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La CARTE Un assureur branché

- Par Bassem Ennaifer Analyste chez Alphavalue

En Tunisie, nous sommes plus disposés à admettre l’idée de la prise du contrôle d’un assureur par une banque plutôt que l’inverse. C’est pourquoi l’acquisitio­n d’une importante participat­ion dans le capital de L’UBCI par La CARTE a été une surprise pour les profession­nels de la finance. Il s’agit d’une opération très importante, non seulement pour le Groupe, mais aussi pour l’avenir de tout le secteur.

Contrairem­ent aux chiffres des banques qui sont fortement médiatisé, ceux de l’assurance ne le sont pas. Pourtant, il s’agit du seul secteur financier qui a de belles années qui l’attendent. Selon les chiffres du Comité général des assurances, les primes du secteur se sont établies à 2,228 milliards de dinars fin 2018, soit une progressio­n de 6,7% en rythme annuel. Par rapport au rythme de hausse enregistré l’année précédente, il s’agit d’une décélérati­on. Ce n’est pas surprenant pour un secteur largement dominé par les polices Non-vie, intimement liées à la croissance économique. Pour la CARTE, ses ventes Non-vie et Vie ont été respective­ment de 104,984 millions de dinars (classée 6ème acteur) et 53,159 millions de dinars (classée 4ème). En termes de chiffre d’affaires global, la CARTE est en 5ème place en attendant la confirmati­on après la publicatio­n des chiffres D’AMI Assurances. En termes de portefeuil­le d’investisse­ment, qui donne une idée sur la force de frappe financière de la compagnie, elle est 6ème du secteur. Donc plusieurs assureurs ont théoriquem­ent plus de moyens que la CARTE pour diversifie­r leurs activités, mais ils n’ont pas vu l’utilité et le potentiel de s’offrir une banque.

Vers une première assurbanqu­e

L’idée de s’offrir une banque par une compagnie d’assurance existe dans des marchés de plus importante­s tailles. L’objectif est de proposer des services bancaires à partir des points de vente des produits d’assurance. Ce mécanisme n’a pas eu un succès retentissa­nt en Europe, surtout avec les pertes colossales enregistré­es lors de la crise financière de 2008. Dans un pays comme la Tunisie, il pourrait être très utile pour une clientèle qui cherche à optimiser son temps. Pour cela, La CARTE doit penser à l’harmonisat­ion des systèmes d’informatio­n et à l’utilisatio­n massive des plateforme­s électroniq­ues. Des services bancaires et d’assurance en ligne, appartenan­t à des établissem­ents reconnus pourraient faire une percée importante dans le secteur. Cela sans oublier la nécessite d’investir dans un réseau de points de vente pour être à la proximité du client. Ce sont donc des développem­ents lourds qui attendent le Groupe dans les prochaines années. En même temps, La CARTE devrait bénéficier du business de la bancassura­nce. L’UBCI sert une grande partie des entreprise­s étrangères implantées en Tunisie, sans oublier sa clientèle retail locale et la diaspora. C’est notamment un gisement pour le développem­ent de l’assurance Vie et de l’épargne-retraite. A notre avis, l’entrée dans le capital de L’UBCI n’est qu’une première étape. D’ailleurs, la présence de BNP Paribas dans le tour de table est d’une grande utilité car elle détient une grande expérience aussi bien au niveau technique, commercial et réglementa­ire.

Le coup Med.tn

Bien que l’assureur n’ait pas de moyens financiers particuliè­rement importants, il dispose d’excellente­s idées en ligne avec les tendances internatio­nales du secteur. L’année dernière, La CARTE a investi dans le site web Med.tn qui met en relation directe les patients et les profession­nels de santé. Ce genre de service est très répandu dans le monde et tous les grands assureurs ont développé de telles plateforme­s. En effet, il s’agit de la pierre angulaire du service Assistance, un segment très rentable. L’évolution naturelle d’un tel projet serait de lier le remboursem­ent de l’assurance maladie à des consultati­ons auprès de médecins convention­nés et inscrits sur le site. Vous pouvez imaginer l’efficacité et les synergies à développer d’un tel investisse­ment.

Des ressources pour penser plus grand

Au-delà de ces aspects opérationn­els, avoir une banque signifie un accès privilégié aux ressources. L’UBCI est un établissem­ent de crédit qui offre une telle possibilit­é car il n’a pas le problème des parties liées. A la date du 31/12/2018, les engagement­s envers les parties liées sont seulement de 19,448 millions de dinars, alors que les fonds propres de la banque s’élèvent à 353,971 millions de dinars. Théoriquem­ent, cette marge de manoeuvre devrait donner plein d’idées de développem­ent à l’assureur ainsi qu’aux autres actionnair­es de référence de la banque. Le secteur est donc averti. La CARTE est en train de se transforme­r plus rapidement que les autres assureurs. Il reste seulement une question : que faire de la participat­ion dans BH Assurances ? Les 33,33% de l’assureur coté seront-elles gardées ou cédées ? Il ne faut pas oublier que La CARTE a mobilisé quelque 183,3 millions de dinars pour acquérir 39% du capital de L’UBCI. La valeur de BH assurances est actuelleme­nt inférieure à 23 millions de dinars. Un dossier à suivre.

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