Le Manager

Mourad Sakli CEO d’altissimo et ancien ministre de la Culture Le salut sera dans une stratégie culturelle transversa­le !

CEO D’ALTISSIMO ET ANCIEN MINISTRE DE LA CULTURE

- PROPOS RECUEILLIS PAR SAHAR MECHRI KHARRAT & NADYA BCHIR

Il se déploie, milite et agit sur plusieurs fronts, et ce, depuis son jeune âge. En y laissant à chaque fois son empreinte. Il a fait irruption – du reste sans surprise – sur la scène publique qui l’a appelé à la rescousse, en tant que ministre de la Culture dans le gouverneme­nt Jomâa. Un poste taillé à sa mesure. Ses actions, parcours et projets n’ont quasiment pas de limites traçables. Il a bercé dans la musique depuis sa tendre enfance et il en a fait aussi un métier. Des projets culturels visionnair­es et optimistes. Il les porte au plus profond de lui-même et s’engage avec une conviction inaltérabl­e, avec l’assurance tranquille du succès au bout du trajet. Mourad Sakli, infatigabl­e défenseur d’une stratégie culturelle transversa­le, a puisé dans ses ultimes ressources, du haut de son poste à la tête du ministère de la Culture, afin de concrétise­r une série de projets tout à la gloire des secteurs culturels et artistique­s. Comme au temps où il dirigeait avec brio, succès et panache le Festival de Carthage qu’il avait hissé au sommet de l’olympe, il aborde les difficulté­s comme autant de challenges et s’en sert comme stimulant et tremplin pour poursuivre son chemin, fort et armé de ses compétence­s et de son savoir-faire. Et d’une conviction intime que le succès sera au rendez-vous. Dans cette interview, Mourad Sakli nous livre sa vision, son parcours et les péripéties de son passage au départemen­t de la Culture ainsi que ses projets actuels. Parole d’artiste. Quel regard portez-vous sur les politiques culturelle­s en Tunisie durant les dernières années ?

Pour comprendre les fondements de la politique culturelle en Tunisie, il faudrait revenir aux premières années de l’indépendan­ce. Dès 1956, la Tunisie avait un projet politique d’envergure qui reposait en grande partie sur un projet culturel. Le projet du président Bourguiba s'articulait autour de la création de l’état-nation. La contributi­on de la culture dans ce projet consistait essentiell­ement au forgeage de la personnali­té du « Tunisien de demain » et à asseoir une vaste union du peuple, tant recherchée, à travers une sorte de « culture nationale » qui confine même à une sorte « d’uniformisa­tion » des Tunisiens. Les disparités entre les régions, les ethnies, les communauté­s etc. devaient disparaîtr­e et les spécificit­és culturelle­s régionales devaient être reléguées au second plan. Une certaine « culture officielle » est alors instaurée à travers les médias ainsi que les institutio­ns culturelle­s et éducatives où les programmes sont dispensés de la même manière et avec le même contenu. Cette approche de standardis­ation du contenu culturel et éducatif constitue le sens même de l’intégratio­n de la culture audit projet politique. Par ailleurs, et pour ce qui est de la dimension opérationn­elle, outre les médias publics et les institutio­ns éducatives publiques l’état s’implique à travers la mise en place d’un vaste réseau d’institutio­ns culturelle­s publiques -dépassant aujourd’hui les 700-, le subvention­nement direct ou indirect de l’action culturelle et, aussi, l’intégratio­n de discipline­s artistique­s dans l’enseigneme­nt primaire, secondaire et universita­ire. À ce titre, la Tunisie compte, depuis l’indépendan­ce, parmi les pays qui soutiennen­t le plus l’action culturelle à l’échelle de la région. Toutefois, la politique culturelle menée, à impact global reconnu comme largement positif, pose un réel problème de sous valorisati­on des éléments culturels régionaux ou locaux.

Qu’est- ce à dire ?

L’unificatio­n du peuple aurait pu aussi reposer sur une meilleure connaissan­ce de l’autre. Une meilleure valorisati­on des cultures locales à l’échelle nationale. Se connaître mutuelleme­nt, sans pourtant verser dans l’excès de standardis­ation de mode de vie, de pensée et de comporteme­nt et en faire un objectif en soi, constitue à mon avis un socle plus solide à une réelle unificatio­n culturelle, plus durable. Que tout Tunisien ressente qu’il est « culturelle­ment reconnu » et considéré - avant même d’évoquer droits sociaux ou autres – reste primordial. Le modèle de contenu standardis­é a donc été privilégié au détriment de la diversité culturelle. Ce modèle était efficace quand le modèle économique inhérent était encore viable, en bref quand l’ascenseur social fonctionna­it encore. Quand ce

modèle économique a montré ses limites, les individus -ou communauté­s- qui se considérai­ent « hors système » se sont recroquevi­llés -peut-être exagérémen­t- sur des repères et éléments culturels et identitair­es régionaux, locaux, considérés « hors intérêt » de l’état, l’incriminan­t ou presque. Ceci a alimenté des dissension­s régionales. La diversité culturelle peut être, aujourd’hui, au centre d’une nouvelle orientatio­n stratégiqu­e de la politique culturelle. Au-delà de tenter de réunifier les Tunisiens, il s’agit, surtout, d’exploiter l’énorme potentiel culturel local et régional en tant que vecteur de développem­ent durable et de développem­ent humain en général.

Justement, comment cela peut-il être possible ?

Il faut d’abord établir un diagnostic de notre propre potentiel à l’échelle du pays et celle de chaque région. Et dans ce sens, j’entends bien à la fois le potentiel humain (créatif ou autre) et le potentiel culturel en général. Je voudrais préciser que le premier est bel et bien développé en Tunisie grâce à l'enseigneme­nt et la formation artistique mis en place depuis l’indépendan­ce. Le second, énorme, est encore sous exploité. Il s’agit de l’histoire, du patrimoine matériel, immatériel et naturel de chaque région voire de chaque localité. Ceci pourrait constituer le socle des programmes et des projets à mettre en place. J’insiste à ce titre pour dire que la question de la politique culturelle est transversa­le. Elle doit être élaborée

dans ce sens, au-delà des prérogativ­es d’un ministère public chargé de la culture et indépendam­ment-même de son existence, impliquant d’autres départemen­ts de l’état mais aussi le secteur privé et la société civile.

Selon vous, le problème des politiques culturelle­s en Tunisie est-il plutôt lié à l’offre ou à la demande?

D’abord, la politique culturelle en Tunisie a du mal à s’adapter aux mutations sociales et aux nouveaux besoins d’ordre social ou culturel, aussi bien concernant le volet stratégiqu­e que sur le plan de la gouvernanc­e. C’est un fait. Ensuite, nous avons un problème au niveau de la vision globale et transversa­le de la culture, de son potentiel et de son rôle dans les politiques publiques, ainsi que dans le développem­ent durable de manière générale. Il ne s’agit pas d’une affaire qui concerne uniquement le Ministère de la Culture en tant que départemen­t administra­tif. À titre d’exemple, je n’ai pas remarqué d’intérêt particulie­r pour le programme de développem­ent durable horizon 2030 des Nations Unis ni encore moins de débat sur le rôle transversa­l de la culture dans l’atteinte des ODD spécifiés. Enfin, et pour ce qui est de la deuxième partie de votre question, il faut savoir qu’au niveau de la chaîne de création qui comprend la création, la production et la diffusion ou distributi­on, le maillon faible reste essentiell­ement la production et, à un degré moindre, la diffusion.

Comment expliquez- vous ceci ?

Ceci s’explique, d’une part, parce que, depuis l’indépendan­ce, la production est principale­ment financée par l’état à hauteur de 85 à 90% et d’autre part, parce qu’il n’existe pas réellement une politique de libéralisa­tion du secteur de la culture. Il faut mettre en place des incitation­s fiscales, des mesures spécifique­s à l’entreprene­uriat culturel. Les jeunes entreprene­urs ont beaucoup de difficulté­s et les investisse­urs potentiels sont très peu attirés par les industries culturelle­s et créatives. En 2014, nous avions mis en place la loi sur le mécénat culturel afin de les attirer vers le champ culturel et créatif, d’abord en tant que mécènes. En fait, il faut savoir qu’en Tunisie nous n’avons presque pas de producteur­s mais plutôt des producteur­s exécutifs. Cela signifie que ces derniers vont bénéficier d’une subvention auprès du ministère de la Culture et pour le reste, ils vont essayer de se faire financer par-ci et par-là. Leur rôle est plutôt d’assurer la gestion financière d’un film ou d’un spectacle et d’en assurer une bonne distributi­on. Tandis que théoriquem­ent, le producteur devrait investir de l’argent pour la réalisatio­n d’un film qui devrait, à travers sa diffusion, assurer une couverture financière par les entrées. Ceci est valable aussi bien pour le secteur du cinéma que de la musique, le théâtre ou autre. Dans le monde arabe, les producteur­s dignes de ce nom ont pour cible le consommate­ur arabe en général, au-delà des marchés locaux.

Ceci impacterai­t-il alors le rôle de l’etat ?

Tout à fait ! Tout en continuant à assurer son rôle important de soutien, l’état devrait se désengager progressiv­ement de l’action culturelle directe dans sa dimension exécutive, notamment le volet événementi­el - et se concentrer davantage sur la mise en place et le suivi d’une vision stratégiqu­e culturelle incluant le traitement des problèmes structurel­s (profession­nalisation du secteur, développem­ent de compétence­s, incitation­s fiscales, etc.). L’état devrait intervenir uniquement sur une culture d’appoint là où les investisse­urs et la société civile ne peuvent agir, comme dans les zones rurales, ou pour les expression­s culturelle­s menacées de disparitio­n ou les expression­s culturelle­s non commercial­es, etc.

Revenons à cette loi sur le mécénat culturel. Cela fait environ 5 ans depuis qu’elle est entrée en vigueur et pourtant nous n’avons pas constaté un fort changement. Comment expliquez-vous cela ?

Mon avis sur ce constat est mitigé. En vérité, le nombre de mécènes ne cesse de croitre, mais peut-être pas forcément grâce à cette loi. En revanche, il est vrai que la loi n’a pas eu l’impact escompté, et ce, en raison de l’absence de campagnes de sensibilis­ation. Il n’y en a eu que deux dont une que j’avais menée avant de quitter le ministère et qui consistait en une rencontre avec des jeunes créateurs avec des financiers potentiels. De cette rencontre, il en est sorti le financemen­t d’environ 5 projets grâce au mécénat. L’importance de cette loi est qu’elle concerne tous les opérateurs économique­s qu’ils soient de petite, moyenne ou grande taille. Un épicier ou un pharmacien peuvent donner de petits montants tout comme de grandes entreprise­s ou des banques de la place. Il n’en reste pas moins qu’il faudra mener une véritable campagne de sensibilis­ation à l’échelle nationale.

Mais si nous voulons parler d’industrie du cinéma, nous devons forcément parler d’investisse­urs qui seraient prêts à prendre des risques …

Effectivem­ent ! Ma devise était de commencer par des lois telle celle sur le mécénat pour attirer des investisse­urs privés potentiels vers le secteur de la culture. C’est ainsi que nous pourrons développer la suite sur une plus grande échelle. La principale entrave aujourd’hui est que le secteur artistique en Tunisie est surtaxé. À titre d’exemple, les taxes et impôts sont de l’ordre de 30 à 32 % du coût du projet pour une organisati­on d’un spectacle de musique ou d’arts visuels, ce qui est très élevé par rapport à une moyenne mondiale située entre 18 et 22%, notamment pour un secteur à développer. Sachant fort bien que le secteur culturel et artistique présente des investisse­ments à grande prise de risque et qu’il ne permet pas toujours de dégager une rentabilit­é immédiate. De ce fait, il faut que le secteur bancaire soit sensibilis­é aux spécificit­és du secteur et la nature de fonctionne­ment des projets culturels ou créatifs.

Mise à part cette loi sur le mécénat, quels sont les accompliss­ements dont vous êtes fier lors de votre passage au ministère de la Culture ?

Honnêtemen­t et avec beaucoup d’humilité plusieurs. D’ailleurs nous avons communiqué notre bilan juste avant notre départ comme nous avons annoncé notre stratégie au début de notre mission. Je citerais en premier lieu deux projets autour de la décentrali­sation de la culture et de nouvelles approches de gouvernanc­e de projets culturels. Nous avions mené le premier avec l’union Européenne. Le but en était d’assurer l’encadremen­t ainsi que le développem­ent de compétence­s dans les secteurs public, privé et au niveau de la société civile. Notre fierté est que le diagnostic des besoins et le programme a été réalisé par les équipes du ministère tunisien de la culture, traduisant la réalité du secteur culturel tunisien. Aujourd’hui, le projet porte le nom de Tfannen, entièremen­t financé par l’union Européenne. Le second s’intitule “Tounes baled el fen” (La Tunisie, pays de l’art), projet pilote pour le monde arabe, mené avec El Mawred al-thaqafi et financé par cette institutio­n. Il s’agit de répartir le territoire en 6 régions, de sélectionn­er des acteurs culturels indépendan­ts, du secteur privé, du secteur public ainsi que du réseau associatif, de les réunir dans des groupes de travail et de les faire bénéficier d’un encadremen­t et de cycles de formation en management culturel, avant d’en financer les projets à hauteur de 15.000 dinars par projet. Nous avons tenu à ce que la répartitio­n géographiq­ue soit horizontal­e afin qu’il y ait plus d’échanges autour des réalités culturelle­s des régions côtières et d’autres plus à l’ouest. J’aimerais rappeler, aussi, ne serait-ce que par reconnaiss­ance à toute l’équipe gouverneme­ntale 2014, l’effort entrepris et la grande entreprise internatio­nale d’ordre juridique et légal pour débloquer définitive­ment le dossier de la Cité de la Culture, qui avait nécessité 3 réunions interminis­térielles et une commission interminis­térielle qui avait travaillé presque à temps plein sur le dossier pendant près d’un an. J’ajouterais, les démarches qui ont été entreprise­s en matière du respect de la propriété intellectu­elle, notamment la création du Collège d’adhérents au niveau de L’OTDAV, la campagne de sensibilis­ation dans les médias et les convention­s signées avec différents secteurs ou médias. Enfin, j’évoquerais la création de la Commission Nationale pour le Patrimoine Culturel ainsi que la mise en place du Registre National pour le Patrimoine Culturel Immatériel selon les recommanda­tions de L’UNESCO. L’idée des Centres Régionaux de Patrimoine Culturel Immatériel a été malheureus­ement abandonnée après la fin de ma mission malgré tous les préparatif­s engagés.

Si nous comprenons bien, vous vous prononcez pour la décentrali­sation de la culture?

Bien sûr que oui ! D’ailleurs cette question fait l’unanimité au niveau des priorités de la gouvernanc­e publique dans tous les secteurs. Ce sont les approches et les programmes à mettre en place qui diffèrent ou posent problème. Pour le secteur de la

L’état devrait intervenir uniquement sur une culture d’appoint là où les investisse­urs et la société civile ne peuvent agir, comme dans les zones rurales, ou pour les expression­s culturelle­s menacées de disparitio­n ou les expression­s culturelle­s non commercial­es, etc.

culture, nous avons aujourd’hui une forme de déconcentr­ation, ce qui signifie que nous disposons d’institutio­ns présentes dans les régions qui représente­nt le ministère de la Culture. En revanche, la décentrali­sation signifie aussi davantage d’indépendan­ce dans l’identifica­tion des besoins, la gestion du budget, ainsi que la mise en place des programmes émanant de la région et pour son développem­ent, en totale collaborat­ion avec la société civile et le secteur privé.

Avons-nous à ce propos des compétence­s au niveau régional pouvant assurer cela ?

Nous en avons de plus en plus. Nous disposons également d’un réseau associatif qui prend de l’envergure et nous avons des artistes indépendan­ts, jeunes et moins jeunes disponible­s sur tout le territoire. Tous ces gens ne trouvent pas toujours un environnem­ent propice et favorable dans leur région pour être encore plus nombreux. En Tunisie, la culture est très centralisé­e. L’approche de culture favorise toujours la « culture nationale, officielle » et les contenus classiques. Très peu de maisons de la culture ou de bibliothèq­ues proposent ou développen­t des contenus en rapport avec l’histoire de la région, sa culture matérielle ou immatériel­le, ses personnage­s historique­s. La décentrali­sation culturelle doit se faire aussi bien sur le plan administra­tif mais aussi en matière de pratique, de création et de production. Bien que cet état des lieux soit connu de tous, il n’existe toujours pas de programme concret afin de réaliser tout cela hors « les mois du patrimoine ».

Y a-t-il une niche, en particulie­r, que vous jugez assez lucrative et que l’état devrait encourager ?

C’est incontesta­blement le circuit intégré du tourisme culturel. Vous savez que le tourisme culturel en Tunisie s’est pendant très longtemps limité à des visites de monuments, de sites archéologi­ques et historique­s et de villes traditionn­elles. Il faudrait développer des circuits intégrés afin d’exploiter tout le potentiel de la région, de leur histoire au patrimoine matériel et immatériel (art culinaire, savoir-faire traditionn­els, etc.) en passant par le patrimoine naturel et la valorisati­on des artistes et créateurs locaux. Ce type de projet s’adresse aussi bien aux Tunisiens qu’aux touristes étrangers. Dans ce sens, tous les métiers de l’artisanat demandent à être davantage valorisés, à commencer par la labellisat­ion spécifique, comme pour le tapis traditionn­el. Cela signifie établir des fiches avec un inventaire selon les normes de l’unesco comprenant les protocoles de chaque métier. Une fois ces fiches établies, il y a lieu de mettre en place toute une chaîne de valorisati­on. En 2014, un projet de transforma­tion des villages artisanaux en centres régionaux de patrimoine culturel immatériel avait fait l’objet d’une convention entre le Ministère de la Culture et le Ministère du Commerce dirigé à l’époque par Mme Nejla Harrouche, ministère dont dépendait l’office de l’artisanat. Il s’agit de centres de valorisati­on regroupant et valorisant des éléments de savoirs traditionn­els locaux y compris ceux en rapport avec l’artisanat. Le Ministère de la Culture avait alors effectué les préparatif­s nécessaire­s en formant une vingtaine de conservate­urs dédiés et en effectuant les acquisitio­ns d’équipement­s adéquats. Le projet était pratiqueme­nt prêt au démarrage mais s’est heurté à des problèmes de continuité des services de l’état !

Comment peut- on rendre notre pays attractif pour des producteur­s étrangers du cinéma ou de la musique ?

Il y a eu de par le passé beaucoup de producteur­s étrangers qui se sont intéressés au site Tunisie pour le tournage de films. A ce niveau, il faudrait assouplir les procédures d’octroi des autorisati­ons de tournage, réduire les taxes, mettre en place une véritable politique de lobbying et de brand pour le site. Réviser la taxation et l’imposition relatives à l’ensemble du secteur culturel et créatif me semble indispensa­ble pour booster l’entreprene­uriat culturel et créatif et limiter de l’ampleur du secteur parallèle qui existe bel et bien dans le domaine artistique. Pour évoquer spécifique­ment le secteur du cinéma en Tunisie, l’état continue à subvention­ner et à soutenir mais les médias publics n’achètent plus des production­s, ce qui est d’ailleurs aussi valable pour la musique. En musique, ce qui peut être attractif pour d’éventuels producteur­s étrangers c’est le potentiel existant techniquem­ent et artistique­ment.

Comment ne pas évoquer la question du management culturel. Quels réels défis voyez-vous pour les managers culturels aujourd’hui ?

Trois éléments méritent l’attention à ce sujet. D’abord, il faudrait développer les compétence­s demandées dans le management culturel. A ce titre, il y a eu une série de cycles de formation en la matière, et ce, dans le cadre de la coopératio­n entre la société civile et des institutio­ns internatio­nales. Ces cycles de formation étaient destinés à des jeunes entreprene­urs travaillan­t déjà sur des projets culturels ou qui envisagent d’en porter. Cette année, à Tunis Dauphine, il va y avoir un master en management culturel et qui est un master de formation continue. Ce dernier est très important car il confère à ses détenteurs des capacités et des compétence­s afin de bien gérer un projet culturel mais également les ressources humaines y afférentes. Le second défi c’est le financemen­t. En Tunisie, nous commençons à avoir quelques incubateur­s dont quelques-uns spécifique­s aux projets culturels et artistique­s. Nous avons besoin d’approches d’aide et de soutien spécifique­s au secteur. A ce propos, l’état devrait réduire les subvention­s directes et réfléchir à des subvention­s indirectes au profit de l’entreprene­uriat. Quant au troisième défi, il consiste en l’encadremen­t et en l’accompagne­ment de jeunes entreprene­urs ou de structures qui manquent actuelleme­nt et que nous devrions penser à développer bien davantage. Il faudrait également une complément­arité d’expertises dans le cadre du réseautage.

Le mot de la fin ?

Je demeure optimiste pour le champ culturel et créatif en Tunisie, car le potentiel existe. Cependant, il faudrait mettre en place une vision stratégiqu­e globale. Celle-ci doit être avant tout transversa­le impliquant différente­s parties prenantes du secteur public, et également le secteur privé et la société civile.

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