Où en est la politique verte dans la Tunisie "verte" ?
Dans un pays importateur de pétrole comme la Tunisie, la question de l’énergie est censée être au coeur du plan de développement de l’exécutif. De même, les industriels doivent également oeuvrer à réduire leurs factures énergétiques par le biais d’investi
L’environnement compte, réellement, peu Prenons par exemple un secteur polluant, le ciment. Le coût de l’énergie est un élément très important dans cette industrie. Rappelons que le secteur bénéficiait des subventions de l’etat en matière d’énergie mais devrait, en contrepartie, servir le marché local en priorité. La demande des industriels était de libérer les exportations, et l’etat leur a accordé cet avantage tout en mettant fin à ses subventions énergétiques. Mais dans un contexte de chute de la demande des marchés limitrophes, la vie des cimentiers est devenue difficile. Prenons le coût de l’énergie de Carthage Cement pour les six premiers mois de 2018 : 33,552 millions de dinars contre 15,289 millions de dinars sur la même période en 2017. D’autres cimentiers ont fait le choix d’installer des ateliers d’exploitation de coke de pétrole. Pour ceux qui ne le connaissent pas, Le coke de pétrole (ou petcoke), est l’un des résidus du raffinage utilisé comme combustible dans les centrales thermiques, les raffineries et les cimenteries. Néanmoins, ce coke de pétrole est très polluant. Selon les spécialistes, comparativement au charbon, le petcoke émettrait de 5% à 10% plus de CO2 pour la même quantité de ciment produite. La combustion de coke de pétrole entraîne également des émissions importantes d’oxyde d’azote et de dioxyde de soufre, extrêmement toxiques pour la santé. Le coke de pétrole contient des volumes significatifs de métaux toxiques émis sous formes de particules, qui sont le nickel et le vanadium. Ces particules peuvent occasionner des problèmes cardiaques et respiratoires. Au niveau mondial, la tendance est l’utilisation des carburants de remplacement. Il y a même des combustibles dont les cendres qui en résultent peuvent être incorporées dans le clinker sans altérer le produit fini. C’est le cas du recyclage des plastiques et des pneus usés. Cela permet de réduire la consommation de ressources et la pollution. Malheureusement, en Tunisie, nous restons encore loin des standards internationaux en la matière.
Des exceptions sont là Le Gouvernement travaille à une réduction de l’ordre de 17% des besoins en énergie primaire d’ici 2020 et de la porter au double à l’horizon 2030. Il vise également une baisse de 48% des émissions de gaz à effet de serre à la même échéance. C’est un objectif très ambitieux étant donné la dépendance de l’économie tunisienne des combustibles fossiles, en particulier le gaz. Pour atteindre ces objectifs, l’etat a créé en 2014 le Fonds de la transition énergétique et a promulgué une loi relative à la production d’électricité à partir des énergies renouvelables en 2015. L’efficacité énergétique est un thème qui commence à attirer l’attention des industriels, mais sa mise en pratique nécessite des investissements importants. Actuellement, quatre grandes entreprises tunisiennes se sont engagées dans la réduction de la consommation d’énergie, avec le soutien de L’agence de développement allemande GIZ. Parmi les sociétés bénéficiaires, nous trouvons la SFBT et SOMOCER.
Le Plan solaire tunisien (PST) reste encore une fiction La Tunisie dispose d’un programme très ambitieux, le Plan solaire tunisien (PST). C’est le plan opérationnel qui devrait permettre d’atteindre les objectifs de la politique de transition énergétique. Le PST vise à porter la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité de 3% en 2016 à 30% en 2030, avec un objectif intermédiaire de 12% en 2020. Le début serait avec une capacité additionnelle de 1000 MW renouvelables. En avril 2018, le Gouvernement a lancé une dizaine de productions d’électricité à partir de l’énergie solaire, destinées au secteur privé, d’un coût total de 200 millions de dinars. Mais de tels montants sont loin être suffisants pour atteindre de tels objectifs. La mise en oeuvre du PST nécessite une enveloppe de 4800 millions d’euros, soit près de 16 milliards de dinars. Il est évident que le PPP doit jouer un rôle fondamental à ce niveau. Les conditions financières de l’etat tunisien, incapable de prendre une décision d’augmentation salariale, ne lui permet pas de mettre le paquet sur un tel projet. D’ailleurs, il y a un sentiment que le dernier souci de l’exécutif actuel est la question de la transition énergétique. A deux semaines seulement du coup d’envoi de la COP 24 en Pologne (du 3 au 14 décembre), la Tunisie n’a pas désigné sa délégation participante à cet événement.