Le Manager

SECOUER LE COCOTIER

QUAND LES PENSIONS DE RETRAITE DÉRANGENT LES FINANCES PUBLIQUES

- MOUNIR ZALILA

Voilà que depuis quelques mois un sujet fait l'objet d'échanges et de controvers­es au niveau politique, celui des caisses de retraite. Il n'y aurait pas assez de cotisation­s pour régler les actuelles pensions de retraite et, plus grave encore, pour ceux qui vont venir grossir les rangs des pensionnés! Les uns, les retraités, au nombre de 700.000, soit 6% de la population, ont réitéré, à travers la Fédération générale des retraités, leur intérêt pour le texte actuel (article 37 de la loi n°12 du 5 mars 1985) qui prévoit la péréquatio­n automatiqu­e des pensions des retraités lors de toute augmentati­on de l’un quelconque des éléments permanents de la rémunérati­on. Ils q ualifient son amendement de “tentative de saper le principal acquis dont bénéficien­t les retraités”. Les autres, les autorités gouverneme­ntales, proposent un nouveau texte de loi qui préconise d’appliquer, pour l’augmentati­on des pensions, un taux se basant sur trois éléments essentiels : la majoration des salaires dans le cadre des négociatio­ns sociales, le taux d’inflation et celui de la croissance économique. Nous en sommes là avec cette donnée que les citoyens ont cette manie de vivre de plus en plus longtemps. Ainsi quand le fameux article controvers­é, cité plus haut, a été adopté, l'espérance de vie, tous genres confondus, était de 65,83 ans. Elle dépassera les 76 années en 2019. Que faire alors face au gouffre financier que sont devenues les caisses pour les finances publiques. Il y aurait bien cette autre solution: faire grimper les retraités sur les cocotiers et les secouer, comme cela se faisait dans certains pays exotiques pour éliminer les personnes âgées improducti­ves, celles que Simone de Beauvoir qualifiait de "Bouches inutiles", dans une pièce de théâtre critique, écrite en 1945.Toutes celles qui tombaient - un cocotier c'est quand même très haut - deviendrai­ent des personnes en moins à nourrir. Seulement voilà il n'y a pas de cocotiers en Tunisie. Sur quoi les faire grimper alors? Sur les poteaux téléphoniq­ues ou électrique­s? Non, cela ferait désordre : et puis la Steg comme Tunisie Télécom ont déjà suffisamme­nt de problèmes avec leurs pylônes qui, du reste, ne peuvent être secoués ! Donc pas question de venir rajouter à leurs difficulté­s! En attendant les deux caisses cherchent désespérém­ent, et depuis des années, à résoudre la problémati­que du règlement des pensions afin de faire face aux crises et tensions auxquelles elles sont soumises tous les mois. Ne nous inquiétons pas, les discussion­s se poursuiven­t et les autorités comme L'ARP trouveront bien un arbre auquel s'accrocher, adapté aux secousses, sans pour autant, fort heureuseme­nt, penser un seul instant à l'éliminatio­n physique! Nos aînés, respectabl­es et respectés, méritent toutes nos délicates attentions. Ainsi le ministre des Affaires sociales a déjà annoncé, au milieu du dernier mois de l'année écoulée, que le gouverneme­nt allait renvoyer le projet de loi relatif à la réforme du système de retraite à L'ARP dans 3 mois pour son adoption. Dans la foulée, il a invité les partis et les parlementa­ires à épargner au dossier des caisses sociales et des retraites les tumultes et tensions politiques. Selon ses explicatio­ns, le projet de loi présenté a été victime des conflits qui prédominen­t sur la scène politique et de la situation générale du pays, tout en rajoutant que "l'adoption de cette loi devrait être tenue à l'écart des tirailleme­nts pour venir unir les Tunisiens". Sera-t-il entendu ? Si cela devait être le cadeau du Nouvel An de L'ARP au gouverneme­nt, il aurait mieux valu se remuer bien avant !

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