Lobbying, tension et révélations
Le chef du gouvernement, Youssef Chahed, et son équipe ont été présents à l’assemblée des représentants du peuple jeudi 20 juillet pour répondre aux questions des élus en ce qui concerne la campagne de lutte de la corruption initiée le 23 mai dernier. Après l’allocution du chef du gouvernement, le président de L’ARP, Mohamed Ennaceur, a annoncé que cent-huit députés poseront leurs questions aux membres de l’équipe gouvernementale ce qui fera, en tout, neuf heures et demie de temps de parole. Pendant la première séance de la plénière, presque toutes les interventions ont tourné autour de la lutte contre la corruption entre ceux qui ont appelé à la consolidation de l’arsenal juridique en cette matière et ceux qui ont demandé à ce que l’opacité des opérations soit levée. Peu d’élus ont abordé d’autres questions à l’instar du développement, de l’état de l’économie nationale ou encore des questions sécuritaires. Loin des officialités, les coulisses du Parlement demeurent le meilleur moyen pour comprendre le positionnement de certains et les intentions des autres. Etant l’endroit préféré des députés, la buvette du bâtiment est sans doute l’un des plus importants coins du Parlement où tous ceux qui se déchaînent en haut se retrouvent, parfois, calmement en bas autour d’un bon café. Le secrétaire d’etat aux Domaines de l’etat et aux affaires foncières, Mabrouk Korchid, en a d’ailleurs payé les frais ; alors que les députés et ministres débattaient de la lutte contre la corruption, l’ancien député de l’assemblée nationale constituante et actuel avocat de Chafik Jarraya, Fayçal Jedlaoui, faisait le tour des halls de L’ARP et enchaînait les discussions avec presque tous ceux qui croisaient son chemin. A un moment, Jedlaoui a été aperçu en train de dire deux mots à Mabrouk Korchid qui, en manque de patience, a fait vite de mettre fin à la conversation violemment, en haussant le ton contre l’avocat qui a vite fait de se retirer. Jedlaoui a été aperçu en compagnie de plusieurs députés avant de disparaître complètement de la circulation.
Au rez-de-chaussée et devant la porte principale d’accès à la grande salle, journalistes, ministres et élus discutaient de la situation générale du pays pendant que d’autres analysaient le discours de Youssef Chahed : entre sympathisants et détracteurs du chef du gouvernement, l’ambiance a été assez lourde et chacun essayait de faire entendre raison à l’autre. Contrairement à ce que l’on peut, à raison, penser, les critiques les plus virulentes contre le chef du gouvernement et son discours émanaient plus du côté de ses souteneurs que de ses opposants. Quelques députés du mouvement de Nidaa Tounes n’avaient aucun complexe, dans les couloirs du Parlement, de faire comprendre qu’ils ne comptaient en aucun cas se contenter d’interventions dociles envers Youssef Chahed et son équipe.
De leur côté, exemplaires dans leur discrétion, les députés du bloc d’ennahdha n’ont rien laissé voir, à part les interventions de ceux qui sont désormais connus pour être les détracteurs du chef du mouvement, Rached Ghannouchi, toutes les autres allocutions des Nahdhaouis sont allées dans un sens unique d’encouragement et de timides recommandations au gouvernement. Cette séance n’a certes abouti à aucun vote mais elle va servir de baromètre à Youssef Chahed qui préparerait, pour le 26 août prochain, le dépôt du bilan d’une année de travail et un petit remaniement ministériel.