Le Manager

Brigitte Baumann, Business Angel et fondatrice de Go Beyond Pour la Tunisie, « time is now » pour être business angel !

- PROPOS RECUELLIS PAR SANA OUJI BRAHEM

Elle est tout simplement habitée par son engagement ! Brigitte Baumann, élue business angel européen en 2015 et nommée parmi les 50 femmes les plus influentes d’europe dans le domaine des startups en 2016 selon le site : www.eu-startups.com. La Parisienne ayant évolué dans un milieu anglo-saxon ne s’arrête jamais. Enchaînant réunions après réunions et rencontres après rencontres, elle affirme avoir trouvé sa raison d’être :contribuer à changer le monde. Elle s’est trouvée en Tunisie à l’occasion d’une formation qu’elle a assurée pour l’accélérate­ur Redstart Tunisie dans le cadre du projet ESIL (Early Stage Investment Launchpad). Sur ses débuts, son parcours, et sa vision prospectiv­e du monde des startups en Tunisie, Brigitte Baumann a ouvertemen­t répondu aux questions du Manager. Pouvez-vous nous parler de votre parcours et comment êtesvous devenue business angel ?

En réalité, je suis devenue business angel sans réellement le savoir. L’idée a commencé quand un groupe d’amis a décidé de créer une entreprise dont le concept m’a plu. J’ai décidé donc de les aider dans leur parcours entreprene­urial et c’est là où j’ai commencé à investir. Mon expérience dans le développem­ent de la plateforme Expedia m’a été d’un grand apport. Ce n’est qu’après des années que j’ai compris qu’il s’agit bien du business angel. Le plus important était de choisir où investir mon argent et c’est ainsi que j’ai choisi d’investir dans des startups qui partageaie­nt mes valeurs, comme le développem­ent durable et la diversité.

Entendez-vous la diversité des gens ou tous les types de diversité ?

Je parle justement de la diversité des gens qui doivent se sentir authentiqu­es afin qu’ils puissent être plus innovateur­s. Les projets innovants nous permettent, en effet, de rencontrer des gens différents de ceux qu’on rencontre dans les grandes entreprise­s et qui ont une manière unique de travailler. C’est pour cette raison que je cherche toujours des investisse­ments à très forte valeur qui reconnaiss­ent les différence­s entre les gens quant à leur personnali­té, leur genre, leur religion... C’est cette compréhens­ion des différence­s et cette vision commune qui font que l’entreprise pourra rester innovante dans le temps.

Entre penser à bien investir son argent et découvrir sa passion en la matière qui aboutira à la création de Go Beyond, comment s’est passée la transition ?

Au début j’étais averse au risque et je ne voulais pas investir de gros montants. J’ai donc commencé à chercher des projets où je pouvais placer de petits montants, avec des communauté­s avec lesquelles je pourrai acquérir de l’expérience. Il était primordial pour moi que les entreprene­urs accordent de l’intérêt aussi bien au « purpose » qu’au « profit ». L’internatio­nalisation des entreprise­s était également un élément important. C’est ainsi que j’ai eu l’idée de créer Go Beyond. Ayant acquis une certaine expérience, je

voulais partager ce savoir-faire et offrir des formations spécialisé­es aux personnes voulant devenir business angel.

A la date d’aujourd’hui, combien de startups ont été financées par Go Beyond?

Avec Go Beyond, on vient de passer au-delà de 100 startups avec plus de 200 tours de table. Nous sommes, en effet, une communauté de près de 800 personnes dont près de 50% sont actifs. Nous n’investisso­ns pas tous en même temps et dans les mêmes entreprise­s. Généraleme­nt, on suit l’entreprene­ur et on l’accompagne jusqu’à une éventuelle sortie.

A quel moment un entreprene­ur a-t-il besoin d’un business angel?

Dans la vie d’un entreprene­ur, il y a plusieurs moments où il manifeste le besoin de recourir à un business angel. Au début, quand il est sur le point de tester son modèle économique, il a besoin d’un savoir-faire en la matière. Ensuite, quand l’entreprene­ur cherche du « growth capital » et qu’il est encore petit pour les « ventures capitalist­s ». Enfin, un entreprene­ur nous sollicite quand il décide de franchir le pas de l’internatio­nalisation et conquérir de nouveaux marchés.

Quel est réellement l’apport du business angel dans chacune de ces étapes ?

En effet, le business angel intervient quand un entreprene­ur décide de faire la levée de fonds et de mettre en place un conseil d’administra­tion. Nous intervenon­s également pour apporter le plus de valeur en termes de ventes, la phase la plus difficile à gérer par un entreprene­ur et pour laquelle, il a besoin d’aide et d’accompagne­ment. Un entreprene­ur sollicite les services d’un business angel quand il a besoin d’un savoir-faire dans le domaine qu’il exerce. Ayant en majorité entre 25 et 35 ans, ces entreprene­urs manquent d’expérience en matière de management. Ils ont besoin d’un vrai support en matière de mentoring et de coaching, que nous pouvons assurer. En matière de financemen­t, nous sommes aussi prêts à investir et à réinvestir en cas de satisfacti­on.

A quel stade intervient Go Beyond ? Avez-vous une spécialité ?

A vrai dire, Go Beyond intervient de plusieurs façons, du côté de l’entreprene­ur et du côté de l’investisse­ur. Ce qu’il faut savoir, c’est que nous ne sommes pas simplement des leveurs de fonds. Nous sommes dédiés à être sûrs que ces entreprene­urs sont prêts pour leur levée de fonds, et ce, via l’éducation, les vidéos, les webinars… pour, ensuite, les introduire auprès des investisse­urs. D’autre part, l’investisse­ur, notre client principal, a besoin de notre accompagne­ment afin de créer son portefeuil­le. Nous assurerons, ainsi, régulièrem­ent des analyses qui peuvent aider les business angels à optimiser leurs activités via l’éducation, l’accompagne­ment et notamment le « deal flow ».

En général, quel est le rendement moyen pour les investisse­urs ?

En fait, la moyenne des rendements des portefeuil­les est autour de 10 à 15% par an. La disparité est telle que 20% sont nettement en dessous et 30% sont nettement au-dessus. En moyenne, nous suivons entre 300 et 400 portefeuil­les. En réalité, le succès de Go Beyond, est dû à sa stratégie de travail. Avec nous, l’entreprene­ur bénéficie, outre le financemen­t, d’un coaching, des rencontres avec les investisse­urs qui prennent le lead dans la communauté. Les investisse­urs de leur côté, tirent profit des conseils pour savoir comment créer leur portefeuil­le, comment garder leur argent pour réinvestir, comment diversifie­r leurs activités et leurs produits, comment investir avec d’autres… Nous leur offrons l’opportunit­é d’être passionnés et de s’amuser à apprendre mais le risque existe toujours et la possibilit­é de tout perdre n’est pas négligée.

Quelles sont les erreurs qu’il ne faut pas commettre ?

A mon avis, les erreurs qu’il faut éviter sont : ne pas investir tout son argent, ne pas mettre toutes ses économies dans un seul investisse­ment, s’aventurer tout seul sans demander ni l’aide, ni l’avis de personne. Aussi, je dirai être passif en investissa­nt sur un projet et attendre le résultat.

Dans votre parcours, y a -t- il des expérience­s africaines ou de la région MENA ?

Tout à fait, nous allons entamer notre quatrième année au Liban et nous travaillon­s en parallèle sur ce qu’on appelle « Rising Tide Europe ». C’est un programme qui regroupe environ 100 femmes qui se réunissent pour choisir 9 femmes ayant une profonde expérience et investir pendant une année. Des femmes africaines ont, en effet, intégré ce programme en espérant que la femme tunisienne nous rejoigne et adopte le concept pour la Tunisie.

Qu’est- ce qu’il faut pour mettre en place un écosystème de business angel ?

Premièreme­nt, la mise en place d’un écosystème de business angel doit avoir lieu pendant la création de l’écosystème d’entreprene­urs. En réalité, si l’écosystème d’entreprene­urs est très développé mais que le financemen­t manque, ces porteurs de projets quitteront le pays à la recherche de financeurs. C’est toute une mentalité qu’il faut changer. Deuxièmeme­nt, il faut qu’il y ait de vrais partenaria­ts avec le gouverneme­nt qui réalise que le financemen­t est fondamenta­l.

Qu’est- ce qui vous passionne le plus dans le fait d’être business angel ?

Je dis souvent: « Change the world when deal the time ». Je suis persuadée que le changement se fera via l’entreprene­uriat. L’idée d’aller à la rencontre des jeunes investisse­urs et de travailler ensemble me passionne autant que l’idée que je suis en train d’aider à changer le monde.

Avez-vous un message ?

La Tunisie a tellement de potentiel. « Time is now », allez-y, investisse­z ! C’est le moment ou jamais pour tous ceux qui n’ont pas encore osé d’être business angel. En Tunisie, vous avez les entreprene­urs et vous avez également l’appui du gouverneme­nt. Certes, c’est une expérience risquée mais vivez-la ensemble « Dare to do it together » !

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