Certification, le périple des PME africaines
Fait non propre à la Tunisie, les PME africaines, qui représentent plus de 90 % des entreprises et emploient près de 60 % des travailleurs, sont l’épine dorsale de l'économie africaine. Leur rôle est d’autant plus déterminant que la population active d’ici 2050 se verra accueillir près de 900 millions d'africains. Mais l'accès aux marchés internationaux, qui passe notamment par la conformité aux normes internationales pour leur permettre l’intégration dans les chaînes de valeur mondiales, leur pose encore un sérieux défi. On entend par là, la faible certification des PME qui leur coûte aujourd’hui très cher. En 2018, le Centre du commerce international (ITC) et la Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones (CPCCAF) ont dressé le tableau en menant une étude sur les taux de certification, l’accès à l’information sur les normes et les infrastructures de certification dans 15 pays d’afrique. 9396 entreprises ont été interrogées. Focus.
Aujourd’hui, l’heure n’est plus au choix ! Les entreprises certifiées fournissent des produits de meilleure qualité. Cette reconnaissance leur permet l'accès à de nouveaux marchés et investisseurs. Mais l'accessibilité et le coût de ces démarches déterminent souvent la facilité avec laquelle les PME obtiennent les certificats requis pour échanger à l'international.
Exportation vs certification
Sans surprise, plus l'entreprise est grande, plus elle a de chances d'exporter et d’être certifiée. L’étude révèle que la certification va de pair avec le statut d'exportation. Seules 9 % des micro-entreprises vendent leurs produits et services à l'étranger, contre 25 % pour les petites entreprises, 35 % pour celles de taille moyenne, et 47% pour les grandes sociétés. Seul un quart des entreprises interrogées détiennent des certificats reconnus internationalement. La plupart de ces entreprises ont un certificat soit de qualité, soit de sûreté. Les petites entreprises ont souvent de la peine à supporter les coûts financiers, administratifs ou autres associés à l'obtention et au maintien d'un certificat. Elles citent des délais dans les processus, avec les frais et coûts que cela entraîne, ainsi que des centres de test limités, et parfois même inadéquats, pour leurs produits. 55 % des ex-
portateurs détiennent un certificat international et seuls 21% des non-exportateurs en possèdent un. Etre certifié augmente la valeur à l'exportation d'une entreprise et la diversité géographique des exportations, quel que soit le secteur, mais en particulier dans les services et l'agriculture. Mais la plupart des entreprises sont confrontées aux exigences des barrières non-tarifaires à l’export, exigeant des normes et des certifications contraignantes pour leurs activités d’exportation. C’est le cas d’une grande majorité d’entreprises du secteur agricole. Seules 7 % des entreprises du secteur agricole exportent. Parmi elles, plus de 70 % des exploitations détiennent un certificat. La conformité aux normes sanitaires est souvent obligatoire pour exporter des produits agricoles. Accroître le nombre d'exploitations agricoles certifiées pourrait donc stimuler le nombre d’exportateurs, recommande l’étude.
Le talon d’achille des PME: le manque de moyens et d’informations
Les entreprises de toute taille font état d'un accès limité aux informations, un des piliers de la démarche de certification. La certification implique souvent la participation de plusieurs institutions, et de rassembler toute la documentation. Mais les informations s ur l es n ormes e t l es processus d e c ertification n e sont p as i mmédiatement d isponibles. Les micro-entreprises sont les plus lésées d’où leur faible taux de certification. La disponibilité de l’information est la plus faible en Afrique Centrale, suivi de l’afrique de l’ouest et du Nord. Les exploitations agricoles affirment avoir un accès particulièrement limité aux informations sur les normes. D’ailleurs, le secteur agricole compte le moins d'entreprises certifiées, et 70 % des entreprises font état d'un accès très limité aux informations. Le faible niveau de connectivité en zones rurales, dans de nombreuses régions d'afrique, constitue un frein à la diffusion de ce type d'information, cite l’étude. Dans les pays qui comptent davantage d’entreprises certifiées, celles-ci estiment avoir un meilleur accès aux informations. Les institutions d'appui au commerce et à l'investissement ont un rôle crucial à jouer ! Elles peuvent aider à diffuser des informations de haute qualité sur les normes en mettant en place des guichets uniques pour les PME, recommande l’étude. Mais aussi s'assurer que les normes ne deviennent pas des mesures non tarifaires déguisées. Les portails de normes et autres sites Internet qui agissent comme des guichets uniques pour les entreprises, et les aident à trouver ou mettre à jour les informations pertinentes sur les normes, peuvent contribuer à alléger le fardeau des entreprises, et en particulier celui des PME.
Les infrastructures qualité ne ménagent pas les PME
L'évaluation que donnent les PME des infrastructures qualité, telles que les agences nationales de normalisation, les organismes d’évaluation de la conformité, ainsi que les organes d'accréditation, est d'un niveau plus faible que les grandes sociétés. L’étude précise que les grandes entreprises sont mieux positionnées pour tirer parti des services offerts, ou que ces services sont mieux adaptés à ces grandes firmes, qui ont une plus grande influence et peuvent dédier davantage de ressources humaines et financières aux processus de certification. Quelle que soit la taille de l'entreprise, toutes considèrent que les coûts de certification sont élevés. Les sociétés d'afrique centrale font part de coûts particulièrement élevés, ce qui peut expliquer leur faible taux de certification, si on les compare à d’autres régions. De meilleures infrastructures qualité sont aussi plus chères. En matière de certification, l'afrique de l'ouest semble offrir le meilleur rapport qualité-coûts. Les coûts sont les plus élevés en Afrique du Nord, où la qualité est aussi évaluée comme la meilleure, tandis qu'en Afrique de l'est, coûts et qualité sont perçus comme étant au plus bas. Les organismes de certification d'afrique de l'est ont les meilleurs taux de performance en termes d'efficience. Les pays de ce coin du continent collaborent depuis 2001 pour harmoniser leurs normes et réglementations techniques. Ce qui permet aux PME de réduire leurs coûts, puisque la conformité à une norme nationale implique la conformité aux normes étrangères harmonisées. En bénéficient les organismes de certification grâce au partage de leur expérience, des équipements et des centres de test.