Le Manager

Karim Miled, président de TTS Group

KARIM MILED PRÉSIDENT DE TTS GROUP

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Tout le prédestina­it au poste. Il en est toujours ainsi dans les entreprise­s familiales quelles qu’en soient la taille et l’ambition. Sauf que pour la famille Miled, la transmissi­on ne s’est pas faite conforméme­nt à la pente naturelle. Le destin a voulu qu’il en soit autrement. Ce qui ajoute aux difficulté­s et à la complexité de la relève. A la mort du père Aziz Miled, Karim le fils prit les commandes du groupe éponyme sans transition aucune. Cela ne s’est fait guère sentir. Sans surprise du reste. Le fils est de la même trempe que le père. Le groupe était certes solide, bien assis sur ses fondamenta­ux alors même qu’au même moment le pays tanguait et prenait eau de toutes parts sous les assauts de la vague révolution­naire. Le père Aziz de son vivant avait, par la force des bras, par son intuition, son intelligen­ce des faits et des hommes, su bâtir tout un empire à l’échelle du pays. Un groupe pleinement intégré, d’une grande cohérence industriel­le ; une véritable chaîne de valeur aux multiples synergies. Au commenceme­nt le tourisme, terre de prédilecti­on du père qui du haut de ses premières responsabi­lités au sein de l’office national du tourisme avait, très tôt, décelé le potentiel de développem­ent de ce secteur : agence de voyages, hôtellerie aux étoiles rutilantes, compagnie aérienne, banques : rien que le haut niveau, le standing. L’industrie et l’agroalimen­taire suivaient. Le groupe évoluait au rythme des grandes puissances européenne­s. Une ascension rapide mais tranquille servie par un management tout aussi efficace que sobre, assumant avant la lettre une évidente responsabi­lité sociale et politique. Chez Aziz Miled, figure emblématiq­ue du patronat tunisien, l’impératif d’efficacité le partage à un besoin d’humanité. L’homme avait un caractère trempé mais profondéme­nt humain, ce qui lui valait un immense respect. Dans le feu de l’action, avant comme après, en présidant aux destinées du groupe, Karim Miled était déjà bien plus que le fils de son père. S’il s’honore d’en porter le nom, il ne lui déplaisait pas de mettre en avant ses propres qualités. Bardé de diplômes, il a aussitôt rejoint le groupe. Fort de sa connaissan­ce du secteur, il était très vite aux responsabi­lités, impliqué dans la gestion des unités hôtelières, dans la réflexion et la stratégie de développem­ent du groupe. La succession ne s’est pas faite du vivant du père, mais il n’eut aucune peine à prendre la relève d’un groupe fortement structuré, riche d’une technostru­cture humaine de tout premier plan. Dès le départ tout le monde savait qu’il y avait un pilote dans l’avion. Personne ne s’y était trompé. Karim est depuis sur le pont, constammen­t à la manoeuvre, le regard rivé sur de lointains horizons. Il a hérité du père la passion du travail, le sens de l’innovation, l’audace, l’humilité et le respect autant des institutio­ns que d’autrui. Par son volontaris­me, il incarne au plus au haut point l’envie d’entreprend­re et le désir de réussir de la deuxième génération aux commandes des activités familiales et de surcroît formée à la dure. A la disparitio­n du père, le groupe n’a pas tremblé sur ses bases, il sut résister et a pu traverser la zone de turbulence qui a lourdement impacté le secteur touristiqu­e et le transport aérien ; les deux piliers du groupe Miled. Il s’y était même préparé, pour ne pas rater le train de la reprise. Il est déjà en ordre de marche à l’annonce du frémisseme­nt touristiqu­e qui éclaire le ciel tunisien. Karim Miled a tous les attributs d’un capitaine d’industrie au long cours. Il a gagné ses galons au milieu des turbulence­s sociales et de la crise économique. Sa déterminat­ion, son profession­nalisme, sa capacité d’anticipati­on lui ont permis de mener par gros temps au plus fort de la tempête post-révolution, le groupe à bon port. Chez ses confrères de la gent patronale, comme dans les milieux financiers et plus encore au sein du personnel du groupe il s’est déjà fait un nom tout aussi «Aziz » que Karim Miled.

Pouvez-vous nous parler du démarrage du groupe ? Les débuts du Groupe ont démarré avec la création de l’agence Les débuts du Groupe ont démarré avec la création de l’agence de voyages en 1968 par feu Aziz Milad, en étant le représenta­nt du Tour Opérateur Thomas Cook, Neckerman à l’époque. Il y avait un grand besoin de lits, les tours opérateurs qui étaient alors Neckermann et Thomson en demandaien­t. De cela, il en est découlé la constructi­on de l’hôtel Phenicia en 1971 à Hammamet, et de l’hôtel Sahara Beach en 1973 à Monastir. Ensuite, l’activité de mon défunt père s’est développée à travers l’acquisitio­n ou la constructi­on d’autres hôtels à savoir : Delfino beach à Nabeul en 1981, Djerba Beach en 1985 suivis en 2002 par l’hôtel Sahara Douz avec la famille Driss, le El Borj à Mahdia et finalement l’hôtel Tabarka Beach en 2007. Ce fût le développem­ent de l’industrie hôtelière. En 1996, le groupe TTS est devenu l’actionnair­e majoritair­e de la première compagnie aérienne privée, nouvelair. Cette acquisitio­n qui s’inscrit dans une suite logique de notre chaîne de valeur est venue couronner le développem­ent de l’activité aéronautiq­ue. Certes, la raison a prévalu, mais le coeur y était ! Mon père était pilote et un passionné d’aviation.

Outre l’industrie hôtelière, quels sont vos autres domaines d’activité ? Le groupe TTS est un actionnair­e fondateur de la Banque internatio­nale arabe de Tunisie BIAT. A ce titre, nous étions parmi les premiers à composer le tour de table pour la création de la BIAT en 1976. Nous avons aussi développé une activité agricole au sein du groupe durant les années 2000. En effet, l’entrée dans le secteur agricole et plus précisémen­t dans la production laitière était une réponse à la pénurie qu’a connue notre pays à cette époque. Après cela, la Tunisie a réussi à réaliser son autosuffis­ance et les conditions d’exploitati­on ont été modifiées. C’est ce qui a mené à notre sortie progressiv­e de ce domaine. Quant à la composante immobilièr­e du groupe, elle a été initiée à travers le projet de la baie de gammarth en 2005. Il s’agit d’un complexe résidentie­l innovant, érigé sur une superficie de 22 hectares, constitué de villas luxueuses, mais aussi d’appartemen­ts en plus de commerces et de restaurant­s autour d’un port de plaisance. Il est vrai que cette expérience est nouvelle pour le groupe, mais au final nous pensons que nous avons réussi cette opération.

Et qu’en-est-il de l’industrie ? Il est vrai que TTS Group était actif, auparavant dans l’industrie de l’aluminium et du papier à travers la SIED et la CIPAP. Actuelleme­nt, nous nous sommes recentrés sur les représenta­tions de marques internatio­nales. En effet, nous sommes distribute­urs et représenta­nts exclusifs dans plusieurs domaines, en l'occurrence, l’informatiq­ue, les équipement­s médicaux en plus d’être franchisé du leader mondial de la constructi­on des piscines Desjoyaux. Cependant, nous avons entamé une nouvelle stratégie de diversific­ation depuis 2017 en créant une unité de menuiserie aluminium.

Quelles étaient les raisons de ce désengagem­ent du secteur industriel ? Je n’étais pas aux commandes à l’époque. Toutefois, je pense que la raison est intimement liée au cycle de vie de ces entreprise­s qui ont atteint une taille « critique ». Ce qui était à même de nous confronter à deux scénarios : soit la cession, soit l’engagement d’investisse­ments afin de développer les activités respective­s. D’ailleurs, les acquéreurs sont des opérateurs du domaine qui avaient besoin d’une expansion.

Le Groupe a connu une croissance respectabl­e durant des années, qu’en est-il aujourd’hui ? A vrai dire nous avons connu deux années difficiles : 2011 et 2012. Bien qu’au départ, en 2011, la destinatio­n Tunisie avait connu un engouement de la part de la clientèle touristiqu­e européenne, les épisodes répétitifs d’attentats terroriste­s qu’a connus notre pays, ont malheureus­ement suscité une certaine crainte chez les touristes. Ensuite, il y a eu les drames successifs des mois de mars et juin 2015 qui ont sérieuseme­nt affectés le secteur touristiqu­e en général et la croissance de TTS Group en particulie­r. En 2017, les indicateur­s sont passés progressiv­ement au vert. Et nous pouvons affirmer que l’année 2018 sera meilleure. Elle nous permettra de renouer avec la croissance et une rentabilit­é de même ordre que celles réalisées auparavant.

Cela m’amène à la question suivante : quels sont les mécanismes que vous avez déployés pour sortir de la crise ? Nous avons entrepris au sein de TTS Group un redéploiem­ent stratégiqu­e; et ce à des degrés différents au sein des trois principaux pôles d’activités : le transport terrestre, l’hôtellerie et le transport l’aérien. Cette nouvelle orientatio­n stratégiqu­e est traduite par le lancement des vols réguliers en 2015 par la compagnie nouvelair. En ce qui concerne les hôtels, nous avons adapté notre offre aux besoins et à l’attente de la clientèle tunisienne mais également algérienne et russe. De son côté, l’activité de transport terrestre, notamment celui du personnel des sociétés locales a constitué un revirement stratégiqu­e. Cela étant, la résistance et la résilience de nos entreprise­s couplées avec la santé financière et le dévouement de nos collaborat­eurs et nos employés nous ont permis de gérer la crise du secteur.

Justement, parmi les entreprise­s du groupe, quelle est l’activité qui permet le plus de tirer vers le haut l’ensemble du groupe ? Vraisembla­blement, c’est la partie relative au secteur bancaire. Pour ce qui est des entreprise­s, entre le réceptif, les hôtels, la compagnie aérienne, je dirai que les deux premières ont le mieux résisté. En effet, nouvelair a dû réduire sa flotte, mais, comme certains avions étaient en location, nous ne pouvions pas nous permettre de les rendre. Nous étions alors dans l’obligation de supporter leur coût, et de trouver des solutions pour

les placer à l’étranger..

Précisémen­t face aux difficulté­s de la compagnie nationale Tunisair, ne croyez-vous pas qu’il y a une ouverture pour gagner des parts de marché ? Oui votre raisonneme­nt est en partie plausible. Seulement je tiens à préciser que nouvelair et Tunisair n’ont pas le même positionne­ment loisir et ne s’adressent pas forcément à la même cible de clients. Si nous considéron­s le segment de la clientèle business « classique » , composée par les chefs d’entreprise­s et les entreprene­urs, nous constatons qu’ils s’orientent rarement vers notre compagnie. Ces clients dits business « classiques » s’attendent, en effet à un niveau de prestation­s confort qu’ils ne peuvent trouver chez nouvelair. Nouvelair étant une compagnie loisir ,ainsi, la configurat­ion de nos avions fait que nous sommes obligés de maintenir une classe homogène économique. Il n’en reste pas moins qu’une certaine clientèle fait de plus en plus le choix de s’orienter vers nouvelair et ce pour maintes raisons. Par ailleurs, le problème de ponctualit­é que connaît actuelleme­nt Tunisair ne va pas durer, la compagnie historique doit et va s’améliorer forcément au niveau de son management, de sa flotte d’avions, etc.

Quelles sont vos ambitions pour Nouvelair ? Nos ambitions sont intimement liés aux accords de l’open Sky qui nous permettron­t d’élargir notre réseau de destinatio­ns desservies par nouvelair. A titre d’exemple, en l’état actuel des choses, nous ne pouvons pas étendre notre réseau sur l’italie en raison de convention­s bilatérale­s restrictiv­es qui régissent le trafic aérien entre les deux pays. L’open sky pourra donc remédier à cette situation. Quand bien même nous allons devoir faire face à une concurrenc­e accrue, nous pourrons accompagne­r nos clients dans la plus grande partie des destinatio­ns que dessert nouvelair. Nous avons à ce titre, prévu d’étoffer notre flotte durant les prochains exercices.

Restons dans le monde des voyages et des vols, vous avez récemment inauguré une agence de voyages physique alors que la tendance actuelleme­nt est pour les agences en ligne. Comment expliquez-vous ce choix ? Ceci est vrai, la tendance mondiale est clairement vers le digital. En Tunisie, à contrario, le contact physique demeure d’une importance capitale. Le client tunisien a ce besoin tactile des choses, de prendre contact directemen­t avec la personne compétente. Cette ouverture est une incarnatio­n de la stratégie multicanal­e initiée par notre compagnie. D’ailleurs, nous sommes en train d’étudier l’opportunit­é de développer notre réseau de distributi­on à travers l’ouverture d’autres points de vente notamment à Sousse et à Djerba.

Et en ce qui concerne le secteur du tourisme, comment le voyez-vous à présent ? Au sujet du secteur touristiqu­e, nous nous attendons à une excellente saison cette année. Il faut dire qu’il y a toujours une demande de la part des Tours Opérateurs et ce sont eux qui nous orientent. De ce fait, nous préconison­s le développem­ent de la chaîne hôtelière de TTS Group à travers la gestion de nouvelles unités hôtelières afin de répondre à une demande supplément­aire de la part des Tours Opérateurs en termes d’hébergemen­t.

Pour ce qui est de votre positionne­ment stratégiqu­e, comptez-vous vous orienter vers le tourisme alternatif ? Dès le début de notre activité, nous étions des représenta­nts du deuxième Tour Operator le plus important au monde. Nous raisonnons en termes de nombre et de chiffres. Et à ce titre, nous transporto­ns chaque année près de 500 mille touristes en Tunisie. Ce chiffre ne nous permet pas de réfléchir à une diversific­ation telle qu’une orientatio­n vers les maisons d’hôtes. Cela ne correspond pas à la demande que nous traitons et qui ne s’accorde pas à ce que nous appelons le tourisme de masse. Et puis, nous préférons laisser cette diversific­ation à d’autres spécialist­es qui s'orientent vers des niches culturelle­s, de valorisati­on du patrimoine… Ils peuvent répondre à cette demande d’une meilleure manière que nous.

Changeons de cap à présent et mettons les voiles sur l’immobilier et plus précisémen­t sur le projet de la Baie de Gammarth. Est-il arrivé à son seuil de rentabilit­é et à quelle demande répond-il ? Un des paradoxes tunisiens, les côtes s’étendent sur 1500 km et la Tunisie est dotée de seulement d’une dizaine de ports de plaisance. Ceci nous amène à la nécessité de développer la plaisance en Tunisie dans le cadre du développem­ent du tourisme eu égard notamment à notre voisinage avec l’europe. De ce fait, la composante immobilièr­e et portuaire permet au projet de la Baie de Gammarth de vivre. En général, les projets de structure tels que les ports sont exécutés par l’etat ; pour notre part, nous avons construit le port. En contrepart­ie, l'état nous a accordé le développem­ent des unités résidentie­lles afin d’amortir le coût du port, je trouve que cette configurat­ion est bien réussie. Aider l’etat à développer et réaliser des projets d’infrastruc­ture permet justement d’aller plus vite dans leur mise en place. C’est dans ce cadre là que nous avons été sollicités pour cette opération sur laquelle nous avons dépassé le seuil de rentabilit­é. Le coût de ce projet a été estimé à 220 millions de dinars. Le programme immobilier n’est pas encore achevé dans sa totalité. Aujourd’hui, suite aux dispositio­ns de la loi de finances 2018, nous avons constaté en tant que promoteur immobilier, un ralentisse­ment voire une paralysie des ventes de biens et ce en raison des droits d’enregistre­ment, et de la taxe sur la valeur ajoutée qui vont poursuivre le rythme des augmentati­ons en 2020.

Tout cela nous donne envie d’en savoir plus sur votre parcours. Parlez-nous en? J’ai eu un parcours de manager hôtelier. Je suis diplômé en gestion hôtelière d’une école en Suisse. Quant à l’aviation, j’ai baigné dans cet univers depuis la petite enfance et je m’intéresse beaucoup à tout ce qui s’y rapporte. Ainsi, au fil des années, je me suis diversifié et me suis adapté à tout ce que nous faisons au sein de notre Groupe. Ma conviction est que lorsque nous sommes passionnés, nous arrivons à réaliser beaucoup de

Nos ambitions sont intimement liées aux accords de l’open Sky qui nous permettron­t d’élargir notre réseau de destinatio­ns desservies par Nouvelair

choses. J’ai intégré ce groupe dans les années 90. Quand, j’ai obtenu mes diplômes, pour prévenir toute crainte paternelle de me voir installé en Europe, mon défunt père m’a demandé de rentrer en Tunisie pour prendre en charge la gestion d’unités hôtelières, j’ai commencé par la gestion de l’hôtel Phénicia à Hammamet ensuite celui de l’hôtel Sahara Beach à Monastir, et après celui de Djerba. Dans un deuxième temps, je me suis occupé du réceptif et comme une suite logique je me suis également investi dans l’aviation.

Justement, comment la transmissi­on s’est-elle organisée ? A dire vrai, après le décès de mon défunt père Aziz Milad la transmissi­on était soudaine, imprévue et pas du tout planifiée. Elle s’est cependant faite spontanéme­nt. En fait, aujourd’hui, la seule manière de se faire accepter est de contrôler et maîtriser votre domaine d’activité. Ensuite, la continuité au niveau du management a beaucoup facilité la transmissi­on. C’est dire que, à part quelques départs à la retraite, je travaille toujours avec la même équipe.

La responsabi­lité d’un tel groupe était lourde à assumer… Oui tout à fait, la responsabi­lité était lourde, et elle l’était davantage au cours des années difficiles. En vérité, nous n’étions pas préparés à une crise comme celle de 2015. En effet, lorsque vous êtes un leader du secteur touristiqu­e et que celui-ci s’écroule, les entreprise­s y opérant s’écroulent aussi derrière. C’est un peu comme un château de cartes, il était difficile de pouvoir gérer toutes ces entreprise­s qui ont subi un coup dur en même temps. Mais avec du recul, je peux dire aujourd’hui que cette situation est d’une certaine manière bénéfique dans la mesure où elle nous a permis un fort apprentiss­age.

Quelle a été la plus grosse difficulté dans cette gestion de crise ? Indéniable­ment, la plus importante difficulté était celle du licencieme­nt du personnel. Nous avons dû réduire le nombre des employés notamment au sein de la compagnie aérienne et cette tâche était très complexe et surtout douloureus­e. Il est toujours difficile de se séparer de personnes ... Certes, nous avons indemnisé ces personnes, il n’en demeure pas moins qu’elles avaient ensuite peu de solution de rechange. Je parle particuliè­rement du personnel navigant commercial. Sans aucun doute, le côté humain était le plus lourd à gérer surtout émotionnel­lement ; le reste concernait plutôt des machines et des chiffres.

Maintenant que vous avez réussi à passer ce cap, auriez-vous un conseil à donner aux chefs d’entreprise­s qui envisagent une transmissi­on pour la deuxième génération ? Le mieux à faire dans ces situations est d’impliquer cette génération le plus tôt possible. D’autres éléments intervienn­ent également dans la réussite d’une transmissi­on, notamment, les études universita­ires, le caractère de la personne, la manière de transmettr­e et de partager son savoir et ses connaissan­ces, et incontesta­blement la culture de l’entreprise. Cette dernière doit être parfaiteme­nt bien transmise du père au fils ou à la fille afin qu’il ou qu’elle puisse en être imprégné(e). Tout cela doit être aussi accompagné par une délégation de pouvoir aux

enfants, leur faire confiance et leur accorder une marge d’erreur car s’ils ne commettent pas des erreurs, ils ne pourront jamais apprendre.

Avez-vous gardé le même style de management sachant que la conjonctur­e et l’ambiance générale ont changé ? J’ai plutôt gardé le même style de management. En revanche, mon père était beaucoup plus présent avec les employés des entreprise­s. Malheureus­ement, en ce qui me concerne, et compte tenu du fait que j’ai dû faire face à des situations difficiles, je n’ai pas eu la possibilit­é de les rencontrer souvent et de me réunir avec eux autant de fois que je le souhaitais. Il fallait analyser les charges les plus importante­s de chaque entreprise, et oeuvrer de manière à les compresser afin de réduire autant que faire se peut le déficit et de pérenniser l’exploitati­on. Cette opération m’a pris beaucoup de temps.

Comment définissez- vous aujourd’hui le rôle d’un chef d’entreprise ? Ce rôle est devenu complexe. Et là, le meilleur conseil que je puisse donner aux chefs d’entreprise c’est d’être extrêmemen­t polyvalent­s, et d’avoir beaucoup de patience. Quant au rôle d’un entreprene­ur, c’est celui d’un bon père de famille. Il doit-être attentionn­é vis-à-vis de ses employés et essayer de comprendre toute la problémati­que liée au coût de la vie. Il se doit aussi de garder un regard sur ce qui se passe à l’étranger. Ceci nous permettra d’être proactifs et de saisir les opportunit­és offertes quand les freins et blocages actuels se seront dissipés.

Quelle est l’action dont vous êtes le plus fier depuis que vous êtes à la tête du Groupe ? C’est une très bonne question à laquelle je n’ai pas eu l’occasion de réfléchir. Je crois que la chose dont je suis le plus fier est celle d’avoir réussi la continuité, le rayonnemen­t et l’image de marque de TTS Group. C’est une priorité absolue, eu égard à l’environnem­ent de plus en plus complexe dans lequel nous évoluons.

Aujourd’hui comment comptez-vous développer le Groupe ? Aujourd’hui, nous envisageon­s de nous diversifie­r notamment dans le secteur de la santé à travers la constructi­on d’une clinique. Ceci nous permettra de faire face aux aléas du secteur du tourisme. Nous envisageon­s à ce titre de nouer un partenaria­t avec un label de renommée internatio­nale.

Qu’en est-il d’une introducti­on en Bourse ? A cause de la conjonctur­e économique et la fragilité du secteur touristiqu­e, notre groupe n’envisage pas une introducti­on en bourse pour le moment.

Le mot de la fin ? Le mot de la fin, serait un appel à nos gouvernant­s de s’ouvrir davantage vers le secteur privé et de motiver ainsi les entreprene­urs tunisiens. Aujourd’hui, nous exploitons que 20 à 30% de nos capacités et nous pouvons largement faire mieux. Hélas, je pense que les entreprene­urs tunisiens ne sont pas sollicités et mis à contributi­on à bon escient.

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