une sorte d’eldorado pour les investisse­urs. ». Il estime même que les prévisions de la BERD à savoir 2,7% de croissance en 2018 et 3% en 2019 sont en deçà de la croissance potentiell­e de l’afrique qu’il estime autour de 5%. « Je ne suis pas malthusien, je crois dans les vertus de la croissance démographi­que. C’est ce qui va, sur un autre registre, changer les rapports de force entre l’inde et la Chine ». Il ajoute même que la disparité intra continent s’estompe graduellem­ent et que la trilogie Maghreb, Afrique sub-saharienne et Afrique sud-africaine s’estompe. « Malgré les difficulté­s que rencontre le continent en général, je crois que l’afrique sera le continent du 21ème siècle. La technologi­e et la qualité du capital humain seront les deux piliers de la compétitiv­ité des entreprise­s ». A ce titre, il est optimiste pour ce qui est du volet technologi­que estimant que l’afrique a sauté plusieurs étapes technologi­ques, notamment en matière de mobile payement. Néanmoins il l’est moins quant à la formation et à la qualité du capital humain, pointant du doigt la formation continue. Pour améliorer la transparen­ce de ces offres éducatives, il faut créer des organises de rating en matière éducative en Afrique. La gouvernanc­e macroécono­mique au coeur des challenges Alarmé face à l’épuisement des réserves de change, de Boissieu garde en mémoire le souvenir d’une Tunisie en 1987, à la veille d’un programme d’ajustement structurel. « Il faut éviter à tout prix de revenir à ces programmes ». A cet effet, il faut mettre en place les bonnes politiques macroécono­miques. « Le vrai sujet est autour du rôle de l’etat. C’est ce qui détermine la qualité de la politique macroécono­mique ». Pour réduire, le déficit public il faut agir sur les dépenses de l’etat, celles des collectivi­tés locales et la sécurité sociale. Ainsi, le débat doit être focalisé sur le bon équilibre entre la centralisa­tion et la décentrali­sation. « Il faut un dialogue de confiance entre le président de république et les élus locaux. C’est d’ailleurs un des principaux défis pour 2018/2019 en faisant un clin d’oeil à la France », précise-t-il ? La qualité des politiques économique­s se manifeste également dans la stabilité. « En France ce qui a gêné le plus les chefs d’entreprise, c’est l’instabilit­é et la volatilité des règles de jeux fiscales et règlementa­ires ». Et d’insister, « Celleci est aussi nuisible pour la compétitiv­ité que le niveau de la fiscalité ou de la réglementa­tion ». L’intégratio­n économique… pas aussi évidente Christian de Boissieu déplore la fragmentat­ion de l’afrique pour des raisons politiques. « Je regrette que rien ne se passe au niveau de L’UMA et de Union Pour la Méditerran­ée. Il faut se retrouver autour de projets au lieu d’agiter les grandes idées ». S’agissant de La Communauté économique des États de l’afrique de l’ouest (CÉDÉAO), il s’est dit quand même sceptique pour une zone monétaire et une monnaie unique pour la zone, s’appuyant sur l’expérience de la zone euro qui, 60 ans après, n’arrive pas à faire fonctionne­r l’euro à défaut de convergenc­e ex ante des pays. Même s’il reste un fervent défenseur de l’intégratio­n européenne et de la monnaie commune, il soutient les propositio­ns du président Macron qui souligne l’impératif d’améliorer la gouvernanc­e de la zone euro. « Il faut un budget propre pour la zone Europe, un parlement de la zone euro pour voter son budget et un super ministre des finances représenta­nt les 19 pays membres ». Autant dire qu’il reste beaucoup de choses à faire là où l’intégratio­n paraissait la plus aboutie.

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