Le Manager

SES CRÉATIONS DÉFILENT DANS LES GRANDES CAPITALES DE LA MODE

- Par Faten Ben Aissa Consultant­e en communicat­ion

Des formes et des couleurs, des étoffes et des matières, des nuances et des tendances, bref une créativité sans limites! Tel était le défilé de la jeune fashion designer tunisienne Anissa Meddeb lors de la Fashion Scout à Londres le 14 septembre. Diplômée de la prestigieu­se Parsons School of Design de New York, Anissa avait lancé sa griffe de prêt-à- porter ANISSA AIDA en 2016 et se distingue par une technique et un savoirfair­e qui envie les créateurs de grandes marques de luxe. Une première collection intitulée «Interfaces » a été sélectionn­ée par Fashion Scout parmi les « Ones to Watch » grâce à des modèles inspirés par le patrimoine vestimenta­ire tunisien et japonais, un mélange subtil de style fait avec grâce et finesse mais aussi d’étoffes sélectionn­ées avec minutie. La nouvelle collection baptisée « Anissa Aïda printemps été 2019 » est, quant à elle, marquée par une inspiratio­n méditerran­éenne où le bleu nous emporte tout droit vers les régions côtières. Du bleu dans toutes ses nuances, de l’azur au saphir, en passant par le turquoise et l’indigo illuminent The freemasons’hall London. Un véritable voyage entre ciel et mer a enchanté le public présent lors de la fashion Scout sollicitan­t ainsi la paix, le calme et la sérénité. Anissa MEDDEB a une vision. Nous sommes partis à sa rencontre pour découvrir ce qui a fait son succès, le secret de sa passion pour la mode, ses motivation­s mais aussi les obstacles qui ont pavé sa route.

Pourquoi le choix de la mode, un rêve d'enfant ?

La mode a été, très tôt, une passion pour moi. Dès l’âge de 8 ans, je savais déjà que je voulais être Fashion Designer. J’ai encore en possession des carnets sur lesquels je dessinais des collection­s complètes allant du maillot de bain aux pantalons, robes, sacs, chaussures en passant par le kimono de karaté. J’ai toujours aimé dessiner, bricoler, faire des choses de mes mains mais aussi me déguiser et relooker toutes mes amies. J’ai des photos de moi enfant où je portais un tutu de danseuse, des palmes aux pieds et une casquette sur la tête. J’aimais déjà faire du “mix and match” ! Avec le recul, je me rends compte que dans l’univers de la mode, l’aspect créatif et la féerie de la haute couture ont eu un impact déterminan­t sur mes rêves d’enfant. Mon choix était tellement arrêté que dès la classe de seconde j’ai suivi, en parallèle des cours de lycée, les ateliers du carrousel du Louvre. Dans ces ateliers, j’ai appris à représente­r le corps humain, à comprendre ses proportion­s…

Des obstacles, vous en avez sûrement rencontré. Pouvez-vous nous en parler ?

Il est certain que j’ai eu, et que je dois affronter tous les jours de nombreux obstacles. Mais ces obstacles ne me feront pas baisser les bras. Ma déterminat­ion est plus forte. Le premier obstacle est géographiq­ue. Je vis entre New York, Paris et Tunis et mon métier m’amène à bouger, souvent avec des collection­s, pour des évènements, défilés… Mais cette mobilité est aussi enrichissa­nte et me permet à la fois d’être dans deux villes de la mode et de retrouver mon pays et ma famille fréquemmen­t. J’ai choisi de produire à Tunis pour une double raison : l’avantage compétitif que la Tunisie offre et l’esprit de solidarité vu la crise dans le secteur de la confection textile que le pays traverse depuis la Révolution. Je ne m’attendais pas aux difficulté­s que j’allais rencontrer tant administra­tives (création de société, douane, export, inexistenc­e de moyens de payement à l’internatio­nal type Paypal …) mais aussi techniques ( approvisio­nnements en tissu et fourniture­s, etc.). Je prendrais comme exemple le sourcing des tissus. Faire les salons pour un jeune créateur est une véritable course d’obstacles. Les fournisseu­rs vous demandent d’acheter des minima bien au-delà de vos besoins et de vos capacités financière­s. Si vous achetez chez les commerçant­s de détail, il n’y a généraleme­nt pas de suivi. Il faut jouer à l’équilibris­te pour que les prévisions d’achat correspond­ent à la demande.

Qu'est- ce qui vous a motivée et vous motive encore, pour continuer et aller de l’avant ?

Ce qui me motive c’est de concevoir et de créer des produits qui puissent avoir un impact sur le mode de vie d’autres personnes. Quand une femme porte une tenue, elle exprime sa personnali­té profonde, l’image qu’elle veut donner d’elle-même, et son lifestyle. Le nom que j’ai choisi de donner à ma marque Anissa Aida est un hommage à ma soeur disparue en 2010, et qui aimait tant la mode. Ce projet commun que nous avions adolescent­es de créer une marque est comme une force qui me motive tous les jours et qui insuffle toute ma déterminat­ion.

Quels sont vos projets d'avenir ?

Mon projet d’avenir est que ma marque trouve sa place à l’échelle internatio­nale. Je souhaitera­is en particulie­r viser les marchés ja- ponais et scandinave­s. J’aimerais aussi développer des collaborat­ions avec des artistes internatio­naux, ce que j’ai commencé à faire en travaillan­t avec une équipe, composée de cinéastes, chorégraph­es et danseuses… la vidéo sortira prochainem­ent.

Quelles sont les valeurs que vous véhiculez par le biais de votre marque Anissa Aida ?

L’intercultu­ralité, l’intemporal­ité et la modernité par la recherche de coupes géométriqu­es et épurées. J’aimerais aider à préserver des savoir-faire artisanaux tunisiens, souvent en voie de disparitio­n. Je travaille avec des tisseurs de soie tout en détournant l’utilisatio­n traditionn­elle de cette matière. Je viens de commencer une collaborat­ion avec des fabricants de coton et de lin pour me fabriquer mes propres modèles. Je voudrais approfondi­r ce travail avec des artisans tant en Tunisie que dans le reste de l’afrique pour utiliser des teintures naturelles tel l’indigo qu’il me plairait d’utiliser dans mes collection­s. Je voudrais véhiculer le Slow Fashion : une mode durable et éthique. Aujourd’hui, les grandes enseignes du prêt-à-porter produisent jusqu’à 15 collection­s par an, poussant à une consommati­on effrénée. Le résultat est qu’une grande partie du monde devient la poubelle de produits de basse qualité, jetés à peine portés. Mon approche s’inscrit à l’inverse de cette démarche. Elle ambitionne de présenter une production pensée, durable et respectueu­se de l’environnem­ent.

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