Le Manager

La Finance apporte beaucoup aux caisses de l’etat

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Dès que la situation de la finance publique est évoquée, tout le monde s’insurge contre les gains excessifs des banques, comme si ces dernières sont les responsabl­es du calvaire de l’etat. Ces critiques sont plus intenses avec la montée en flèche des taux d’intérêt. Néanmoins, personne n’évoque le retour en termes d’impôts. Il ne faut pas oublier que les établissem­ents financiers sont, et resteront, une vache à lait en matière fiscale.

Malheureus­ement, les sociétés en Tunisie respectent rarement le minimum requis en matière de communicat­ion financière. Jusqu’à la rédaction de ces lignes, seuls 28 établissem­ents financiers entre banques, compagnies d’assurances, brokers et loueurs ont publié du moins leurs comptes sociaux. La série est donc encore longue, mais les premiers chiffres donnent déjà une idée claire sur la tendance. L’impôt sur les sociétés (IS) relatif à l’année 2018 et payé par ces 28 établissem­ents a atteint 477,131 millions de dinars, contre 393,638 millions de dinars l’année dernière. C’est une croissance de 21,2%, ce qui constitue une performanc­e. Rappelons que dans le budget de l’etat pour 2019, L’IS est estimé à 3,044 milliards de dinars (2,846 milliards de dinars en 2018). Ces 28 établissem­ents ont déjà assuré 15,6% de L’IS à collecter. La contributi­on de l’ensemble de l’industrie financière devrait dépasser la barre des 20%.

Les banques largement en tête

Les banques sont la locomotive de cet impôt. Les 14 banques qui ont publié leurs comptes ont payé 430,505 millions de dinars. D’ailleurs, il s’agit de l’essentiel de L’IS à collecter auprès du secteur. Le reste du système bancaire paierait moins de 15 millions de dinars (un peu plus de 10 millions de dinars au titre de l’année 2017). Ici, la "bonne nouvelle" est que la hausse des taux a permis aux banques d’améliorer leurs résultats et donc la recette revenant à l’etat. Mais en contrepart­ie, c’est loin d’être le cas pour le leasing. Si les banques ont encore de la marge pour rester profitable­s en équilibran­t leurs coûts de ressources grâce aux dépôts non rémunérés, les loueurs n’ont pas cette option. L’écart entre le taux excessif et le coût de ressource est devenu tellement faible que le new business est devenu non profitable. Conséquenc­e : les bénéfices opération

nels se sont rétractés et par conséquent l’impôt, bien que ce dernier comprenne la Contributi­on Sociale et de Solidarité (CSS). L’IS est passé de 31,497 millions de dinars en 2017 à 28,808 millions de dinars en 2018, soit un recul de 8,5%. Selon la tendance actuelle, les bénéfices risquent encore de fondre davantage et la recette revenant à l’etat également. Pour les assureurs, nous pensons que l’améliorati­on serait limitée dans la mesure où l’année a été relativeme­nt sinistrée. Pour le moment, seules 5 compagnies ont publié et donc il est encore tôt de juger la recette du secteur.

Davantage d’impôts en 2020

Mais L’ARP a décidé, aux arrêts de jeu de l’adoption de la Loi de Finances 2019, de soumettre certaines entreprise­s, comme les établissem­ents financiers et les compagnies d’assurances à une nouvelle contributi­on exceptionn­elle de 1% de leur chiffre d’affaires. L’entrée en vigueur de cette taxe est prévue pour le 1er janvier 2020 et les montants collectés seront affectés aux caisses sociales. Selon nos calculs, nous pensons que les banques, compagnies de leasings et d’assurance apporterai­ent ensemble près de 80 millions de dinars, un joli coup de pouce pour les comptes de l’etat. Mais cela signifie aussi plus d’inflation. Tôt ou tard, les banques et les assurances vont répercuter cette hausse d’impôts (donc de charges) sur leurs tarifs. Déduire 1% de la marge brute est une pilule difficile à avaler pour tout acteur économique surtout que l’année dernière, il y a eu l’introducti­on de la CSS. Pour le moment, il y a une volonté du secteur de maîtriser le coût des ressources. Un gentlemen's agreement semble avoir lieu entre les opérateurs financiers en plafonnant les dépôts à TMM+3%. En même temps, les revenus des portefeuil­les d’investisse­ments commencent à baisser. Cela est synonyme d’apparition de pressions sur les PNB des banques qui risquent de décélérer. Avec un coût de risque plus élevé, les recettes fiscales devraient croître, mais à un rythme plus faible que celui observé cette année.

La question de l’adoption de L’IFRS

La décision de passer aux normes IFRS dans les groupes bancaires tunisiens à compter du 1er janvier 2021 aura ses propres conséquenc­es. Ces normes comptables internatio­nales se caractéris­ent par un recours accru à la notion de juste valeur, susceptibl­e d’introduire une volatilité dans les bilans et les comptes de résultat des établissem­ents de crédit. Cette notion facilite la prise en compte dans les résultats et dans les capitaux propres de plus-values latentes dont le caractère fiable et la capacité de réalisatio­n à court terme n’ont pas été toujours démontrés, au moins selon ce que nous avons observé en Europe. En matière d’impôts, et avec les actifs/passifs d’impôts qui seront constitués dans les bilans, la fiscalité des banques et des compagnies de leasing risque de changer significat­ivement. Mais dans tous les cas de figure, nous sommes convaincus que l’etat fera très attention à son gisement D’IS.

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