CHRONIQUE
En cherchant la signification de ce mot dans un dictionnaire en ligne l’on trouve ce qui suit : «Effet désagréable produit par des instruments qui jouent, des voix qui chantent sans accord, sans harmonie». (Larousse.fr) Cependant en poussant cette recherche, ô combien intéressante l’on peut également trouver; sur Wikipédia; « On parle également, par extension, de cacophonie pour évoquer une situation d'incohérence et de mésentente entre des personnes » Nous y voilà et là c’est plus compréhensible parce qu'exprimant nettement mieux notre actualité politiquement tourmentée. A tel point que l'incohérence semble avoir, aujourd'hui, grippé l'ensemble de la machine devant permettre au pays d'aller de l'avant. Nous avons assisté, ces derniers mois, à une passe d’armes au sommet de l’etat qui pourrait sembler anodine si elle n’empoisonnait davantage le climat politique à l’heure où la Tunisie s’apprête à retrouver le chemin des urnes, pour un double scrutin législatif et présidentiel. A cette joute est venue s'ajouter un schisme au sein du parti qui a émergé lors des dernières élections. Scindé en deux il émet, depuis, sous deux voix dissonantes! Comme si le pays manquait de mouvements. En effet les discours des différents responsables de tous les bords politiques, tellement effrités et éparpillés en 218 partis, que ce soit au sein du gouvernement ou dans l'opposition. sont tout aussi sibyllins que contradictoires. C'est à travers ce qualificatif des intérêts les plus étroits que s'est alors opérée la fragmentation politique!. Ainsi selon le responsable de l'institution de sondage, Sigma Conseil, dans une déclaration à la presse (Le Point Afrique), "Les chiffres démontrent la fin du bipartisme. On a désormais cinq partis entre 10 et 20 % : le pays est ingouvernable, car ils se détestent tous. Le système est profondément ébranlé". Côté Parlement, là encore, la désertion semble être de mise à l'image reflétée par un hémicycle pratiquement désert et où les travaux ne démarrent, régulièrement, que bien au-delà de l'horaire prévu. Et quand un ministre se fait remplacer, aux séances
d'interrogation, les députés crient au manque de respect. A l'inverse la vue d'un hémicycle vide n'est certainement pas respectueuse des électeurs et des citoyens! Aux yeux de l'opinion publique, de la presse et de l'exécutif, les parlementaires, pas tous fort heureusement, sont perçus comme des empêcheurs de tourner en rond, à cause, le plus souvent, d'une certaine dissonance et d'une lenteur du travail parlementaire. A preuve cinq années n'ont pas suffi pour accoucher des textes portant création d'une Cour constitutionnelle. Par ailleurs voilà que les citoyens apprennent que l'instance Vérité et Dignité créée pour ramener la réconciliation semble avoir plutôt semé la discorde outre les accusations portées sur la dissimulation de documents d'archives. Cerise sur le gâteau , c'est une première mondiale dont seule la Tunisie est capable, un procès est diligenté contre de hautes personnalités, aujourd'hui disparues, qui ont fait l'histoire du pays. Le pays va ainsi, avec ces boulets, entrer dans un feuilleton électoral, à plusieurs péripéties et plusieurs épisodes en espérant un niveau plus élevé que celui offert, sur les différentes chaines télévisuelles lors des soirées ramadanesques passées, avec leur cohorte de faits et d'énigmes de basse moralité. Les citoyens auront probablement droit, dans cette cacophonie, aux nombreux candidats qui vont défendre toute une variété de programmes promettant tout à la fois, sachant que les promesses n'engagent que ceux qui y croient. Saturés par des voix politiques, toutes tendances confondues, ils ont été abreuvés pendant plus de huit ans du discours de la démocratie et de la liberté d'expression alors que le message envoyé au départ de la révolution était "Travail, liberté et dignité nationale". Ces mêmes jeunes dans leur vingtième année à l'époque, se retrouveront trentenaires lors des élections à venir et, pour beaucoup, dans la même situation de précarité. Une ambiance délétère qui n'arrange pas les choses. Dans l'effet délétère de ce tumulte politique entre partis qui se permettent tous les coups et entre membres d'un même parti qui s'entredéchirent; allez comprendre qui fait quoi et qui dit quoi… Mais déjà les couteaux sont déjà bien aiguisés et tous les coups seront permis. De son côté, délivrée dans l'urgence, l'information doit , pour être compréhensible, se garder du risque de rajouter à la cacophonie, le sensationnel et l'alarmisme. La campagne électorale de l'automne va donc se trouver marquée par un charivari tout particulier, fait de perte de confiance et de crédibilité du même discours plusieurs fois déjà entendu. En faisant feu de tout bois, en voyant ce nomadisme devenu un sport politicien, il va alors être difficile au commun des mortels, soucieux de son devenir, de trouver réponse à ses questions: Qui dit quoi ? Qui fait quoi ? Quoi qui dit ? Quoi qui fait ? Ca part dans tous les sens... Et, au milieu de cette saisissante cacophonie (on ne le dira jamais assez), tout le monde se bouscule au portillon pour se positionner et tenter de décrocher la timbale. Mais, au final, qui va aller voter ? L'on parle d'un million de nouveaux inscrits et que le nombre d'électeurs porté sur les listes s'élève, selon les chiffres de L'ISIE, à près de 7 millions. Plus du tiers se situe dans la tranche d'âge 18-35 ans. Celle-là même qui aspire à diriger le pays demain et qui piaffe d'impatience de se sentir utile au sein de la société. Aux dernières municipales 20% des inscrits seulement ont voté. Les abstentionnistes se retrouvaient dans les tranches d'âge séniors (plus de 60 ans) et les moins de 35 ans; soit, à elles deux, pas loin de 70% de l'électorat. Le scénario, s'il se reproduisait lors des prochaines législatives et présidentielles risque, en définitive, de profiter aux petites formations politiques, voire des indépendants qui vont tirer avantage du mécontentement à l'endroit du gouvernement, des parlementaires et autres ténors de la vie politique. Une large brèche, s’est implacablement ouverte dans la coque politique, sociale et économique et quand le bateau prend l'eau il n'est pas difficile de réaliser ce qu'il pourrait en advenir.