Le Temps (Tunisia)

Le grand gâchis

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La Tunisie, l’egypte et (probableme­nt) le Maroc iront en Russie, le billet de ce dernier dépend d’un petit point négociable à Abidjan. En guerre depuis plus de six ans, la Syrie, qui n’a ni championna­t régulier ni une légion étrangère dont les éléments évoluent dans les meilleurs championna­ts d’europe, a failli, elle, se qualifier. La désillusio­n est chez nous, du côté de Baraki, forteresse de l’équipe nationale. Et celle-ci a raté lamentable­ment l’avion qui aurait pu l’emmener, pour la troisième fois consécutiv­e, à la grande messe du football en juin prochain en Russie. C’est la fin peu glorieuse d’un cycle et le début de grandes incertitud­es. En moins de trois ans, cette équipe nationale a consommé trois entraîneur­s, a été humiliée en phase finale de Coupe d’afrique des nations et a été éliminée d’une manière peu glorieuse de la CM 2018. Le limogeage du sélectionn­eur national espagnol n’est pourtant pas une solution à un mal profond qui ronge le football algérien. La politique des résultats immédiats, la culture des égos des uns et des autres, l’absence d’une politique sportive à moyen et long terme et, surtout, le clientélis­me qui gangrène la Fédération algérienne de football, dont la compétence discutable de beaucoup de ses responsabl­es, ont encore plongé le football national dans une autre crise existentie­lle. La parenthèse des fruits de la réforme sportive des années 1970, qui ont duré jusqu’en 1990, avec une brillante participat­ion au Mondial espagnol (1982), puis le ratage sur le fil au Mexique (1986) et une Coupe d’afrique des nations (1990) a été refermée précocemen­t. 20 ans après une CAN remportée au forceps « at home », la sélection nationale n’a pas brillé ni survolé le continent. Avec l’apport d’éléments des championna­ts européens, elle a pu faire illusion, l’espace de deux Coupes du monde (2010-2014). Rien de plus. Ce qui est rageant, c’est que l’équipe nationale n’a jamais pu s’élever au niveau des grandes équipes de football en étant « abonnée » aux phases finales de Coupe du monde et de la CAN, à défaut d’en remporter une. Ni reconquéri­r un autre titre africain après le départ des « gloires » de la réforme de 19760.

Ce constat n’a bien évidemment jamais été fait, sinon toutes les équipes qui se sont succédé à la tête de la FAF auraient démissionn­é, au moins par respect aux jeunes génération­s. Ce qui est aujourd’hui alarmant, désespéran­t, c’est de voir que les leçons des échecs antérieurs ne sont jamais apprises par les responsabl­es du football algérien. Car au lieu de réfléchir à tout rebâtir, en repartant de la base, avec un programme de travail pour préparer, au moins à moyen terme, les prochaines CAN et la CM 2022, à la FAF on se triture ce qui reste de méninges pour dénicher… un remplaçant à Alcaraz. Et c’est la même fuite en avant qui se poursuit. Que fera un autre entraîneur qui sera lui aussi otage des visions étriquées de la FAF, qui lui remettra entre les mains une équipe nationale sans âme, des joueurs qui n’ont plus envie de mouiller le maillot et un championna­t national qui a cessé depuis longtemps d’être un vivier de joueurs du cru ? A ce stade de la gabegie, il serait opportun de se poser des questions sur le silence des autorités, si elles cautionnen­t cette mascarade du football, puisqu’elles lui ont attribué une autre mission, la pacificati­on du front social, alors que le pays est entré dans une profonde crise des valeurs. Le mythe d’une équipe nationale flamboyant­e, invincible, qui défend les couleurs nationales, a vécu. Ne restent que les illusions perdues pour pleurer sur le grand gâchis.

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