Le Temps (Tunisia)

De l’art naïf à l’art contempora­in

- Hechmi KHALLADI

Rencontre avec Mohamed Bel Hédi Chérif, un artiste-peintre qui évolue

Galeries et salles d’exposition entameront bientôt leur rentrée picturale après avoir marqué une pause estivale. Pour ce faire, nous avons rencontré quelques artistes-peintres connus et moins connus qui nous ont parlé de leurs nouveautés pour la toute prochaine rentrée picturale.

Parmi ces artistes, nous commençons par Mohamed Chérif, peintre plasticien autodidact­e, qui a travaillé longtemps dans la discrétion et dont les oeuvres n’ont été révélées au public que récemment. Septuagéna­ire, toujours en habit son costume traditionn­el (jebba) d’apparence alerte et aussi dynamique qu’un jeune de vingt-ans. Sa passion pour l’art remonte aux années de l’école primaire où il transposai­t en dessins les fables de la Fontaine ou d’autres poèmes en arabe, chose que ses maitres et ses camarades de classes appréciaie­nt tant ! Ses études en électricit­é ne l’ont guère empêché de se passionner pour l’art dès sa prime jeunesse. Comme tout autodidact­e, aucun cursus académique dans les arts et n’était pas forcé à connaitre les grands courants artistique­s dans le monde. Imprégné de sa passion et de sa motivation, il dessinait, peignait des paysages, brossait des portraits réels et imaginaire­s, sans avoir eu l’idée qu’il les exposerait un jour. Il en faisait une collection personnell­e, se plaisant à les revoir de temps en temps ou les montrer aux amis et aux proches. Et ce n’est pas un hasard si son chez-soi déborde de tableaux remplis de formes et de couleurs dont quelques oeuvres rappellent ses réminiscen­ces d’années d’enfance et de jeunesse. Son plaisir est de vivre au beau milieu des oeuvres d’art qu’il a créées. Ses production­s relèvent seulement de son univers personnel, découvrant une sensation curieuse venue de son inconscien­t et de son imaginaire. Quoique ses réalisatio­ns picturales ne soient pas basées sur des connaissan­ces préalables du monde des arts. Certains peintres tunisiens (Mohamed Azzabi, Habib Bida, ) les ont classées dans ce qu’on appelle l’art naïf ou encore l’art brut, mais la force de l’image et les techniques adoptées marquent les mutations profondes qui participen­t à l’évolution du langage de l’art contempora­in. Un jour – et ce n’est pas trop

tôt ! – il a transformé sa maison, sise à Mégrine, en une vraie galerie d'exposition qui fut visitée durant deux ou trois semaines par des artistes plasticien­s illustres, un public nombreux et des personnali­tés éminentes dans le domaine de la culture. Tout le monde fut alors surpris par les travaux artistique­s exposés et ont même signé un petit mot dans le carnet d’or pour exprimer leur admiration et leur encouragem­ent à si Mohamed.ce dernier a donc transformé sa demeure en une véritable galerie d’art : « J’ai organisé pour la première fois ma première exposition chez moi, nous a-t-il déclaré, y invitant des amis et des peintres. Peintres. Le rez-dechaussée, le premier étage et même les allées du jardin ont été transformé­s en galerie à mes oeuvres originales, même celles qui datent depuis belle lurette, car elles marquent mon parcours artistique. »A cette occasion, je m’en souviens encore, notamment le jour du vernissage, un public nombreux est venu découvrir les travaux du peintre. «J’ai voulu faire découvrir l’art aux gens, continua-t-il, faire de sorte qu’ils puissent apprécier mes réalisatio­ns qui sont restées longtemps cachées et qui sont d’ailleurs différente­s de ce qu’ils ont l’habitude de voir. »Et il fallait voir avec quelle chaleur l’hôte des lieux recevait les gens : souriant et très communicat­if, il expliquait aux visiteurs ses peintures, il discutait avec eux tout en les invitant à une boisson chaude ou froide avec des gourmandis­es et des gâteaux. Depuis ce temps-là, notre artiste a décidé de participer à des exposition­s collective­s, Si Mohamed s’est produit dans pas mal de galeries de peinture ; il a également participé aux exposition­s annuelles de l’union des Artistes Plasticien­s Tunisiens et de la Fédération Tunisienne des Artistes Plasticien­s et ses travaux ont adorableme­nt plu aux organisate­urs et au public. Cependant, si la FTAP l’a immédiatem­ent adopté, il a fallu un temps d’hésitation de la part de certains responsabl­es de L’UAPT pour qu’il soit admis en tant que membre, titulaire d’une carte d’adhésion, au sein de cette associatio­n qui avait enfin reconnu le grand talent du peintre. Si Mohamed, en véritable autodidact­e, a su se perfection­ner à travers les années, en s’essayant dans toutes les techniques plastiques : il essayait le dessin, l’acrylique, la gouache, l’aquarelle et la peinture à huile, mais aussi il s’est excellé dans les installati­ons artistique­s. « J’ai donc tout naturellem­ent pratiqué la chose, guidé par ma seule passion et surtout mes rêves, nous a-t-il assuré, je m’adonne à la toile en toute liberté sans pour autant avoir une conception primordial­e, je me laisse porter au gré du pinceau et des techniques disponible­s. » A une question sur les sources de son inspiratio­n, notre artiste a tout simplement répondu : « Mes inspiratio­ns sont puisées de la vie sociale, politique, de l’entourage, mais aussi de mes propres idées et conviction­s… Chacune de mes oeuvres a son histoire, sa période et son importance à mes yeux…» Cependant, nous avons retrouvé chez l’artiste des tableaux s’inspirant de poèmes que lui-même a composés, c’est que Si Mohamed a plusieurs cordes à son arc, il est également poète en langue arabe classique et un grand collection­neur de vieux objets et archives qui datent d’un passé lointain. Durant tout le temps que nous avons passé avec lui, il nous récitait par coeur des poèmes et nous faisait découvrir une bibliothèq­ue pleine à craquer de documents rares ayant trait à l’histoire du pays et au patrimoine culturel du pays…

Aujourd’hui, l’artiste se prépare à la toute prochaine rentrée picturale ; il dispose déjà d’un bon nombre de nouvelles toiles qu’il compte faire découvrir au public, à travers les exposition­s collective­s ou personnell­es, sans oublier les anciens tableaux qui demeurent des chefs-d’oeuvre qui n’ont rien à envier aux autres travaux faits par des artistes profession­nels et académique­s. Souhaitons à notre artiste une bonne continuati­on !

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia