Indabax Tunisia
L’intelligence artificielle a le potentiel de changer à jamais le mode de vie de milliards d’humains à travers la planète. Où en est l’afrique et la Tunisie de cette révolution? Focus.
Une intelligence artificielle africaine: rêve ou réalité ?
Assimilée pendant de longues années à la science-fiction, l’intelligence artificielle est aujourd’hui une réalité qui impacte la vie de dizaines, voire de centaines, de millions de personnes dans le monde. Les algorithmes intelligents ont d’ores et déjà automatisé un grand nombre de tâches, entraînant les humains vers d’autres missions. L’impact économique de L’IA ne cesse aussi d’accroître au fil des années, au point qu’en 2030, on s’attend à ce que sa contribution dans le PIB mondial équivaille celles de la Chine et de l’inde combinées. Et pourtant, l’intelligence artificielle ne semble pas intéresser les décideurs africains et les politiques visant à encourager le développement de la filière restent, grosso modo, loin des attentes. C’est dans ce contexte que plusieurs experts africains en AI ont décidé de mettre en place Indaba, une organisation panafricaine visant à promouvoir l’apprentissage et l’usage de l’intelligence artificielle à l’échelle africaine. “L’accès aux plus grandes conférences mondiales de l’intelligence artificielle n’est pas donné à un grand nombre d’africains”, a souligné Marek Barwinski, chercheur et développeur à Instadeep. Selon lui, ceci limite les chercheurs africains en AI dans le développement de leurs compétences, ne pouvant ainsi montrer au monde ce dont ils sont capables de réaliser. Indaba se veut une solution à ce problème. A ce titre, la première conférence tunisienne organisée par Indaba s’est déroulée en avril dernier à Tunis. Baptisée Indabax Tunisia, la conférence a été l’occasion pour les développeurs tunisiens de rencontrer des experts de renom dans le monde L’IA et d’avoir un aperçu sur leurs travaux. “À travers les conférences
d’indaba, nous souhaitons susciter l’intérêt des jeunes Africains et les inciter à s’aventurer dans le monde de L’IA”, a souligné Karim Beguir, fondateur d’instadeep, startup tunisienne dans L’IA, et coorganisateur d’indabax Tunisia.
L’IA et la Tunisie : une union serait- elle possible?
Si la Tunisie doit s’intéresser, et au plus vite, à l’intelligence artificielle, c’est parce que cette technologie risque d’avoir un impact direct et considérable sur le business model de plusieurs entreprises. “Pour la Tunisie, comme pour plusieurs pays en voie de développement, la maind’oeuvre abordable est un argument d’attractivité aux investisseurs étrangers”, a souligné Beguir. Cependant, l’avènement des machines intelligentes capables de gérer des tâches de plus en plus compliquées risque de mettre en danger la viabilité de ce modèle. Mais la Tunisie a-t-elle les moyens nécessaires pour s’attaquer à l’intelligence artificielle et pour aspirer à s’y positionner ? Le développement et la prolifération d’une forte industrie D’IA requiert, selon Beguire, 4 ingrédients clés: un écosystème entrepreneurial dynamique, une expertise scientifique, un accès à une quantité abondante de données, et une politique d’état favorable à L’IA. Pour les deux premiers ingrédients, la Tunisie s’avère plutôt dotée d’un avantage de taille. “Nous disposons d’une large panoplie de structures d’appui à l’entrepreneuriat en Tunisie”, a souligné Beguire. Et d’ajouter: “Les entrepreneurs locaux peuvent aussi tirer pleinement profit des initiatives lancées à l’échelle africaine, tels que le Google Developper Launchpad, pour accélérer leur développement”. Selon l'entrepreneur, la Tunisie abrite aussi quelques-unes des meilleures institutions de recherche scientifique en Afrique, ce qui lui confère un avantage de taille. Pour l’accès aux données, la situation est moins avantageuse. “Le développement des algorithmes intelligents est intimement lié à la disponibilité d’énormes quantités de données labellisées”, a noté Karim Beguire. Ces données sont d’une utilité primordiale puisqu’elles seront utilisées pour entraîner les systèmes intelligents. “Nous avons besoin de lancer des initiatives pour collecter et labelliser les données relatifs aux problèmes que nous avons en Afrique”, a indiqué Stephan Gouws, expert à Google DeepMind. “Nous pourrons organiser des hackathons où l’objectif est de collecter et de labelliser les données qui vont nous permettre de résoudre les problèmes auxquels font face les Africains”, a-t-il ajouté. À vrai dire, le développement de l’intelligence artificielle offre en soi une solution à la pénurie de la data: “Il est désormais possible d’utiliser L’IA pour générer des données qu’on peut utiliser pour entraîner les modèles intelligents”, a souligné Beguire. De leur côté, le développement de l’iot et la démocratisation de l’internet en Afrique ouvrent la porte à de nouvelles opportunités de collecte des données. Par exemple, il est possible d’utiliser des caméras low-cost au niveau des feux de la circulation pour collecter des données sur le trafic routier. Cellesci permettront de créer des systèmes de gestion routière plus intelligents, a expliqué Beguire. L’élaboration de politiques incitatrices au développement de L’IA peut aussi être perfectionnée bien qu’en Tunisie “le gouvernement soit conscient de l’importance de l’intelligence artificielle”, a noté Karim Beguire. De son côté, Ulrich Paquet, Research Scientist at Deepmind, a appelé à un plus grand rapprochement entre les mondes de la recherche scientifique et des entreprises. “Dans les pays où L’IA s’est rapidement développée, on remarque que l’industrie et la recherche scientifique vont dans la même direction”, a souligné l’expert. Et d’ajouter: “Je pense que nous devons faire la même chose en Afrique”.