Preuve et présomption d’intention
La diffamation en droit pénal est une infraction réprimant toute atteinte à l’honneur, la dignité et la considération d’une personne d’une manière générale. Elle peut être aussi bien dans le but de protéger la liberté d’expression que dans celui de la limiter. Le comité des droits de l’homme des Nations Unies estime que « Les lois sur la diffamation doivent être conçues avec soin de façon à garantir qu’elles ne servent pas, dans la pratique, à étouffer la liberté d’expression » Le décret-loi 2011-115 du 2 novembre 2011 sur la liberté de la presse a été conçu dans ce but, car auparavant et sous l’ancien régime, la diffamation était un prétexte à étouffer la liberté d’expression. L’ancienne loi sur la presse prévoyait même des peines de prison pour des accusations de ce genre.
Que dit le décret-loi ?
En vertu de l’article 55 dudit décret loi, « la diffamation est toute accusation ou imputation de quelque chose d’inexact déclaré publiquement et qui est de nature à porter atteinte à l’honneur et à la considération d’une personne en particulier, à condition qu’il s’en suit un préjudice personnel et direct à la personne visée. L’annonce de cette accusation ou de cette imputation, d’une manière directe ou au moyen d’une retransmission, est punie même si cela revêt la forme de supposition ou que la personne visée n’ayant pas été nommée expressément, son identification est rendue possible par le contenu, des propos présentés dans les discours, appels, menaces, écrits, imprimés, affiches, dessins, annonces ou publications électroniques » Et si les faits exprimés étaient exacts ? Selon une jurisprudence la cour d’appel de Paris, « La sincérité est un élément important dans l’information légitime, à condition que cette preuve soit parfaite, complète et corrélative aux imputations ». C’est donc une décision dans le but de protéger la liberté d’expression le journaliste parle de faits exacts et qui n’a aucune intention de porter atteinte à la dignité de qui que ce soit. Il peut par exemple s’exprimer d’une manière générale et sans nommer une personne déterminée, mais peut être poursuivi quand même par celui qui se sentira visé ou vexé, à travers un article écrit ou une déclaration orale, même s’ils sont exprimés sous forme dubitative. Il faudrait à ce moment que le plaignant rapporte la preuve qu’il ait été indirectement visé.
On parle de terrasses de café qui s’étendent jusqu’à la chaussée et qui gênent par là même le passage, et celui qui se sent visé agit pour diffamation contre celui qui l’a écrit ou déclaré.
La preuve de la diffamation en l’occurrence est difficile à rapporter, d’autant plus qu’il s’agit d’un fait véridique. Avec la preuve de la diffamation il faut également la preuve de l’intention , parce qu’il s’agit d’un délit intentionnel. L’absence de mauvaise foi est prouvée par la légitimité du fait poursuivi, comme le cas précité de celui qui a écrit sur la gêne que procure une terrasse d’un café s’étalant de manière anarchique et contraire à la loi. A cet élément s’ajoutent ceux de l’absence d’animosité et le sérieux de l’enquête rapportée par l’auteur objet de poursuites.
Il ne faut pas que les faits relatés soient déformés ou qu’il y ait une affabulation dans l’intention de nuire à une personne déterminée. Selon une jurisprudence récente de la Cour de cassation française, « la bonne foi doit être appréciée, en tenant compte notamment du caractère d’intérêt général du sujet sur lequel portent les propos litigieux ».
Si les faits s’avèrent établis, l’auteur de la diffamation sera condamné à une amende de mille à deux mille dinars, avec ordre de publier des extraits du jugement rendu dans l’affaire, au numéro du périodique condamné, suivant la date de notification du jugement, nonobstant la demande en dommages-intérêts.
La limite entre la diffamation et la preuve de l’absence de l’intention délictuelle reste difficile à établir, et le dernier mot revient toujours au juge qui a le pouvoir souverain de trancher dans le sens de l’équité et la protection des droits et des libertés.