La RSE et les institutions financières tunisiennes Le pari gagnant de la RSE
De plus en plus d’entreprises dans le monde se soucient de leur impact environnemental et social. Dans plusieurs pays, ce sont les institutions financières qui s’activent le plus à cet égard. Alors, où en sont les banques tunisiennes et sont-elles en train de jouer leur rôle de leader ?
Promouvoir l’égalité hommesfemmes, réduire l’impact environnemental de l’activité économique ou encore contribuer à la formation des chômeurs… Voilà des actions que les entreprises sont de plus en plus tentées de lancer, non pas pour augmenter leur chiffre d’affaires (du moins pas directement), mais dans le cadre de leur responsabilité sociale. De fait, les entreprises sont appelées désormais à prendre en compte, de leur propre volonté, les enjeux sociaux et éthiques dans leurs activités. La responsabilité citoyenne, en termes de critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance, a gagné une place de plus en plus importante dans la communication des entreprises tunisiennes et des établissements financiers particulièrement. En effet, 74% des banques et des institutions financières ont mis en place une politique RSE. C’est ce que dévoile une étude présentée à l’occasion du séminaire "La RSE et les institutions financières tunisiennes", organisé en partenariat entre L’APTBEF et IRSET. Parmi ces entreprises, seules 21% ont indiqué que leurs efforts reposent sur la base d’une norme ou d’un référentiel RSE. Or, ces référentiels, sont d’une grande importance. Ils per
mettent de guider les entreprises dans leurs progrès en matière RSE, et de les orienter vers des actions objectives et standardisées. Ces référentiels permettent également de garantir une certaine efficacité en proposant une solution collective à des problèmes techniques ou organisationnels, a indiqué Alya Chalbi, chargée des activités de l’institut RSE Tunisie. Pour Amel Jrad, chargée de mission au ministère des Affaires Locales et de l’environnement, ceci pousse à poser la question: “Ces entreprises sont-elles réellement en train de pratiquer de la RSE ?”. Et d’ajouter qu’une bonne partie des entreprises confondent RSE et actions caritatives ! Ceci ne devrait surprendre personne, surtout que seules 38% des entreprises sondées indiquent offrir des formations RSE à leurs équipes ! Le Pacte mondial est parmi les référentiels les plus connus à l’échelle internationale. Il s’agit d’une initiative lancée par l’organisation des Nations Unies pour inciter les entreprises à adopter une attitude socialement responsable. Ce Pacte représente un cadre d’engagement volontaire destiné aux entreprises, associations ou organisations non-gouvernementales. Ces institutions sont ainsi invitées à respecter dix principes universellement acceptés touchant les droits de l’homme, les normes du travail, l’environnement et la lutte contre la corruption [voir encadré], a indiqué Jouhaina Gherib, directrice exécutive du réseau local
Pacte Mondial Tunisie. L’initiative a connu un fort développement, totalisant plus de 13.000 adhérents en 2018, dont presque 10.000 entreprises. Mais avant de s’amuser à lancer les initiatives à tort et à travers, “les entrepries doivent commencer par respecter la loi en matière d’environnement, du respect de l’environnement du travail et de transparence et lutte contre la corruption”, a interpellé Ahmed El Karm, président de l’association professionnelle tunisienne des banques et des établissements financiers avec la franchise qu’on lui connait. “Certes, notre raison d’être est de dégager des bénéfices. Néanmoins, il faut le faire de manière responsable et dans le respect de l’humain”, a ajouté El Karm.
Le reporting extra-financier
À l’échelle nationale, la Tunisie fait partie de plusieurs pays dans le monde q ui ont mis en place des cadres réglementaires dédiés à la RSE. Et bien que cette loi ait été votée le 11 juin dernier, elle n’est toujours pas mise en vigueur … à cause de l’absence du décret d’application. Celui-ci devrait être prêt “dans les semaines à venir”, a rassuré Hajer Sahraoui, conseillère auprès du Chef du Gouvernement. Ceci devrait permettre la mise en place de l’observatoire de la RSE prévu par ladite loi et qui aura pour tâche, entre autres, de suivre les programmes RSE et d’assurer leur bonne gouvernance. La conseillère à la Kasbah a également annoncé que la présidence du gouvernement avait “sollicité le soutien de nos partenaires étrangers pour nous assister lors de la mise en place de l’observatoire”. Au-delà de la loi tunisienne, les obligations réglementaires de la RSE se sont renforcées dans le monde lors de cette dernière décennie, a souligné Amel Jrad. La chargée de mission au ministère de l’environnement a mis en exergue dans ce cadre les exigences en termes de reporting extra-financier sur la RSE, tel qu’actuellement pratiqué en France. Le reporting RSE assure la transparence du dialogue avec les parties prenantes et peut s’avérer un véritable outil de pilotage de la performance globale de l’entreprise. Mais sa mise en place est loin d’être une mince affaire. L’experte a d’abord noté l’existence d’une multitude d’outils et de méthodes hétérogènes, compliquant la tâche pour les entreprises. Ce facteur est d’autant plus contraignant lorsqu’il s’agit d’une PME ou d’une PMI. Le manque de visibilité du retour sur investissement et l’absence de méthodologie robuste dans l’analyse des aspects écologiques et sociaux de la gouvernance sont aussi des éléments freinant le développement du reporting extra-financier, selon Jrad.