Le Temps (Tunisia)

Défense : L’europe doit cesser de rêver, et payer

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La réaction semble de bon sens : avec les incertitud­es créées par l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche, il est grand temps que les Européens s’occupent de leur propre défense. Le président sortant, Barack Obama, s’est certes voulu rassurant, expliquant lundi 14 novembre, à l’issue d’un entretien avec Donald Trump, que « la déterminat­ion des Etats-unis à mainteniru­ne relation forte et solide avec L’OTAN ne faiblira pas ». Il n’empêche, le candidat Trump a semé le doute, pendant sa campagne, sur son intention de respecter les engagement­s de défense américains dans le cadre de L’OTAN ou avec le Japon, jugeant ces traités « obsolètes ». Le propos est des plus déstabilis­ants, alors que la Russie poutinienn­e, dont M. Trump s’est entiché, entretient la guerre en Ukraine, fait peur aux anciens pays du bloc de l’est et multiplie les intimidati­ons militaires, y compris au large des côtes françaises. Comme Obama, Trump exige, à juste titre, que ses alliés prennent leur part du fardeau financier.

L’europe de la défense deviendrai­t ainsi une ardente nécessité. Las, les choses ont peu de chances de se dérouler ainsi. L’expérience montre, que lorsque l’amérique va mal et s’éloigne de l’europe, le Vieux Continent se divise, voire se déchire. Au moment de la guerre d’irak en 2003, Jacques Chirac, l’allemand Gerhard Schröder et le Belge Guy Verhofstad­t voulurent relancer l’europe de la défense. Sans succès. A contrario, l’europe de la défense progresse lorsque l’entente avec Washington est bonne.

Mais, treize ans après la guerre d’irak, l’europe est de nouveau en lambeaux : les Britanniqu­es quittent l’union européenne (UE), la Pologne de Jaroslaw Kaczynski s’est brouillée avec l’allemagne et la France, annulant pour raisons idéologiqu­es un contrat d’achat d’hélicoptèr­es militaires d’airbus. Comment espérer avancer ainsi, y compris sur le plan industriel ?

Enfin, l’incertitud­e que fait peser Donald Trump sur le parapluie nucléaire de L’OTAN donne un coup de jeune à la dissuasion nucléaire franco-française, qu’il faudra moderniser si elle veut rester pertinente au-delà de 2030. Un projet qu’il n’est pas imaginable d’européanis­er. L’initiative des Européens, qui se réunissaie­nt lundi 14 novembre pour adopter une nouvelle « feuille de route » évoquant une éventuelle « autonomie stratégiqu­e » de L’UE est louable. Federica Mogherini, la haute représenta­nte pour la diplomatie européenne, se paye de mots en évoquant la chimère d’une « superpuiss­ance qui croit au multilatér­alisme ». D’ailleurs, les Européens se sont empressés de remettre au premier semestre 2017 le sujet le plus audacieux, la création d’un quartier général opérationn­el pour planifier des opérations européenne­s. Certains y verront de la pusillanim­ité, d’autres de la sagesse. Cette idée est un chiffon rouge pour les Européens du Nord, qui refusent que L’UE empiète sur les prérogativ­es de L’OTAN. L’essentiel, à court terme, est d’éviter un conflit entre L’UE et L’OTAN et de contenir les forces isolationn­istes américaine­s. Sur ce point, le ministre de la défense britanniqu­e, Michael Fallon, a eu le mot juste en expliquant à ses pairs que « dépenser davantage pour la défense est la meilleure approche possible face à l’élection de Trump ». Les Américains verraient un prétexte de retrait s’estomper, l’europe serait plus sûre et la France y trouverait son compte, qui contribue plus que les autres à la sécurité européenne.

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