Le Temps (Tunisia)

Macron se rêve-t-il en chef de guerre?

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Bien étrange apparaît être le « hasard » qui a fait que le président français Emmanuel Macron a reçu en audience à l’elysée une délégation de responsabl­es kurdes syriens le jour même où Donald Trump annonçait que les forces militaires américaine­s déployées en Syrie où elles sont en soutien aux milices kurdes dans le nord du pays allaient être très vite retirées.

Il a en tout cas suscité l’impression que Macron en recherche d’une opportunit­é qui lui permettrai­t de replacer la France sur le dossier syrien a été tenté de jouer la carte kurde en exprimant son soutien aux attentes formulées par la délégation qu’il a reçue.

Mal lui en a pris de prendre une telle initiative dont il s’est empressé d’atténuer la portée tant elle a suscité de colère en Turquie exprimée par le président Erdogan qui a déclaré que son pays refuse toute médiation française pour un dialogue entre lui et les milices kurdes de Syrie. La réaction turque a en effet contraint l’elysée à démentir que le président Macron aurait promis aux représenta­nts des milices kurdes de Syrie que la France allait suppléer au désengagem­ent militaire américain annoncé par l’envoi de soldats français pour lutter à leurs côtés contre Daech et dissuader la Turquie de saisir les localités encore sous leur contrôle dans le nord de la Syrie.

Il se pose alors la question de savoir si le président Macron s’est imprudemme­nt avancé à promettre à ses hôtes une assistance militaire française ou si ces derniers ont fait état d’une telle promesse pour lui forcer la main. Quoi qu’il en soit, la France ne peut prétendre inverser seule le cours des évènements dans le conflit syrien. Pas plus diplomatiq­uement que militairem­ent. Et ce n’est certaineme­nt pas en persistant dans la démarche qui a été suivie dans le conflit durant la précédente mandature qui a consisté à subordonne­r l’action française à l’unique objectif du renverseme­nt du régime légal syrien. Le rétropédal­age élyséen sur la question d’un engagement militaire français assumé et renforcé aux côtés des milices kurdes dans le nord de la Syrie ne rétablira pas pour autant la confiance entre Paris et Ankara et ne vaudra pas qualité à la France de médiateur acceptable aux yeux des principaux acteurs parties prenantes au conflit, surtout à ceux des autorités syriennes qui ont estimé à juste titre que la France s’est disqualifi­ée par le rôle néfaste qu’elle a eu dans la militarisa­tion et l’extension du conflit armé qui a détruit leur pays.

Qu’il ait eu ou non l’intention d’un engagement militaire français en faveur des milices kurdes, Macron en recevant leur délégation n’a assurément pas contribué à consolider l’ébauche de solution négociée au conflit syrien esquissée par Moscou et L’ONU sur la base de leurs efforts visant à l’ouverture d’un dialogue syro-syrien excluant les ingérences et interféren­ces étrangères. Et cela dans le temps même où par son annonce inattendue d’un prochain retrait américain de Syrie, Donald Trump a émis le signal que l’amérique ne fait plus obstacle à ce dialogue intersyrie­n.

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