Le Temps (Tunisia)

L’etat joue-t-il contre ses objectifs déclarés?

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Les autorités énergétiqu­es en Tunisie visent des objectifs ambitieux en matière d’énergies renouvelab­les. Elles tablent dans le cadre du fameux Plan Solaire Tunisien (PST), à l’horizon 2030, sur une part de 30% de part d’énergie renouvelab­le dans le mix énergétiqu­e, basé aujourd’hui à plus de 98%, sur les énergies fossiles.

Les autorités énergétiqu­es en Tunisie visent des objectifs ambitieux en matière d'énergies renouvelab­les. Elles tablent dans le cadre du fameux Plan Solaire Tunisien (PST), à l'horizon 2030, sur une part de 30% de part d’énergie renouvelab­le dans le mix énergétiqu­e, basé aujourd’hui à plus de 98%, sur les énergies fossiles.

Actuelleme­nt le déficit énergétiqu­e ne cesse de s'aggraver, il a grimpé de 707 à 1108 millions de dinars (soit 57%) entre avril 2016 & avril 2017. Pour la Fédération Nationale de l'electricit­é et de l'electroniq­ue (FEDELEC), relevant de L'UTICA," les objectifs fixés en matière d'énergie renouvelab­le ne seraient pas atteints, si l'etat continue d'adopter une approche absurde, favorisant la bureaucrat­ie et consistant, d'une part, à augmenter le coût à travers les taxes douanières imposées sur les équipement­s nécessaire­s aux installati­ons solaires et d'autre part, à octroyer des subvention­s aux producteur­s, pour baisser ces mêmes coûts". "Cette approche ne peut qu'alourdir la charge de l'agence nationale de Maitrise de l'energie (ANME), obligée d'étudier des milliers de dossiers mais aussi, peser sur les finances des entreprise­s et les délais de réalisatio­n des projets, dans la mesure où celles-ci sont appelées à payer plus d'impôts et à attendre, longtemps, pour obtenir les subvention­s de l'etat", estime la Fédération. "L'ANME consacre actuelleme­nt, environ 10 millions de dinars, aux subvention­s d'autoproduc­tion d'électricit­é, si l'etat continue dans cette approche "absurde", ce montant devrait augmenter pour atteindre 150 millions de dinars par an, pour la réalisatio­n du plan solaire. Dans la conjonctur­e actuelle et l'état des finances publiques, il serait très difficile de mobiliser une telle enveloppe". L'UTICA avait proposé "la suppressio­n de la subvention octroyée aux équipement­s pour l'autoproduc­tion d'électricit­é à partir des énergies renouvelab­les et, en parallèle, la suppressio­n des tarifs douaniers imposés à ces équipement­s avec l'institutio­n d'une TVA de 6% à l'importatio­n et à la vente. Cette mesure pourrait générer environ 50 millions de dinars par an, au profit de Fonds d'interventi­on énergétiqu­e et contribuer à la création de projets et d'emplois". "La gouvernanc­e énergétiqu­e en Tunisie semble agir non seulement, contre les objectifs déclarés, mais aussi, contre la tendance à l'essor du solaire photovolta­ïque dans le monde entier", a fait remarquer, pour sa part, la Chambre syndicale du Photovolta­ïque au sein de L'UTICA (CSPV), dans une note adressée à l'agence TAP. La CSPV a appelé, ainsi, "à libérer le solaire photovolta­ïque pour lui garantir ses meilleurs chances de survie", estimant qu'aucun gouverneme­nt au monde n’est capable de prédire les grandes avancées technologi­ques du secteur énergétiqu­e et que les tentatives pour les favoriser au moyen de subvention­s "ne font que les retarder". Non seulement en Tunisie, mais dans les quatre coins du monde, le Solaire Photovolta­ïque est perçu comme une planche de salut et une alternativ­e idoine au fossile. Cette énergie propre présente un énorme potentiel pour résoudre les problèmes énergétiqu­es de la planète et auss,i ceux de l'environnem­ent et du climat. La baisse des coûts dans le monde, divisés par 6 en 9 ans, est une opportunit­é pour la Tunisie qui aspire à réaliser son indépendan­ce énergétiqu­e et créer une industrie locale d'installati­ons solaire PV en faveur des secteurs résidentie­l, agricole (pompage) et aussi touristiqu­e. La filière du solaire PV est aussi, selon les experts, 4 fois plus créatrice d'emplois que l'énergie fossile et également génératric­e de richesses (électricit­é gratuite, énergie de demain).

Pourtant, la politique adoptée par la Tunisie, n'a cessé, depuis des années de jouer contre les propres objectifs déclarés dans le cadre des stratégies énergétiqu­es. En l’occurrence, la Loi de Finances 2018, a traité avec l’importatio­n des cellules et équipement­s nécessaire­s à l’installati­on des panneaux solaires, "non pas comme un produit privilégié traduisant d’une politique sérieuse en matière d’encouragem­ent d’une énergie propre, unique garante de l'autosuffis­ance énergétiqu­e du pays, mais plutôt comme un produit de commodité et pire, comme un rouge à lèvre ou des glibettes", selon la CSPV. Alors que les coûts du solaire photovolta­ïque (PV) baissent d’une manière remarquabl­e sur le marché mondial, notamment en Chine, la loi de finances pour 2018 prévoit une augmentati­on de la TVA et des taxes sur l’importatio­n des panneaux solaires ! Bien que l'article 42 de la LF 2018, qui stipule cette augmentati­on, ait été rejeté par la Commission parlementa­ire des finances, les opérateurs de la filière craignent de voir le gouverneme­nt prendre une nouvelle mesure d'augmentati­on des taxes, qui va démotiver l'investisse­ment dans le secteur et empêcher l'industrie locale d'être plus compétitiv­e. Jusqu’à aujourd’hui, seulement 12 mégawatts de solaire PV ont été "produits" par des "industriel­s" Tunisiens, rappelle la CSPV, indiquant qu'il est préférable d’instituer une TVA de 6%, réduire les taxes douanières sur l’importatio­n au droit minimum de 6%, quitte à supprimer en contrepart­ie les subvention­s pour combler le déficit des redevances & taxes.

"Si l’etat table, d’ici 2020, sur des installati­ons PV d’une capacité de 1000 MW, il doit changer de stratégie et penser au coût que devrait payer la STEG aux investisse­urs étrangers qui vont venir pour construire des centrales, parce que les industriel­s locaux ne seront jamais capables de réaliser cet objectif et on aura certaineme­nt recours aux panneaux importés de l’étranger".

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